Les risques du nouveau Crédit d'impôt innovation

L'extension du Crédit Impôt Recherche à l'innovation était attendue par le monde de l'entreprise. Pourtant, en l'état, le texte est loin d'être toujours avantageux ... Par Franck Debauge, directeur associé d'ACIES Consulting Group.
Pour Franck Debauge, l'afflux massif de nouveaux déclarants au crédit impôt recherche pourrait conduire à un dérapage budgétaire de plusieurs centaines de millions d'euros. | REUTERS

L'extension du dispositif du Crédit d'Impôt Recherche (CIR) aux dépenses d'innovation était une mesure attendue de longue date par les PME. Avec le nouveau Crédit d'Impôt Innovation (CII), elles pourront désormais récupérer - sous la forme d'un crédit d'impôt - une partie de certaines dépenses liées à l'innovation.

L'administration fiscale vient de publier l'instruction fiscale qui précise la nature des activités qui seront financées par ce nouveau dispositif. La mise en œuvre des définitions sera déterminante pour le succès du CII. Mais à l'heure actuelle, trois risques majeurs pèsent sur l'efficacité du dispositif.

R&D ou innovation ?

D'une part, à l'occasion de contrôles fiscaux, des vérificateurs pourraient être tentés de requalifier certaines dépenses de R&D éligibles au CIR en dépenses d'innovation éligibles au CII. Or le taux du CII est inférieur à celui du CIR (20% pour le CII contre 30% pour le CIR) et l'assiette du CII est plafonnée à 80 000 euros. Une telle situation entraînerait la diminution du CIR de nombreuses PME et impacterait aussi les ETI et les grandes entreprises, lesquelles, n'ayant pas accès au CII - réservé aux PME -, verraient la base de calcul de leur CIR sensiblement rabotée.

Ce risque est renforcé par les commentaires qui viennent d'être mis en ligne par l'administration dans la base documentaire BOFiP-Impôts. Il est précisé que des phases de R&D et d'innovation peuvent se succéder au sein d'un même projet, ce qui est contraire à la logique des définitions de la Recherche et de l'Innovation. Comment peut-il exister plusieurs phases successives de conception d'un même prototype ? Ceci laisse augurer bien des difficultés pour tracer la frontière entre les activités éligibles au CIR et celles éligibles au CII.

Un risque de dérapage budgétaire

On peut également redouter un dérapage budgétaire de plusieurs centaines de millions d'euros en raison d'un afflux massif de nouveaux déclarants. En effet, les prévisions budgétaires sous-évaluent notablement le coût probable du dispositif (pour l'instant estimé à 250 millions d'euros), puisque plus de 30 000 PME et TPE pourraient y être éligibles.

Une dispersion de l'aide

Enfin, il existe un risque non négligeable de dispersion de l'aide octroyée, qui financerait alors des innovations à faible valeur ajoutée.

L'avenir dira si le CII cible bien les entreprises les plus innovantes pour une efficacité maximale à coût maîtrisé. La définition du marché de référence qui figure dans l'instruction est floue, et l'on peut craindre qu'elle ne permette pas d'encadrer le coût de la mesure, de sécuriser le budget d'ensemble du CIR et d'optimiser l'efficacité du CII.

À cet égard, on peut déplorer que le texte de l'instruction n'ait pas été mis en consultation publique, comme c'est souvent le cas pour des instructions sur des sujets où les remontées du terrain sont souvent riches d'enseignement, et contribuent utilement à la rédaction de la doctrine administrative. Les entreprises auraient certainement pu apporter leur expérience de la R&D et de l'innovation, pour aboutir à un dispositif plus efficace.

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Commentaire 1
à écrit le 23/10/2013 à 23:20
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Toujours plus d'impôts et de taxes A force de pomper ... le puits se vide

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