Eurotunnel prévoit une forte croissance en 1996

Si un sujet n'est pas à l'ordre du jour, c'est bien celui du dépôt de bilan d'Eurotunnel. Face à ces rumeurs, il faut faire preuve d'esprit critique. Il est clair que les vendeurs à découvert de titres Eurotunnel avaient intérêt à faire baisser le cours. Nous allons probablement demander aux autorités de marché d'enquêter. » D'entrée de jeu, en présentant hier sur place les résultats commerciaux de la société, Patrick Ponsolle, co-président français d'Eurotunnel, a souhaité tordre le cou aux rumeurs, mais s'est refusé à donner le moindre détail sur l'état des négociations entre le concessionnaire du tunnel sous la Manche et ses deux cent vingt banques. Quatre mois après avoir déclaré la suspension du paiement des intérêts de la dette d'Eurotunnel à ses créanciers, Patrick Ponsolle espère être en mesure de donner quelques détails à la fin du mois de janvier. Quoi qu'il en soit, le 14 mars 1996, les banques devront officiellement faire connaître leurs intentions. A moins qu'elles ne demandent encore six mois de négo- ciations supplémentaires. Selon le contrat signé entre le concessionnaire du tunnel sous la Manche et ses banques, la suspension des intérêts de la dette ne peut dépasser dix-huit mois à compter de sa déclaration, qui a eu lieu en septembre 1995. Eurotunnel estime afficher pour 1995 un bilan honorable : 8 millions de passagers transportés, 1,3 million de voitures et 400.000 camions, soit, à la fin de l'année 1995, une part de marché de 40 % dans le transport transmanche. Le groupe affirme couvrir, par son cash-flow, les dépenses d'exploitation et une grande partie des investissements. Côté chiffre d'affaires, correspondant aux recettes acquittées par les passagers, le paysage n'est pas aussi rose, même si, pour une fois, Eurotunnel respecte ses prévisions. En raison des retards enregistrés au démarrage du système, le chiffre d'affaires d'Eurotunnel (navettes passagers, poids lourds et autocars) atteindra 2,1 milliards à 2,2 milliards de francs (entre 275 millions et 285 millions de livres). Il faut ajouter les recettes provenant du passage des TGV « Eurostar », gérés par les réseaux ferroviaires. Sur la base de trois millions de passagers ayant emprunté l'Eurostar, les réseaux ont, en fait, acquitté 75 millions de livres (600 millions de francs) correspondant à peu près à 9 millions de passagers et 2 millions de tonnes de fret. A l'origine, les réseaux ferrés prévoyaient un trafic de 15 millions de passagers dès la première année. Pour 1996, Eurotunnel prévoit une croissance de 40 % de son trafic poids lourds, et de 50 % du trafic tourisme. Patrick Ponsolle estime avoir marqué quelques points, notamment en obtenant une réduction de la fiscalité locale en Grande-Bretagne et un renforcement des mesures de sécurité exigées pour les ferries. « Tout cela est insuffisant par rapport à ce que nos actionnaires pourraient attendre. Un certain nombre des engagements pris par les opérateurs du projet n'ont pas été tenus », affirme-t-il. Chiffres à l'appui, Eurotunnel affirme être capable de commander à un nouveau fournisseur deux navettes poids lourds à 50 % du prix de revient acquitté par le constructeur TML (voir graphique). En 1987, Breda a facturé le prix de deux navettes 482 millions de francs. Actuellement, un fournisseur européen, dont le nom n'est pas encore divulgué, demande... 136 millions. Eurotunnel confirme donc avoir fait appel au comité d'experts pour régler son conflit avec les constructeurs. Aux gouvernements français et britannique, il réclame un traitement égalitaire par rapport aux autres moyens de transport. Patrick Ponsolle fait notamment remarquer qu'une concession de neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ans (tout, en Grande-Bretagne, appartenant à la couronne, il s'agit en fait d'un legs déguisé selon une coutume nationale) a été accordée aux futurs constructeurs de la ligne Folkestone-Londres. Enfin, il continue à réclamer la suppression des ventes hors taxes. JULIE CHAUVEAU
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