L'élection de Trump vue des salons de l'ambassade américaine à Bruxelles

La victoire de Donald Trump tend un miroir dérangeant à la bulle diplomatique et européenne.
A Bruxelles, on ne croyait pas au Brexit. Et personne ou presque ne souhaitait la victoire de Donald Trump. A présent tout le monde se demande : à qui le tour ? « Que va-t-il se passer l'an prochain en France », s'interroge cet invité.

Ce mercredi, les trois ambassadeurs américains à Bruxelles, auprès de l'Union européenne, de l'OTAN et de la Belgique avaient convié quelques dizaines de hauts fonctionnaires, diplomates et journalistes basés à Bruxelles pour une réception très matinale « sur invitation seulement ». Dès 4 heures, les viennoiseries étaient sur les tables et le café chaud coulait à volonté.

Un vrai décor de fête : ballons bleus, blancs et rouges, viennoiseries à gogo, maxi-écrans diffusant les programmes de CNN qui se détachaient sur les tapisseries du magnifique hôtel particulier XVIIIe abritant la résidence de l'ambassadrice auprès de la Belgique pour suivre la proclamation des résultats « comme si on y était ». Elle a été gâchée.

"C'est une grande surprise"

Avant même que le jour ne se lève, le basculement de l'Ohio et de la Floride dans le camp républicain ne laissait plus guère de doute. Badge bleu au revers du veston, Gregg Svingen, directeur de la communication d'un grand groupe américain et porte-parole à Bruxelles du parti démocrate, admettait : « c'est une grande surprise ». Son homologue du parti républicain avait préféré ne pas venir. Non qu'il ne fut pas invité, mais « il ne soutenait pas Donald Trump », explique Gregg Svingen.

« C'est la marque d'une rupture dans la société », assure une femme de diplomate. « Obama a fait les réformes sociales trop vite. Les gens se sont sentis déconsidérés ». Les diplomates de l'ambassade rivalisent quant à eux de prudence. Le TTIP est-il mort ? Les Etats-Unis vont-ils sortir de l'OMC ? « L'USTR (ministère du commerce extérieur) est une bureaucratie », explique une attaché. Le secrétaire au commerce va changer mais la politique commerciale, elle, se caractérise par une grande continuité, assure-t-elle. « Le TPP (traité commercial multilatéral avec le Pacifique) a commencé à être négocié sous Georges W. Bush », dit-elle. "La transition prendra du temps. On verra qui il choisira dans son cabinet", explique un collègue.

Une élection aussi dangereuse pour l'UE que pour les Etats-Unis

Côté européen, le ton est nettement moins apaisé, comme si cette élection était au moins aussi dangereuse pour l'Union européenne que pour les Etats-Unis. « C'est une catastrophe », s'attriste une haute fonctionnaire de la Commission européenne, tout en reconnaissant que personne n'a aucune idée de la politique que va suivre Donald Trump en Europe. « C'est exactement la même chose que le Brexit », explique une autre source, au Conseil européen. « Tout cela, c'est l'héritage de Thatcher et Reagan. On est allé trop loin dans la globalisation et la dérégulation », dit-il.

7h30. Un économiste ayant pignon sur rue observe les résultats avec un léger sourire. « Il faut faire les choses autrement... A présent, c'est à l'Europe de défendre les valeurs occidentales », dit-il, laissant entendre que les Etats-Unis sont sur le point d'abandonner ce rôle. Sur le papier, c'est pourtant ce qu'elle fait. « Sur le papier seulement », dit-il, convaincu que le départ du Royaume-Uni lève un obstacle à la création d'une armée européenne. "Ce serait un moyen de rééquilibrer le poids de France et l'Allemagne", pense-t-il.

A qui le tour?

A Bruxelles, on ne croyait pas au Brexit. Et personne ou presque ne souhaitait la victoire de Donald Trump. A présent tout le monde se demande : à qui le tour ? « Que va-t-il se passer l'an prochain en France », s'interroge cet invité.

8 heures. Il fait enfin jour. Les résultats ne font plus de doute. Anthony Gardner, l'ambassadeur auprès de l'UE, nommé en 2014 après une brillante carrière dans la finance, prend rapidement la parole en rappelant une citation du poète irlandais William Butler Yeats faite par le président Obama lors d'un discours en forme d'ode à la chancelière Angela Merkel, en avril à Hanovre : « Les meilleurs sont dépourvus de toute conviction, alors que les pires sont pleins de passion ».

« Il est temps que les modérés s'expriment avec passion », reprend-il. « Mais aujourd'hui, nous sommes là pour célébrer la démocratie... Merci à tous d'être venus aujourd'hui. Merci d'avoir témoigné de la solidarité avec les Etats-Unis. Le travail va continuer quelque soit le résultat ». La queue s'allonge devant le vestiaire de la résidence. Sur les tables, restent les corbeilles de croissants.

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Commentaires 2
à écrit le 09/11/2016 à 21:20
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Le pauvre Trump va s'échouer lamentablement pour la simple raison il n'a pas fait l'ENA Et non na!

à écrit le 09/11/2016 à 18:32
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A part les médias et les sondeurs c'est tout sauf une surprise.... Le peuple à parlé , bien ou mal ?

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