L'effet pro-cyclique des titrisations

Par Jean-Marc Fossorier (gérant EF Consultants) et Dominique Chesneau (Tresorisk), membre du comité exécutif de l'Association nationale des directeurs financiers et de contrôle de gestion (DFCG).

Depuis vingt-cinq ans, les mathématiques financières ont permis de développer un marché de produits dérivés sur actions, changes et taux. L'édifice a prouvé sa capacité de résistance aux différentes crises que le marché a traversées (krachs boursiers, crises de change ou de taux d'intérêt). Jamais l'opinion publique n'a été alertée avant la crise financière de 2007/2008. Que s'est-il donc passé sur le sous-jacent crédit pour que cette crise dégénère en crise systémique ?
Les dérivés de crédit résultent largement de l'application à des actifs financiers de techniques de «tranching». Cela consiste à distiller les risques d'un portefeuille donné en laissant simplement passer le temps : les premières pertes affectent une première tranche, dite «equity», les suivantes une tranche «mezzanine» et les dernières une ou plusieurs tranches senior.

La «magie» du tranching est qu'il est possible, même si le portefeuille de départ n'est pas de bonne qualité mais à la condition qu'il soit bien diversifié, d'extraire une tranche senior très peu risquée représentant en volume 70% à 85% du montant du portefeuille d'origine. Cette tranche se verra attribuer une note «AAA» correspondant au fait que la probabilité que les pertes remontent jusqu'à cette tranche est estimée comme infinitésimale.

L'obtention d'un note «AAA» a procuré deux atouts majeurs aux tranches seniors, pour les investisseurs régulés (ces actifs ne consommaient pas de fonds propres) et pour les investisseurs non régulés (la notation ("rating") «AAA» était perçue comme une garantie de valeur plancher en marché secondaire) ce qui les a conduit à allouer à des actifs à long terme de la liquidité à court terme.

La vague de défauts sur les créances «subprime» qui avaient été disséminées dans les portefeuilles titrisés a affecté en totalité les tranches equity et mezzanine, comme prévu. Mais au delà des pertes réalisées, les portefeuilles se sont révélés moins diversifiés qu'anticipé, et les tranches senior beaucoup plus risquées qu'espéré. Les gérants d'actifs («asset managers») les ont vendues, parfois revendues aux banques qui les avaient structurées. Il s'en est suivi, dès 2007, une crise de la liquidité à long terme. Les investisseurs régulés ont dû déprécier la valeur de ces actifs, qu'il s'agisse de tranches invendues ou d'investissements ALM («Asset and Liability Management» ou gestion de bilan ou gestion actif/passif dans le domaine bancaire). Comme les montants étaient comparables aux fonds propres de ces institutions, la faillite d'une banque ou d'un assureur est apparue comme possible, et il s'en est suivi la crise de confiance entre banques et le gel de la liquidité court terme.

Cet exposé simplifié met en lumière le rôle des titrisations/CDO («Collateralised debt obligation», c'est-à-dire une obligation adossée à des actifs) dans la crise actuelle : les tranches senior, bien que protégées et rehaussées, sont néanmoins sensibles au risque systémique. Si la proximité du risque systémique avait été mieux appréciée, ces produits n'auraient pas trouvé preneur, et les investisseurs non régulés n'auraient pas apporté à l'économie une liquidité long terme qu'ils n'avaient pas. Le marché immobilier se serait moins «emballé» et le risque systémique ne se serait pas réalisé. Autrement dit, les titrisations /CDO ont eu un effet pro cyclique.

 

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Commentaires 2
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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A la lecture de l'article, on finit par ne pas comprendre très bien le principe du financement d'entreprise mais de comprendre ce qu'ont été les subrimes, un montage incompréhensible de théorie mathématiques et de termes incompréhensibles comme l'art...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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SVP Mrs Jean-Marc Fossorier (gérant EF Consultants) et Dominique Chesneau (Tresorisk), membre du comité exécutif de l'Association nationale des directeurs financiers et de contrôle de gestion (DFCG) (et les autres), assez de bla-bla, donnez-nous les ...

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