Une maison pour la vie

Phénomène nouveau : alors que les générations précédentes recherchaient une résidence secondaire passée la quarantaine, voire la cinquantaine pour leur famille et leurs vieux jours, celles d'aujourd'hui envisagent dès la trentaine de se porter acquéreur d'une maison, quitte à mettre un bémol sur leur résidence principale. Quitte aussi à s'endetter. Ainsi Sophie, assistante juridique de 37 ans, a fait le choix de revendre son studio dans le centre parisien, préférant désormais louer plus grand dans le XVIIe arrondissement, et est partie en quête d'une maison en province à acheter pour y passer ses week-ends et vacances. Cette jeune maman désire un autre environnement que l'ambiance parisienne, pour sa petite fille de 16 mois. Mais s'y projette déjà pour ses vieux jours, voire dans un futur proche au gré des changements de vie professionnelle. Elle ne souhaite pas pour autant réaliser un rêve de fermière. Juste se donner la possibilité d'une autre vie, surtout plus confortable. Moins stressante.Investir dans la pierre pour mieux investir sa vie ? Pour émile Garcin, propriétaire d'une agence immobilière réalisant 50 % de ses ventes sur ce marché, « on achète une résidence secondaire souvent pour avoir une maison plus tard ». Pour ce professionnel de l'immobilier, dont la clientèle est à moitié parisienne, les lieux d'habitation parisiens seraient des « appartements de fonction ». On vit en ville puisqu'on y travaille, mais on a en réserve, quelque part, un endroit plus douillet pour finir ses jours. L'investissement n'est plus seulement financier, il devient alors affectif, pour ces Français « qui dépensent autant voire plus que pour leur résidence principale ». D'ailleurs, selon une enquête du site Internet www.residence-secondaire.fr, seuls 6 % des acheteurs verraient en cette acquisition un simple placement immobilier. La recherche d'un lieu de ressourcement (16 %), de rassemblement familial (15 %) ou d'un « chez soi, mais ailleurs » est plus importante pour ces acheteurs qui ne se limitent plus à la catégorie des retraités. Selon cette même enquête, ils seraient 45 % à avoir entre 35 et 50 ans, contre 25 % entre 50 et 70 ans. Preuve que le phénomène s'est déplacé vers les plus jeunes. 48 % possèdent leur bien depuis moins de deux ans !Et avec un parc immobilier de 3 millions de résidences secondaires (en 2005, source Insee), soit 10 % du parc total des logements, l'Hexagone détient le record mondial d'investissement immobilier sur ce marché. Un phénomène qui ne cesse d'augmenter depuis les années 1950, à l'instar de la grand-mère de Pauline, 25 ans, qui acheta une maison en Normandie dans les années 1970 afin d' « avoir un endroit où se retrouver tous en famille ». La plupart des Français préfèrent investir dans le Sud, où le climat reste agréable une grande partie de l'année : en 2006, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur concentrait 16 % du parc national des résidences secondaires talonnée de près par le Languedoc-Roussillon avec 12 %. Ceux qui ne peuvent pas se le permettre choisissent des départements comme la Somme, l'Oise ou l'Eure. Mais le plus souvent, l'acquisition d'un bien immobilier secondaire est souvent motivée par la volonté d'acquérir un logement dans sa région d'origine ou de se rapprocher de sa famille. Comme Sophie, qui oriente son choix vers la Normandie, « puisque le coin se situe entre chez mes parents et ceux de mon compagnon. J'aime l'idée de savoir que tout le monde pourra y passer ». Conséquence de la crise et des lendemains qui déchantent ? À l'heure où l'avenir n'a jamais été aussi incertain mais où l'espérance de vie ne cesse de croître, ces investisseurs ont désormais fait le choix d'avoir deux vies. Celle d'aujourd'hui et celle de demain.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.