La question climatique est de retour

Entre orages violents et menace de canicules, voici que ressurgit la peur des dérèglements climatiques. Depuis quelques mois, on la croyait reléguée aux oubliettes. La crise, ses conséquences sur l'emploi et l'impératif de rigueur budgétaire semblaient avoir éclipsé tout le reste. Surtout, les conclusions mi-figue mi-raisin du sommet de Copenhague sur le climat en décembre avaient enlisé les négociations de l'ONU. Pourtant, au beau milieu de la torpeur estivale, trois ministres de l'Environnement de l'Union européenne (UE) relancent le débat. « Nous sommes aujourd'hui convaincus de la nécessité, pour l'Union, d'adopter un objectif de réduction des émissions de carbone de nature à véritablement inciter à l'innovation et à l'action dans le contexte international?: une réduction de 30 % d'ici à 2020 », déclarent le Français Jean-Louis Borloo, l'Allemand Norbert Röttgen et le Britannique Chris Huhne dans une tribune parue jeudi dans les quotidiens « Le Monde » et le « Financial Times ». Un changement de ton lourd d'enjeux pour l'industrie européenne.L'éventualité d'une baisse de 30 % (par rapport à 1990) des émissions de carbone figurait bien dans les propositions de l'Union, depuis le « paquet énergie climat » adopté par le Conseil européen fin 2008, mais elle était conditionnelle?: les autres pays de la planète devaient eux aussi se fixer des objectifs ambitieux pour réduire leurs rejets de CO2, faute de quoi Bruxelles se contenterait de réduire les siens de 20 %?! Il n'était pas question pour les industriels du Vieux Continent de mettre en péril leur compétitivité, face à des entreprises étrangères qui seraient exonérées de contrainte faute de législation exigeante dans leur pays. Les premières réactions à l'initiative des trois ministres ne se sont pas fait attendre. « Nous croyons qu'une initiative unilatérale de l'Europe pourrait désavantager les industriels en leur imposant des coûts plus élevés que ceux de leurs concurrents internationaux », a protesté la Confédération de l'industrie britannique (CBI).Il est vrai que, depuis 2008, le ralentissement économique a permis d'accomplir une bonne partie de l'objectif initial européen. Le niveau d'émissions du secteur marchand de l'Union a été réduit de « 11 % par rapport à la période d'avant la crise », affirment les ministres. Et « le coût du passage à 30 % est désormais estimé à 11 milliards d'euros de plus que le passage originel à un objectif à 20 % de réduction, un surcoût de moins de 0,1 % de la valeur de l'économie de l'UE ».Les enjeux sont tout d'abord climatiques?: contenir le réchauffement sous le seuil critique de 2 °C. La Nasa ne vient-elle pas de calculer que les six premiers mois de l'année ont été les plus chauds jamais enregistrés??Les ministres savent aussi qu'un autre défi guette l'Europe?: la course aux technologies innovantes. Les États-Unis ont déjà commencé à massivement investir dans les technologies « vertes ». Et la Chine est sur leurs traces, avec l'atout d'une main-d'oeuvre à bas coûts et celui de son vaste marché. En 2009, les investissements attirés par la Chine dans les énergies « propres » se sont élevés à 40,3 milliards de dollars contre 29,3 milliards pour l'Europe, selon Bloomberg New Energy Finance. « Si nous nous tenons à ce taux de 20 %, l'Europe est susceptible de perdre cette course vers un modèle à faibles émissions de carbone... », alertent les ministres.
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