Ne pas présager de l'avenir

Par Philippe Mabille, rédacteur en chef et éditorialiste à La Tribune.

Le 21-12-2012 est, selon le calendrier maya, la date de la fin du monde telle que la décrit le film catastrophe de Roland Emmerich. Cette prédiction millénariste ne semble pas avoir dissuadé Nicolas Sarkozy de se projeter au-delà de 2012, date de la prochaine élection présidentielle. Le rapport de la commission Rocard-Juppé sur "les dépenses d'avenir", remis hier au président, l'appelle à voir "loin" et "large", et sonne l'urgence pour ne pas désespérer, justement, de l'avenir.

A ceux qui craignaient qu'entre la pression des lobbys alléchés par la perspective de ce bel argent public si généreusement proposé et la propension malheureuse de la France à saupoudrer sans hiérarchiser les dépenses, Rocard et Juppé ont réussi à éviter le pire. L'emprunt stricto sensu sera limité à 22 milliards d'euros, évite l'écueil de l'appel plébiscitaire à l'épargne populaire (ce qui eût été risqué, vu la faible popularité actuelle du chef de l'Etat) et apporte une réponse inédite au casse-tête des contraintes du traité de Maastricht. Bref, dans le match qui opposait Guaino à Fillon, il n'y a ni vainqueur, ni vaincu.

"Je préfère financer des cerveaux que des vaches", avait déclaré Tony Blair à propos du budget de la politique agricole commune européenne. C'est également le choix des deux anciens Premiers ministres français Rocard et Juppé en proposant que la moitié de l'emprunt Sarkozy aille vers la recherche et l'université et en identifiant seulement sept priorités déclinées en dix-sept actions.

Reste à savoir si l'Etat est légitime à décider que l'avenir se trouve dans la voiture électrique, la société numérique, l'énergie décarbonée et les sciences du vivant. L'expérience du plan Calcul doit inciter à la prudence. A lire attentivement le rapport, on frémit à l'idée de ce qu'aurait pu donner un emprunt de 100 milliards d'euros. Pour préparer l'avenir, Rocard et Juppé ont aussi, c'était prévisible, accouché d'un véritable monstre technocratique, et le contrôle et la gouvernance des fonds seront à n'en pas douter une future mine d'or pour les magistrats de la Cour des comptes.

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