Le délicat exercice de la restructuration d'une dette souveraine

« Evoquer l'idée d'une restructuration de la dette de certains pays européens en difficulté a été très maladroit », assure Laurent Bilke, économiste chez Nomura à Londres, en faisant notamment référence à une interview de la chancelière allemande Angela Merkel, publiée le 9 novembre dans le « Financial Times ». Depuis deux semaines, d'ailleurs, celle-ci met en avant l'idée que les détenteurs d'obligations doivent accepter les risques... «C'est sous-estimer l'état de tension dans lequel se trouvent les marchés», explique Laurent Bilke. Nombre de responsables européens - du président de la Banque Centrale Européenne (BCE) à certains ministres, en Espagne, au Portugal et en Irlande, trois pays qui pourraient être visés par un tel processus - ont dû intervenir, pour tenter d'éteindre l'incendie provoqué sur les marchés par cette menace. Forte dépréciation Reste à savoir de quelle restructuration il pourrait s'agir. Une opération à chaud, dans le sillage d'un défaut, comme en Argentine en 2001, ou une option à plus long terme, dans le but d'alléger la dette des pays affectés par d'énormes déficits budgétaires, comme a l'air de le suggérer le Premier ministre grec (lire ci-dessus). En effet, en raison de la « solidarité » européenne, aucun pays de la zone euro ne devrait se retrouver dans une situation de véritable défaut. Et le président français Nicolas Sarkozy l'a assuré de nouveau lors du Sommet du G20 de Séoul, le stock de dette actuelle ne sera pas touché. Seules celles qui seront contractées après 2013, c'est à dire après la réforme des traités européens, pourraient l'être. Toutefois, dans tous les cas de restructuration de dette, les conditions d'échange sont en général peu favorables aux détenteurs, qu'il s'agisse de grandes banques, de fonds spéculatifs ou de petits porteurs. Ainsi, l'Argentine a échangé, au terme d'âpres négociations, et en 2005 seulement, une partie des 95 milliards de dollars d'obligations qu'elle ne pouvait plus honorer depuis la crise économique de 2001. Des bons échangés contre d'autres obligations d'Etat, mais avec une dépréciation de 70 % par rapport à leur valeur originelle. Certains détenteurs, un quart environ, ont refusé l'offre, jugée trop faible. L'Argentine a refait une nouvelle proposition en 2010, assortie, peu ou prou, des mêmes conditions. Finalement, après tant d'années d'attente, 66 % des détenteurs, des grands fonds américains comme des petits porteurs italiens, l'ont finalement accepté. Et l'Argentine, privée depuis près de 10 ans d'un accès au marché international des capitaux, peut aujourd'hui de nouveau y faire appel. Lysiane J. Baudu
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