Digitaliser pour décarboner : le cas de "l'autoroute 4.0"

OPINION. Les crises globales de notre temps, comme celles du Covid ou du changement climatique, mettent en lumière le rôle central qu'occupent les infrastructures dans les stratégies de résilience, de gestion de crise et du long terme. (*) Par Victor Storchan, Ancien élève de l'Université de Stanford et de l'ENS de Lyon, Victor Storchan est ingénieur spécialisé en intelligence artificielle.
(Crédits : Regis Duvignau)

La synergie avec les technologies de ruptures issues de la 4e Révolution industrielle engage ces infrastructures dans l'ère digitale : intelligence artificielle (IA), Internet of Things (IoT), Building Information Model (BIM). A l'origine, cette révolution technologique est destinée à mieux produire, ou plus précisément produire « intelligemment ». Une nouvelle génération d'usines connectées et robotisées fluidifie aujourd'hui les chaînes de production pour répondre à la demande de personnalisation des services, de réduction des coûts et de sécurisation des outils de production.

Cette mutation innerve désormais l'ensemble des secteurs d'activité et doit être mobilisée pour relever les grands défis du XXIe siècle, en particulier la lutte contre le réchauffement climatique. Alors que les feuilles de route des États s'engageant à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050 impliquent des actions puissantes dès notre décennie, le passage à l'échelle des technologies 4.0 constitue un puissant levier de décarbonation à activer d'urgence. Le secteur des transports, qui représente 24% des émissions mondiales de CO2 issues de la combustion de carburant, est à cet égard emblématique.

Dans ce contexte, la décarbonation des autoroutes constitue un enjeu spécifique, qui déterminera la capacité à assurer une mobilité propre sur longue distance et à faire émerger des chaînes logistiques vertes : le transport routier longue distance, sur autoroute, pèse aujourd'hui 25% des émissions des transports en France. Cette décarbonation autoroutière passe par différentes évolutions - électrification, efficacité énergétique, report modal, maîtrise de la demande, etc. - auxquelles les technologies 4.0 peuvent contribuer, en favorisant l'adaptation de l'infrastructure et de ses usages.

Optimiser les usages

Concernant l'infrastructure autoroutière, les technologies 4.0 représentent des leviers puissants de décarbonation et de résilience. Couplées aux technologies d'IA, les méthodes de régulation dynamique du trafic permettent par exemple de fluidifier et de sécuriser la circulation (péage en « flux libres », détection automatique des accidents, régulation du trafic en fonction des niveaux de pollution, etc.). Grâce à des capteurs intégrés qui mesurent l'état d'usure de la chaussée, l'IoT anticipe les besoins d'entretien de l'infrastructure et augmente la performance énergétique. L'ensemble de ces technologies facilite aussi l'évaluation globale de la résilience des infrastructures, difficile à calculer par les modèles de simulation classiques en raison de topologies de réseau souvent complexes. Le deep learning (« apprentissage en profondeur ») accélère substantiellement cette étape en automatisant l'évaluation des risques pesant sur les grands systèmes d'infrastructures.

Ces technologies ont également vocation à optimiser les usages. Le machine learning (ML), qui consiste à s'appuyer sur une génération de modèles qui découvrent des corrélations dans des grands jeux de données utiles pour effectuer des tâches de plus en plus complexes, est susceptible d'améliorer les performances énergétiques de la mobilité sur autoroute en optimisant les itinéraires via des algorithmes d'éco-routage pour minimiser les émissions de polluants ou en accélérant le développement de véhicules bas carbone (design, aérodynamisme des véhicules). Le ML a aussi le potentiel pour améliorer la gestion des infrastructures de recharge des véhicules électriques en anticipant les besoins des automobilistes et en élaborant une programmation fiable des recharges à venir.

Pour toutes ces applications, ces technologies reposent sur des données massives, à la fois denses dans l'espace et le temps. Une autoroute 4.0 durable ne peut dès lors faire l'économie des questions de respect de la vie privée des usagers, dès la phase de transformation de l'infrastructure.

L'enjeu est essentiel pour la lutte contre le changement climatique, et vaut pour la plupart des infrastructures caractérisées par des cycles longs : se saisir sans tarder de l'innovation à la frontière technologique et soumettre à la recherche les urgences de notre temps.

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Commentaires 2
à écrit le 17/07/2021 à 0:42
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"Une autoroute 4.0 durable ne peut dès lors faire l'économie des questions de respect de la vie privée des usagers": l'Auteur veut sans doute dire: "Une autoroute 4.0 durable ne peut ÉVITER DE FAIRE UN SORT aux questions de respect de la vie privée d...

à écrit le 16/07/2021 à 8:01
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Du charabia.

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