Dakar à l'heure de la Saga Africa

Dakar au Sénégal. L'homme s'avance sur la scène, et se lance, le visage tressautant de tics. « Nous voici donc entrés dans l'histoire », assène-t-il. Nicolas Sarkozy tentant de rattraper la bêtise de son discours de 2007 ? Plutôt André Malraux venu le 4 avril 1966 inaugurer le premier Festival mondial des arts nègres (Fesman) créé par le président Léopold Sédar Senghor pour affirmer la grandeur des cultures africaines après des siècles d'esclavage et de colonisation.Il aura fallu attendre près de cinquante ans pour que Dakar puisse accueillir la troisième édition du Fesman (la deuxième a eu lieu au Nigeria en 1977). Annoncée depuis 2006, reportée quatre fois, finalement organisée en un temps record pour un budget de 27 millions d'euros - 45 millions d'euros selon le journal d'opposition « La Gazette » -, la manifestation où nous étions invités bat son plein depuis le 10 décembre.Certes, certains artistes, tel Ousmane Sow, ont boudé le festival, d'autres reprochent au président sénégalais Abdoulaye Wade de profiter de l'événement pour redorer son blason. D'autres encore, annoncés, ne sont finalement pas venus. Reste une programmation d'une extraordinaire richesse, souvent passionnante, à la hauteur des plus grandes biennales internationales.« Nous sommes là pour affirmer la force, la vitalité et la créativité de l'Afrique », confirme le dramaturge afro-britannique Kwame Kwei-Armah, directeur artistique du Fesman. Aussi a-t-il demandé à une quinzaine de commissaires de sélectionner les oeuvres qui les ont le plus marqués. De quoi balayer seize disciplines allant des arts visuels à la mode en passant par la littérature, le théâtre, le cinéma, la danse, l'architecture, le design à travers des expositions, des débats, des représentations ou des rencontres. À première vue, la musique se taille ici la part du lion. Les concerts réunissant les plus grands noms comme Youssou N'dour ou le Haïtien Wyclef Jean attirent les foules. Et que dire de l'exposition présentée à la maison de la culture Douta Seck, l'une des plus extraordinaires jamais consacrées à la musique ? Usant des dernières technologies, elle raconte de manière interactive l'histoire et l'influence de la musique noire.Mais à chaque lieu ses surprises. On va au musée Théodore Monod pour son exposition d'art premier et on découvre le crâne de Toumaï et le squelette de Lucy, nos ancêtres.Les arts visuels ne sont pas oubliés. Les salles d'exposition de la « Biscuiterie » donnent à voir le meilleur de ce qui se fait aujourd'hui, qu'il s'agisse des oeuvres de l'Afro-Britannique Yinka Shonibare, de la Sud-Africaine Mary Sibande ou du Burkinabé Saïdou Dicko qui a imaginé un triptyque composé de petites photos figurant des ombres, agrafées sur un tissu noir et dont l'agencement dessine un motif peul.Que restera-t-il de tout cela à l'issue de la manifestation ? « Nous voulons aller au-delà du Fesman et pérenniser certaines activités », affirme Sonia Lawson, la coordinatrice générale du festival. Espérons que les bâtiments rénovés continueront à accueillir d'autres manifestations. C'est uniquement de cette manière que le Fesman pourra s'inscrire comme le point de départ de cette renaissance africaine fêtée tout au long de cette édition.Yasmine Youssi, à DakarJusqu'au 31 décembre. www.au-senegal.com
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