Du jamais vu en temps de crise

Sur fond de crise économique, la journée nationale de grèves et de manifestations organisée demain sera une première du genre. En effet, explique Guy Groux, directeur de recherche au CNRS et au Cevipof et auteur, avec Jean-Marie Pernot, de « la Grève » (éditions Broché), « les dernières grandes mobilisations de 1968, 1995, 2003 et 2006 ont eu lieu à chaque fois dans un contexte de croissance plus ou moins forte. Si on lie le mouvement social à la crise économique, il faut remonter à? 1936 pour trouver une situation analogue, mais ce serait une absurdité de vouloir comparer les deux. Car en 1936, il y avait en plus un contexte politique d'unité contre la montée du fascisme en Allemagne et en Italie ».Plus qu'à l'émergence d'un grand conflit national en ces temps de crise, il estime que « la dimension des conflits sera plus locale, avec la poursuite de conflits durs dans les entreprises, comme chez Cellatex par exemple ». En 2004, les salariés de l'usine de synthèse textile à Givet avaient occupé l'usine en liquidation et relâché plusieurs centaines de litres d'acide sulfurique teint en rouge dans un petit affluent de la Meuse. du collectif à l'individuel« Les dirigeants se félicitent de la diminution du nombre de conflits. Mais dans les entreprises où les dirigeants ne sont pas capables de susciter la confiance, il y a davantage de désengagement, on passe du collectif à l'individuel », remarque, Hubert Landier, directeur du cabinet Management et conjoncture sociale. Pour Stéphane Sirot, professeur d'histoire du XXe siècle à l'université de Cergy-Pontoise et auteur de « la Grève en France », chez Odile Jacob, « il faut distinguer la grève de la conflictualité. Avant, la grève était le seul moyen d'exprimer la conflictualité. Or, aujourd'hui, la tendance est au déclin des jours de grève, même si les statistiques ne prennent pas en compte la poussée des mouvements sociaux de courte durée, comme les arrêts de travail de 2 heures ». Et de pointer une autre tendance qui s'est développée ces dernières années du fait des « contraintes qui ont été apportées au droit de grève et des difficultés du conflit ouvert dans certaines entreprises », à savoir les recours plus fréquents à la justice prud'homale ou l'augmentation des arrêts maladie. « Le conflit existe toujours, mais il est plus sourd et plus larvé. Ce mode de conflit échappe peu à peu au contrôle des syndicats. » Et en temps de crise, il pourrait connaître un nouveau souffle. Isabelle Moreau
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