Banques : Y Viva España !

Par Valérie Segond-Brunschwig, éditorialiste à La Tribune.

Il peut paraître un brin provocateur de louer les grandes banques espagnoles, au moment où l'économie ibérique décroche, emportée par l'éclatement de sa bulle immobilière, ses fermetures d'usines et l'explosion du nombre de ses chômeurs. Et ce alors que l'Amérique latine, où elles sont très exposées, n'a pas encore livré toutes ses surprises.

Tant pis?! Les presque 9 milliards d'euros de bénéfice dégagés par la banque Santander sur l'"annus horribilis" 2008, et même les 5 milliards de BBVA, nous obligent à faire chapeau bas. Et à une grande humilité, le leader hispanique ayant dégagé trois fois les profits du champion français, BNP Paribas. Ceux qui croyaient que la banque avait acquis ses lettres de noblesse avec la finance anglo-saxonne devront revoir leur credo : c'est au royaume d'Espagne qu'il y a des leçons à prendre !

Il est vrai que le retard économique de la péninsule, pauvre en groupes mondiaux, a incité ses banques à négliger la banque d'investissement, source de tous les maux, pour mettre le paquet sur la banque de détail. Mais avec une expertise bluffante : avec des investissements informatiques du double de ceux de la plupart des banques depuis quinze ans, les grandes banques privées espagnoles ont construit leur base de données par client, et non par produit. Aussi évaluent-elles en temps réel leurs risques, et de manière si fine qu'elles facturent leur crédit client par client, et voient venir le défaut bien avant l'heure fatale.

Voilà pourquoi, malgré la violence de la crise espagnole, pas plus de 1,9% des créances de Santander sont douteuses et pourquoi la banque détient encore 6 milliards de provisions non utilisées. Mais pour tout dire, il n'y aurait pas de grand banquier ibère sans grand régulateur. Pendant que les régulateurs américain, anglais ou allemand, montraient une complaisance constante à l'égard de leurs banquiers, la Banque d'Espagne a imposé des normes plus exigeantes que partout ailleurs : provisions proportionnelles au crédit distribué, contrôle des risques drastique, interdiction de tout SIV, ces bombes "structurées", etc.

Avec une autorité telle qu'elle a fait disparaître les deux tiers des banques, et débarqué certains banquiers incompétents sans même consulter leurs actionnaires ! Montrant par là l'absence de consanguinité entre le régulateur et les banquiers... Au moment où les grands de ce monde cogitent sur de nouvelles règles du jeu bancaire, ils devront se rappeler que l'autorité incontestée de la Banque d'Espagne vient de la volonté politique forgée après la mort de Franco de construire les bases financières d'une démocratie espagnole solide.

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Commentaires 2
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Les banques espagnoles remplacent le percepteur : peu importe si les dépenses à régler pour les collectivités locales, mairies, régions, ne correspondent à aucune prévision budgétaire, c'est la dette publique, forcément solvable dans le cadre europée...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Les banques espagnoles ont distribué du crédit durant 10 ans à des conditions douteuses : les ménages espagnoles, pour acquérir leur logement (80% en sont propriétaires), se sont endettés à taux variable, sur des durées de 30, 40 voire même 50 ans, e...

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