« Les transformations ne sont possibles que si la population les comprend » (par Agnès Audier de l’Impact Tank et Jean-Marc Borello du Groupe SOS)

Agnès Audier, présidente de l’Impact Tank et Jean-Marc Borello, président du directoire du Groupe SOS, militent en faveur d’une évaluation systématique des effets sociaux et sociétaux de toutes les décisions prises par les organisations publiques ou privées.
Agnès Audier, Présidente de l’Impact Tank et Jean-Marc Borello, Président du directoire du Groupe SOS.
Agnès Audier, Présidente de l’Impact Tank et Jean-Marc Borello, Président du directoire du Groupe SOS. (Crédits : Reuters)

La décennie que nous vivons sera sans doute considérée comme celle des grandes accélérations: accélération des enjeux de décarbonation et prise de conscience de la nécessaire préservation de la biodiversité, transformation numérique avec l'arrivée de l'intelligence artificielle, nouveaux défis géopolitiques exigeant une approche repensée des enjeux de défense et de souveraineté, etc. Mais les transformations ne sont possibles que si la population les comprend, si le tissu social tient, et si le vivre-ensemble évolue avec elles. Or, cela ne va pas de soi. Les Gilets jaunes et d'autres mouvements de contestation sociale l'ont rappelé: notre démocratie se fragilise. L'attention accordée à la maîtrise des comptes publics exigera davantage d'efficience pour obtenir le maximum de résultats avec le minimum de moyens.

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Notre conviction est la suivante. Pour être efficaces, rapides, innovants, cohérents, coordonnés, il faut mesurer ce qu'on fait, transposer à grande échelle ce qui donne des résultats, et évaluer l'impact de nos actions, que l'on soit un acteur public, une entreprise ou une association. Pas si simple, quand la tonne d'actions efficientes pour les populations ou pour les territoires fragiles ne se norme pas comme la tonne de CO2, quand la mesure des actions sociales est difficile à réaliser en raison d'une multitude de facteurs humains.

Pourquoi insister sur la nécessaire mesure de l'impact social? Pour rappeler haut et fort qu'ignorer toutes les formes d'exclusion n'est pas une option. Sans accompagnement, notre vivre-ensemble risque de se briser sur le coût inévitable des transitions, sur les peurs de déclassement et les angoisses de l'avenir. Les nouveaux défis, considérables, s'ajoutent à d'autres qui n'ont pas été résolus : logement, intégration, inclusion dans l'emploi, réussite scolaire, égalité de genre, accès à la santé, bien-vieillir...

Nous voulons aussi célébrer ce qui est déjà fait. Les acteurs de l'économie sociale et solidaire (ESS) constituent un réservoir d'entrepreneurs au service de l'intérêt général, un vivier d'innovations et de solutions pour les plus fragiles. Les entreprises ont des actions nombreuses pour leurs salariés, leurs clients et les territoires. Les chercheurs sont de plus en plus nombreux à s'intéresser au social, et leur rôle est clé pour l'analyser de façon neutre et indépendante. D'ailleurs, la mesure de l'impact progresse, avec la construction de référentiels partagés, à la disposition de tous les porteurs de projets, publics et privés.

Notre vivre-ensemble risque de se briser sur les peurs de déclassement et les angoisses de l'avenir

Il faut aussi anticiper ce que peuvent apporter les données afin d'avoir une lecture plus précise du monde, notamment grâce à la dynamique Tech for Good. L'intelligence artificielle peut nous aider à maximiser notre impact, par exemple en prévoyant les difficultés et en personnalisant les modes de prise en charge.

Il faut mieux coopérer dans une société de plus en plus fracturée. Trouver des solutions efficaces à grande échelle nécessite un métissage des savoir-faire, une compréhension approfondie des publics et l'addition des moyens publics et privés. Une meilleure coopération des financeurs nous permettra d'optimiser la dépense publique. Construire des coalitions, thématique par thématique, entre entreprises et acteurs de l'ESS, afin de faire évoluer les cadres réglementaires ou financiers dans un dialogue renouvelé avec les pouvoirs publics, voilà l'ADN de l'Impact Tank.

Nous insistons, enfin, pour démontrer que nos valeurs d'humanité, de solidarité et de courage face aux injustices et aux exclusions ont un effet positif, réel et mesurable, sur la vie quotidienne de toutes et tous. Objectiver cette conviction est plus que jamais nécessaire pour lutter contre le repli sur soi. Si les efforts pour les transitions écologique et numérique ne peuvent être ralentis, il est urgent de mieux prendre en compte la dimension sociale et sociétale des transformations futures, condition nécessaire à la prospérité économique, au succès face aux enjeux environnementaux et à la solidité de nos démocraties. Il y a des solutions. Mesurons, accélérons, coopérons. Ensemble.

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Commentaires 2
à écrit le 14/04/2024 à 13:15
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Je dirais mieux, on ne peut imposer des transformations non désirées même si elles sont comprises ! C'est de là, que l'on comprend que la recherche permanente d'un consensus n'est pas une voie à suivre ! ;-)

le 15/04/2024 à 14:59
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Absolument, le pouvoir en place est soutenu par un électorat bien conscient de profiter indument du système depuis des décennies et n'ayant aucune envie que ça change alors que les générations montantes votent RN ou LFI dans l'espoir de renverser la ...

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