L'avalanche d'introductions russes en Bourse rencontre des investisseurs plutôt tièdes

Ce qui s'annonçait comme le retour en force des Russes sur les marchés internationaux est en train de tourner à la débandade. Au printemps, les analystes prédisaient pas moins de 20 milliards de dollars de fonds levés en Bourse. Mais alors que les opérations sont reportées ou déçoivent, moins de 3 milliards de dollars ont été levés jusqu'à présent. Dernier candidat en date, le groupe minier IRC a placé jeudi dernier pour 242 millions de dollars à Hong Kong (soit la moitié du paquet initialement prévu). Dès le lendemain, le titre plongeait de 11 % à 1,6 dollars. « Il n'y a aucun signe d'un soutien des investisseurs », observe le stratège de la banque d'investissement UralSib, Chris Weafer, qui remarque que le flot record d'investissements vers les émergents ne profite guère à la Russie, très loin derrière le Brésil, la Chine et même la Turquie. Le leader mondial des saphirs synthétiques Monocrystal a, lui, préféré reporter son introduction à 200 millions de dollars sur le marché londonien, prétextant « une considérable volatilité sur les marchés ». D'autres groupes se pressent pourtant au portillon, comme Mail.ru, un fonds d'investissement contrôlant plusieurs sites très populaires en Russie ainsi que des parts dans Facebook.com (2,4 %), Groupon (5,1 %) et Zynga Game Network Inc (1,5 %). Mail.ru envisage de placer entre 10 et 15 % de son capital à Londres, visant une valorisation supérieure à 5 milliards de dollars. Le Fonds pourrait lever jusqu'à 858,7 millions de dollars s'il parvient à placer ses 31 millions d'actions dans le haut de la fourchette de prix indicative (23,7-27,7 dollars l'action). image nuancéeL'offre russe de ces prochains mois est diversifiée, avec la chaîne d'hypermarchés O'Key dirigée par un transfuge de chez Auchan, le groupe aurifère Severstal Gold et celui de fret ferroviaire Transcontainer. Tous ces groupes espèrent lever autour du demi milliard de dollars. « La compétition actuelle [entre les groupes qui se préparent à un premier placement] est très forte. O'Key, Severstal Gold, Mostotrest et Pharmsynthez vont devoir s'offrir à bon marché, ou bien subir un échec. Le message de l'environnement est très clair », tranche Chris Weafer. Sans compter que la Russie conserve une image nuancée auprès des investisseurs internationaux, qui gardent tous en mémoire les déboires des actionnaires minoritaires du groupe pétrolier Ioukos, dont les actifs ont été brutalement renationalisés par le Kremlin en 2005. D'une manière générale, le fort interventionnisme des autorités russes dans le secteur privé a, ces dernières années, malmené de nombreuses valeurs russes. Les émetteurs russes subissent par conséquent un facteur risque très supérieur à leurs pairs des autres pays émergents (avec un ratio cours/bénéfices de 7,25 fois contre 12 en moyenne pour l'univers marchés émergents). L'appréciation du risque politique va sans doute encore longtemps rester matière à interprétation. Les investisseurs devront eux réviser leur perception des valeurs russes, qui sortent désormais complètement du secteur des hydrocarbures auquel elles étaient jusqu'ici limitées. Emmanuel Grynszpan, à Moscou
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.