La BCE fait ce qu'elle peut... et les marchés décrochent

Chute des Bourses européennes, baisse de l\'euro (jusqu\'à 1,2364 dollar), nouvelles tensions sur les dettes espagnoles (les taux à 10 ans ont dépassé 6,80%) et italiennes (taux à 10 ans à plus de 6 %) et regain d\'intérêt pour le Bund allemand (rendements à 10 ans autour de 1,38 %) ...De toute évidence, la Banque centrale européenne n\'a pas convaincu les opérateurs de marché !Des taux directeurs historiquement basPourtant, le conseil des gouverneurs de la BCE a décidé à l\'unanimité de baisser ses taux directeurs de 25 points de base. Le taux refi est ainsi ramené à 0,75 %, le taux de la facilité marginale de prêt à 1,50 %. Quant à la facilité de dépôt, elle n\'est plus rémunérée du tout. Quelques jours après un sommet européen plutôt constructif, les taux directeurs tombent ainsi à un niveau historiquement bas.Le ralentissement de la croissance touche l\'ensemble de la zone euroCette décision était largement attendue. La conjoncture économique a continué de se dégrader au deuxième trimestre. Comme Mario Draghi l\'a signalé au cours de sa conférence de presse, le ralentissement de la croissance touche maintenant l\'ensemble des pays de la zone euro. Ou dans le jargon de la BCE : « les risques à la baisse sur les perspectives d\'activité se sont réalisés ».La fin de la rémunération de la facilité de dépôt, une bonne idée ?Seule la fin de la rémunération de la facilité de dépôt faisait l\'objet d\'un débat (modéré), certains estimant que cela serait mal venu au moment où les banques doivent déjà augmenter leurs fonds propres. « Toutefois, le coût brut de cette décision est faible : 37 millions par semaine pour le système bancaire dans son ensemble, à comparer à 773 milliards d\'euros d\'encours au 29 juin. De plus, le coût net des annonces est nul ou négatif pour le système bancaire, notamment en raison de l\'indexation du taux des LTRO sur le refi moyen », tempère Jean-Louis Mourier, économiste chez Aurel bgc.L\'absence de mesures non conventionnelles déçoit les investisseursLa déception des investisseurs s\'expliquent principalement par l\'absence de mesures « non conventionnelles », en plus de la baisse de taux. « La politique de la Banque centrale européenne n\'est pas à la hauteur de la crise économique et financière que nous traversons », estime Philippe Bodereau chez Pimco. Pour lui, même si les dépôts des banques à la BCE ne sont plus rémunérés, « cela ne changera rien à leur volonté de protéger leurs liquidités ». « Rien ne changera tant que la BCE n\'acceptera pas de stabiliser les taux de marché en achetant directement la dette des pays sous pression », estime-t-il.Ainsi, ceux qui espéraient un nouveau LTRO (opération de refinancement à long terme) ou la réactivation du programme « SMP » (Securities Markets Programme) d\'achat de titres sur les marchés obligataires, ont été déçus. De toute évidence, la BCE, qui a poussé pour que le FESF/MES soit doté de la capacité d\'intervention sur les marchés secondaires de dette n\'a plus l\'intention d\'intervenir directement. Pourquoi ? « La gestion de son bilan et les accusations de monétisation de la dette en sont les raisons essentielles, mais le refus de la BCE est aussi motivé par la capacité des fonds européens d\'imposer des conditions aux pays qui bénéficieraient de leurs actions, alors qu\'elle-même ne dispose pas de cette capacité », souligne Jean-Louis Mourier.Le discours et la réalité« Il faut faire la différence entre le discours de la BCE et la réalité », prévient quant à lui Patrick Artus, chez Natixis. « En raison des aléas de moralité induits, la BCE ne peut pas dire ouvertement qu\'elle neutralisera les politiques non conventionnelles, à savoir le VLTRO et le SMP, mais elle ne laissera jamais un État de la zone euro être en cessation de paiements : si c\'est nécessaire, elle achètera toutes les dettes publiques nécessaires... sans l\'annoncer à l\'avance», explique-t-il.La réaction des marchés témoigne aussi de deux choses : 1- Le sommet européen des 28-29 juin n\'a pas totalement convaincuSi le sommet européen des 28-29 juin a fixé la direction, le principal reste à faire. « La mise en œuvre des conclusions des sommets européens est souvent leur point faible, chacun ayant tendance à juger l\'accord au gré de ses contraintes et de ses intérêts domestiques, ce qui peut créer retard et déception », estime Bruno Cavalier chez Oddo. De fait, de nombreuses questions restent sans réponse et sur les marchés, l\'euphorie du début de semaine a laissé la place au doute.2- La situation macroéconomique est réellement préoccupanteLe même jour, quatre banques centrales ont décidé d\'assouplir leur politique monétaire : la BCE mais aussi la Banque d\'Angleterre, la Banque populaire de Chine et la Banque centrale danoise. « Un signe clair de l\'état de faiblesse de l\'économie mondiale et de l\'inquiétude des banques centrales », indique Nouriel Roubini dans un tweet. La Banque d\'Angleterre (BoE) a un troisième cycle d\'assouplissement monétaire afin d\'aider l\'économie britannique à sortir de la récession, en annonçant 50 milliards de livres (62 milliards d\'euros) de rachats d\'actifs, tout en maintenant son taux directeur à 0,5 %. Quant à la banque centrale chinoise, elle a abaissé ses taux d\'intérêt pour la deuxième fois en moins d\'un mois.
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