Tunnel sous la Manche : Getlink se transforme à grande vitesse

Après une année record, le directeur général du groupe, Yann Leriche, veut accélérer.
Yann Leriche, directeur général de Getlink (ex-Eurotunnel), mercredi à Paris.
Yann Leriche, directeur général de Getlink (ex-Eurotunnel), mercredi à Paris. (Crédits : © LTD / CYRILLE GEORGE JERUSALMI POUR LA TRIBUNE DIMANCHE)

Le 6 mai 2024, Getlink célébrera un anniversaire historique. Le tunnel sous la Manche fêtera ce jour-là ses 30 ans. Le 6 mai 1994, la reine Élisabeth II était au côté de François Mitterrand pour inaugurer à Coquelles, dans le Pas-de-Calais, une infrastructure qui demeure unique au monde, avec ses 50,5 kilomètres de tunnel. Un chantier de six ans pour un coût total de 100 milliards de francs (15 milliards d'euros), bien plus que les 50 milliards de francs (4,3 milliards d'euros) estimés initialement.

Depuis, Eurotunnel - devenu Getlink en 2017 - en a vu de toutes les couleurs. Endettement trop lourd, plans de sauvetage à répétition, augmentations de capital successives... L'entreprise a même frôlé la faillite en 2007, rescapée in extremis grâce à une réduction massive de sa dette. Dirigé depuis 2020 par Yann Leriche, un X-Ponts de 50 ans passé par Transdev et Bombardier, Getlink est désormais nettement bénéficiaire.

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Dirigé depuis 2020 par Yann Leriche, un X-Ponts de 50 ans passé par Transdev et Bombardier, Getlink est désormais nettement bénéficiaire. En 2023, l'exploitant entre autres du Shuttle (sa marque commerciale pour le trafic transmanche) a présenté les meilleurs résultats de son histoire, avec un chiffre d'affaires en hausse de 14 %, à plus de 1,8 milliard d'euros et un bénéfice net de 326 millions d'euros. Au premier trimestre, le chiffre d'affaires a néanmoins reculé de 23 %. Mais cette chute s'explique par la baisse du prix de l'électricité, au plus haut l'année précédente. Elle a pesé sur l'activité d'ElecLink, sa filiale de transport d'électricité par câbles sous-marins. La performance de 2023 reste un exploit, car les obstacles n'ont pas disparu. Au contraire.

En quelques années, le groupe a dû faire face aux conséquences du Brexit et à la chute brutale de l'activité pendant la crise sanitaire, marquée par de très mauvais résultats en 2021. Autre contrainte, la distorsion de concurrence criante entraînée par le « dumping social » mis en place par les compagnies de ferries. Getlink, qui emploie 3 600 salariés, se prépare par ailleurs à surmonter d'ici à la fin de l'année les complexités techniques et administratives des contrôles biométriques aux frontières. « Malgré un marché compliqué par la présence d'anciens monopoles nationaux, Europorte, filiale à 100 % de Getlink, est aujourd'hui la seule entreprise de fret ferroviaire rentable en Europe », remarque Yann Leriche.

2023 est la meilleure année de son histoire

Pour lui, la clé des succès futurs de l'entreprise réside dans sa résilience face aux changements constants des paramètres de son environnement. Et dans sa capacité à en extraire des opportunités, grâce à de nouvelles utilisations de ses actifs. « Que pouvons-nous faire de mieux que les autres ? » s'interroge-t-il. Au cœur des réflexions sur l'avenir, l'atout écologique. Getlink proclame être « le plus court chemin vers le futur bas-carbone ». « Nous disposons de deux ports "secs" qui ont besoin d'élargir leur territoire », précise le directeur général, évoquant le développement de l'« hinterland » du tunnel.

Entre autres par l'extension du Shuttle jusqu'à Lille, ainsi que par le passage au gabarit européen des rails britanniques, qui limitent de facto le transit des trains de marchandises : actuellement quatre convois quotidiens en moyenne, soit dix fois moins que prévu à l'origine. Du côté du trafic passagers, Getlink et Eurostar, filiale de la SNCF, détiennent une part de marché de 62 %. Mais la concurrence des trois compagnies de ferries P&0, Irish Ferries et DFDS repose sur des conditions d'emploi bien moins favorables. Et les bateaux polluent beaucoup plus : « Une traversée en voiture avec le Shuttle est 73 fois moins émettrice de CO 2 que celle en voiture avec un ferry », note Yann Leriche.

Pour étendre le trafic passagers, Getlink, qui perçoit des péages des opérateurs, espère mettre en place d'ici trois à cinq ans plusieurs autres lignes à grande vitesse : Londres-Cologne-Francfort, Londres-Bâle-Zurich et Londres-Genève. « Le point de bascule avec l'aérien se situe à quatre heures de trajet, avec une part de marché du train de 50 % », précise le patron de Getlink, qui veut doubler les liaisons à grande vitesse entre l'Europe et le Royaume-Uni d'ici dix ans. Trois opérateurs sont intéressés, la start-up espagnole Evolyn, le groupe Virgin et le néerlandais Heuro.

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Commentaire 1
à écrit le 29/04/2024 à 9:57
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Super ils ont ruiné les petits actionnaires, ils sont heureux d’annoncer qu’ils gagnent de l’argent.

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