La retraite par points, enjeu de solidarité et d'efficacité

Il n'y a de meilleures solidarités que celles qu'on décide de choisir, parce qu'elles font sens et nous paraissent justes. Pour évoluer, elles doivent se fonder sur un dialogue démocratique qui pose clairement les options possibles et facilite ainsi les arbitrages. Le régime de retraite par points répond à ces exigences.

Le débat sur la réforme du système de retraite est porté par une seule question : report ou non report de l'âge de départ ? Si elle est au coeur du débat, c'est qu'elle cristallise l'inquiétude des salariés quant au devenir du système de retraite avec une seule obsession en tête : partir au plus tôt. La vivacité du débat autour de l'âge de départ en retraite est un signe d'impuissance face aux contraintes de la démographie et d'une économie mondialisée. Nous ne pouvons modifier la donne démographique - le vieillissement en France a été très précoce -, l'immigration n'y changera rien et il est beaucoup trop tard pour faire repartir le taux de natalité.

Nous ne pouvons pas augmenter trop les cotisations dans une économie globalisée où la concurrence fiscale est féroce au risque de pousser à l'externationalisation des entreprises et des cerveaux. Nous ne pouvons diminuer les pensions ou taxer les revenus des retraités au risque d'accroître les inégalités. S'il est vrai que 70% des retraités sont propriétaires et que le niveau de vie moyen est sensiblement identique à celui des actifs, la pauvreté a augmenté ces dernières années parmi les personnes âgées : + 25% entre 2005 et 2007.

Le maniement de ces deux leviers - pension et cotisation - requiert un pilote pour faire converger les régimes et pallier les effets secondaires. En dissociant la question des moyens de la finalité, le risque est de réduire le contrat intergénérationnel à des comptes de pharmacopole - on ne sait plus pourquoi on paye, ni les maux qu'on soulage. A l'inverse du système actuel, le régime par points présente l'avantage de dissocier ce qui relève de la solidarité de la contributivité : on sait pourquoi on paye et on peut décider du degré de solidarité. C'est le garant d'une solidarité choisie qui s'adaptera facilement aux mutations de la société.

 

A ce titre, le remède suédois du compte notionnel nous semble quelque peu antinomique avec la philosophie de notre protection sociale. A la pondération des pensions par génération, il nous semble préférable de mutualiser les différences d'espérance de vie entre générations à travers un pilotage négocié de la valeur du point. Un rendez-vous régulier pour définir les règles de partage de la dette "retraite" nous semble préférable à un pilotage automatique qui nous laisserait très peu de marge de manoeuvre face aux évolutions économiques.

Sous les aspects de la simplicité enfantine de la répartition - les actifs paient pour les retraités -, le système actuel recèle un imbroglio de règles et d'exceptions à la règle qui se sont mal adaptées aux nouvelles normes du marché du travail. Aveugle aux situations individuelles, le système de retraite instaure une double peine pour les trajectoires précaires. Pour deux individus qui auraient un salaire moyen et des périodes chômées identiques, la pension de retraite sera plus faible pour celui qui aura connu une trajectoire professionnelle difficile. Ce dernier aura une pension de retraite plus faible en raison des règles de validation de la durée d'assurance.

 

Le régime par points a l'avantage de la simplicité, une simplicité d'addition. Pour prendre en compte la pénibilité au travail - facteur majeur d'inégalités d'espérance de vie -, on peut imaginer un système simple de surcontributivité du point à la faveur des métiers pénibles, instaurer des normes de pilotage de la solidarité encadrant l'enveloppe de points attribuables gratuitement, et favoriser le redéploiement vers les besoins nouveaux tels que les aléas de carrière qui risquent d'augmenter avec le report de l'âge de départ en retraite.

En fonction des mutations sociales et du contexte économique, le niveau de solidarité du régime de retraite peut être ajusté. Par ailleurs, la mise en place d'un régime unique de répartition par points rien que pour les salariés du privé permettrait de diviser par deux les frais de fonctionnement - ce qui représenterait une économie de plus de 1 milliard par an. La transition vers un régime unique par points pourrait se faire rapidement - dans l'année 2012 -, sans difficulté particulière.

 

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