Veillée d'armes avant le big-bang du marché boursier européen

Il règne une véritable atmosphère de start-up à Chi-X. Dans une petite salle située dans le très chic port de plaisance de St Katharine Docks, près de la City de Londres, une vingtaine de personnes tapent frénétiquement sur leur clavier. Dans le seul bureau à part, Peter Randall reçoit entre deux coups de téléphone. " Excusez-moi, mais je n'ai pas de secrétariat. " L'endroit n'est pas impressionnant, mais c'est d'ici qu'une véritable révolution pour les Bourses européennes est partie. Lancée il y a dix-huit mois, la plate-forme d'échanges Chi-X est devenue en août la quatrième Bourse d'Europe. Avec 68 milliards d'euros échangés, elle a devancé les Bourses d'Espagne, d'Italie ou de Scandinavie. Seuls Euronext, le London Stock Exchange et Deutsche Börse font mieux (certes avec chacun plus du double de volume).Mais Chi-X, s'il est pionnier en Europe, n'est pas seul. Au moins 4 autres plates-formes vont bientôt voir le jour d'ici à la fin de l'année, dont dans dix jours Turquoise, la plate-forme lancée par 9 grandes banques dont BNP Paribas et Société Générale. Cette soudaine explosion de MTF (multilateral trading facilities) fait suite à une directive de Bruxelles, dite MIF (marchés d'instruments financiers), qui a mis fin au quasi-monopole dont jouissaient les Bourses européennes. Plus rien n'empêche de créer des plates-formes paneuropéennes, permettant d'échanger des actions britanniques, françaises ou encore allemandes depuis un même endroit. " Il va y avoir de profonds changements pour les Bourses européennes ", avertit Andrew Howieson, analyste à Tabb Group.À ce jeu-là, les nouvelles MTF ont d'énormes avantages par rapport aux Bourses traditionnelles. La Bourse de Londres affiche 1.200 employés, contre 40 pour Turquoise, 27 pour Chi-X et 25 pour Nasdaq OMX. Cela permet d'afficher des prix défiant toute concurrence. Chi-X, le moins cher de tous, gagne 0,1 point de base pour chaque transaction. En août, avec 68 milliards échangés, la plate-forme a réalisé un chiffre d'affaires de 680.000 euros. " C'est suffisant pour atteindre l'équilibre ", témoigne Peter Randall, de Chi-X. Ces nouveaux MTF se concentrent uniquement sur les plus gros courtiers, qui réalisent leurs échanges automatiquement par logiciel. " Nous ne proposons que les "large caps"", explique Charlotte Crosswell, directrice de Nasdaq OMX. Chi-X a une offre de 533 actions, Turquoise 1.267 et Nasdaq OMX vise 600 d'ici à fin octobre.GUERRE DES TARIFSOutre le prix, les MTF se font concurrence sur la vitesse d'exécution. Les échanges étant réalisés par ordinateur, la première plate-forme qui réussit à faire se rencontrer offre et demande obtient la transaction. Nasdaq OMX affirme être la plus rapide, avec un ordre exécuté en 250 microsecondes ! Pour autant, il est trop tôt pour déclarer la mort des Bourses traditionnelles. D'une part, celles-ci resteront le lieu naturel de tous les courtiers de petite taille. Pour eux, être connecté aux différents MTF va demeurer compliqué. D'autre part, les Bourses européennes ont déjà réagi. " Ce sont des concurrents redoutables, estime Andrew Howieson, de Tabb Group. Elles ont des plates-formes de produits alternatifs, elles sont complètement automatisées. Ce n'est pas comme aux États-Unis, où désormais moins de la moitié des échanges se font sur les Bourses traditionnelles. " La Bourse de Londres vient aussi de baisser ses tarifs. La bataille des échanges boursiers européens est ouverte.
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