Défense : la Turquie va-t-elle devoir renoncer à choisir un système chinois ? C'est bien possible

Ça tangue à Ankara. Après le choix d\'un groupe chinois, CPMIEC (China Precision Machinery Export-Import Corporation), pour la fourniture d\'un système de défense aérienne stratégique (T-Loramids), la Turquie est en train de se rendre compte qu\'elle n\'a peut-être pas fait le bon choix. Et de rétropédaler. \"Le choix n\'est pas définitif, a récemment assuré le président turc, Abdullah Gul, qui a été cité par le Hurriyet Daily News. Il y a une liste de candidats sélectionnés et la Chine est sortie première\". En clair, cela veut dire que la Turquie est toujours en phase d\'évaluation. Et entre Ankara et différentes capitales concernées, il y aurait actuellement des échanges à haut niveau et une intense activité diplomatique.Les Chinois ont proposé à Ankara un prix très compétitif (3 milliards de dollars) pour la fourniture de son système FD2000 par rapport à ses deux autres concurrents, le groupe américain Raytheon (Patriot) et Eurosam (MBDA et Thales), qui propose le SAMP/T Aster 30. Ces deux derniers évaluent le contrat autour de 4 milliards de dollars. Pékin a proposé de produire ce système en Turquie avec un très large transfert de technologies. Ce qui a été également décisif pour Ankara, qui souhaite à terme disposer d\'une industrie d\'armement de hautes technologies.Pas interopérable avec le système OTANL\'offre de CPMIEC avait été en outre jugée jusqu\'ici conforme par le ministère de la Défense turc par rapport à toutes ses exigences. D\'autant que le tir d\'évaluation par la DGA turque (SSM ou sous-secrétariat à l\'industrie de la défense) d\'un missile chinois s\'est bien passée, selon nos informations. Enfin, selon des sources concordantes, les Chinois ont proposé d\'aider la Turquie de l\'aider à devenir une grande puissance spatiale. Là aussi, cette proposition ne pouvait pas laisser les Turcs indifférents.Mais le système chinois FD2000 n\'est visiblement pas interopérable avec ceux de l\'OTAN. Car la Turquie a besoin de brancher sa future architecture de défense aérienne avec les systèmes de l\'Otan, et principalement certaines données très sensibles pour l\'identification d\'un ami et du système de l\'adversaire (\"Identify Friend and Foe system\"). Elles sont ultra-secrètes et ne peuvent être installées dans aucun système chinois. Ce qui n\'est pas vraiment une surprise. Surtout cette exigence était dans les spécifications demandées dans l\'appel d\'offre.MBDA et Thales en embuscadePourtant ni l\'OTAN, ni le SSM turc ne se sont réellement manifestés sur ce point pourtant clé pour mettre hors-jeu CPMIEC. Pourquoi ? \"Ils n\'ont pas jugé bon de le faire et ont été, après comme tout le monde, surpris par le choix turc, explique un connaisseur du dossier. Et ce choix démontre toute l\'exaspération du Premier ministre turc vis-à-vis des Etats-Unis et de l\'Europe. Les Turcs se sentent humiliés d\'être toujours laissés de côté dans les décisions régionales\".Et si Ankara disqualifiait finalement CPMIEC, cela pourrait peut être profiter à Eurosam (MBDA et Thales), qui sont arrivés derrière le groupe chinois mais devant Raytheon, selon nos informations. Un appel d\'offres sur lequel les équipes italiennes et françaises de MBDA et Thales se sont beaucoup battues. \"On y croyait\", explique-t-on à La Tribune.La Turquie est dans l\'OTAN\"Nous devons regarder les conditions (de l\'appel d\'offre, ndlr) mais il n\'y a aucun doute que la Turquie est principalement dans l\'OTAN\", a rappelé le président turc à des journalistes à bord d\'un avion revenant en Turquie et en provenance des États-Unis.Ces conditions \"sont multidimensionnelles, il y a des dimensions techniques et économiques et il y a une dimension d\'alliance. Elles sont en train d\'être évaluées. La Turquie a besoin d\'un système de défense\", a expliqué Abdullah Gul. La Turquie n\'est pour le moment dotée d\'aucun système de défense aérienne de longue portée.CPMIEC sous le coup de sanctions américainesEn outre, CPMIEC est sous le coup de sanctions américaines pour ne pas avoir respecté le \"Nonproliferation Act\" avec l\'Iran, la Syrie et la Corée du Nord. Les Etats-Unis ont fait part à la Turquie de leurs \"sérieuses préoccupations\" à propos de la décision d\'Ankara d\'acquérir un système de défense antimissile à une société chinoise visée par des sanctions américaines, a tonné samedi le Pentagone.\"Nous avons transmis au gouvernement turc nos sérieuses préoccupations au sujet des pourparlers qu\'il mène avec une société sanctionnée par les Etats-Unis pour un système de défense antimissile qui ne sera pas compatible avec les systèmes de l\'OTAN\", avait déclaré samedi dernier une porte-parole du département de la Défense.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.