L'autre « Secret de la Licorne » : innover, démocratiser, sidérer

IDÉE. Les Licornes sont aux startups ce que les commandos sont à l'armée. Pour l'emporter et s'imposer sur un marché, une licorne doit entreprendre une guerre-éclair qui laissera comme sidérés les acteurs traditionnels qui ne l'avaient pas vu venir ou les Cassandre qui avaient dénigré sa technologie. Par André-Jacques Auberton-Hervé, fondateur et Chairman Emeritus de Soitec.
(Crédits : Reuters)

« Tout le monde pensait que c'était impossible jusqu'à ce que quelqu'un qui ne le savait pas, ne le fasse ». Ce propos de Winston Churchill résume bien ce qui doit guider les futurs créateurs de Licornes. Les prétendants doivent réussir à combiner plusieurs facteurs : l'agilité, la rapidité d'exécution, l'innovation de rupture et sa démocratisation.

Le gagnant remporte la mise

C'est d'abord cette innovation de rupture qui va créer les conditions de la rupture stratégique propice à la victoire. Les anglo-saxons parlent de « Winner takes it all » (le gagnant remporte la mise). Elle peut surgir de secteurs très différents mais la révolution digitale appliquée aux métiers traditionnels (industrie, santé, électronique, matériaux...) offre des sources d'innovation quasi-infinies. Loin d'opposer Hardware et Software, c'est au contraire de la combinaison d'innovations de rupture dans ces deux domaines que sortiront de terre les licornes de demain.

C'est là toute la force du smartphone créé par Apple : des services potentiellement illimités portés par un hardware ultra-performant. Qui aurait pu imaginer il y a 20 ans faire tenir dans sa poche un ordinateur occupant la place d'un bâtiment entier réfrigéré et que seuls les programmes militaires étaient en mesure de s'offrir ?

Ces innovations de ruptures sont déjà là, en germe dans nos laboratoires. Elles n'attendent qu'à être exploitées. Le CEA a par exemple été classé par Reuters comme l'un des meilleurs centres de recherche dans le monde. Proche de l'industrie, il devient un outil formidable pour soutenir la création de startups dans la Deeptech et les plateformes digitales. Idem à Grenoble et à Saclay ou au travers de partenariats internationaux, les compétences sont disponibles.

Démocratiser

Deuxième condition : rendre accessible à tous l'innovation, en d'autres termes la démocratiser. Elle doit aussi avoir pour but de simplifier la vie du plus grand nombre. Plus elle sera accessible, plus elle sera utilisée, plus elle s'imposera comme une habitude ou un réflexe et deviendra incontournable, créant ainsi une révolution de l'usage. Parce qu'il est à la fois consommateur et acteur de l'usage, le « consom'acteur » reprend le pouvoir.

Et plus un secteur se montrera résistant au changement, plus il sera un terreau fertile pour l'émergence de nouvelles licornes.

Les nouveaux matériaux, la nanoélectronique, la photonique, les technologies de stockage, les objets connectés, les réseaux neuronaux, l'AI, la robotique, l'impression 3D, les véhicules autonomes, la santé connectée et prédictive etc. sont autant d'opportunités permettant de générer un nouveau cycle de croissance et de nouveaux usages pour les nouveaux « consom'acteurs ». Ce sont eux, plus que les Etats, qui vont devenir les arbitres de la guerre économique que se livrent les Licornes mondiales.

L'envie d'entreprendre

Troisième condition : l'envie d'entreprendre. La culture entrepreneuriale ne cesse de progresser. Aujourd'hui parmi les 18-30 ans, plus d'un jeune sur deux souhaite créer son entreprise.

L'exemplarité des pionniers ainsi que les dispositifs mis en place par la BPI ont suscité les vocations parmi une nouvelle génération de chercheur-entrepreneurs. Le CEA et les différents Instituts ont mis en place des mesures incitatives pour faire pousser des startups à partir de leurs laboratoires. Centres de recherche, universités, startups et entreprises technologiques de taille mondiale : la France a la chance de disposer de plusieurs de ces écosystèmes qui ont fait la réussite du modèle californien de la Silicon Valley.

Dernière condition : créer les têtes chercheuses des futures innovations de rupture. Le processus de repérage passe par la détection des innovations et des dépôts de brevets immédiats. Les porteurs de projets dans les laboratoires de recherche doivent être appuyés par des équipes issues de l'entreprise, voire d'autres startups, car c'est ce qui conditionne l'agilité et la capacité à s'adapter au marché.

Le rôle des pouvoirs publics

Et les pouvoirs publics dans tout ça ? Une fiscalité adaptée permettant de rémunérer le risque pour les porteurs de projets et d'attirer des talents est capitale. Fournir des marchés-test avant d'adresser le marché grandeur nature est également déterminant. A ce titre, un Small Business Act plus contraignant que celui de l'Europe, couplé par exemple à l'accès aux marchés militaires pour tester ces innovations, permettra l'éclosion des Licornes. Mobiliser les financements nécessaires grâce à un NASDAQ européen permettra enfin d'atteindre les valorisations et liquidités souhaitées.

Mais pour que les consommateurs européens soient les premiers à profiter des innovations de leurs Licornes, il faut faire émerger un marché de l'innovation qui permette de s'adresser directement aux 500 millions de consommateurs européens. C'est une autre condition sine qua non de la sidération...

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Commentaires 2
à écrit le 15/09/2019 à 0:19
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Marrant ce terme pour les entreprises.

à écrit le 12/06/2019 à 20:20
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Il y a eu ces derniers temps beaucoup de Licornes qui sont revenues «  bredouilles » de leur «  ubérisation »👍😂 Vous voyez je ne suis pas «  sidéré »...mdr...

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