Marché de l’énergie : tirer parti de la volatilité des prix

OPINION - Avec le développement des énergies renouvelables, les prix sur le marché seront de plus en plus volatils en raison de phénomènes d’intermittence de la production. Il faut donc savoir se positionner pour profiter de cette nouvelle configuration ; en particulier pour les industriels chez qui le coût de l’énergie est un facteur de compétitivité.
François-Régis Déhéry, Responsable technique de natGAS France
François-Régis Déhéry, Responsable technique de natGAS France (Crédits : DR)

Au cours du week-end de Pâques 2019, la bourse de l'énergie allemande a connu des prix négatifs. C'est la combinaison de l'ensoleillement, d'un fort épisode venteux et d'une faible consommation d'électricité, en ce jour férié, qui a conduit à une surproduction d'énergies renouvelables. Certains consommateurs auraient donc pu gagner de l'argent en consommant l'énergie du réseau.

En économie, dans une configuration libérale du marché, le prix est là pour inciter les acteurs à réagir. En immobilier, par exemple, un prix trop bas indique qu'il y a trop de biens sur le marché, et représente un signal d'achat. Dans le monde de l'énergie, tout l'art consiste cependant à savoir réagir dans les deux sens : si les prix sont bas, il faut en profiter ; s'ils sont élevés, il faut être capable de décaler sa consommation, voire d'y renoncer. De la même manière, sur le marché de l'énergie, des prix négatifs ne sont donc que le reflet d'une situation, et doivent inciter les acteurs à réagir : les producteurs à interrompre leur production et les consommateurs à augmenter leur consommation.

Les installations flexibles gagnent au prix de l'inflexibilité des autres

Dans un mix énergétique à forte intermittence — où il y a donc une large part d'énergies renouvelables — le fait d'être flexible, en tant que consommateur ou producteur, permet de maximiser la valeur d'une installation en tirant profit de phénomènes courts, provoqués par cette intermittence de la production — qui elle-même dépend des conditions météorologiques. Les installations qui souffrent d'une forte inertie continuent de consommer ou de produire quelles que soient les conditions et ne peuvent donc pas s'adapter à ces phénomènes de marchés. Celles qui sont au contraire capables de reporter ou d'adapter leur puissance à la hausse ou à la baisse des prix peuvent optimiser leur consommation et réaliser des économies substantielles.

Critique de l'intermittence par les acteurs traditionnels

L'Allemagne, qui a investi depuis des années dans les énergies renouvelables, a pris l'habitude des prix volatils, en fonction des conditions météorologiques, et les producteurs d'énergie ont donc accueilli l'épisode de Pâques avec flegme. Il n'en va pourtant pas de même en France, où des voix se sont élevées à cette occasion pour critiquer le modèle d'intermittence de la production.

Ces critiques émanent en particulier des détenteurs des infrastructures les moins flexibles, et qui produisent de l'énergie à des coûts marginaux plus élevés que les renouvelables — en un mot : le nucléaire, le charbon, le pétrole ou encore le gaz naturel. Ces acteurs sont donc les moins à même de bénéficier d'un modèle flexible car, de par la lourdeur de leurs infrastructures, ils ne sont pas capables de réagir rapidement en interrompant leur production lors d'épisodes brefs de surproduction. Lorsque les prix deviennent négatifs, ils continuent donc de produire à perte.

Flexibiliser son infrastructure pour optimiser le coût de l'énergie

En dépit des réserves, la marche vers plus de flexibilité dans l'énergie est inéluctable. Avec l'essor des sources d'énergies renouvelables, le marché sera de plus en plus soumis à l'intermittence de la production. La sagesse veut donc de s'y préparer ; ce qui signifie faire dès à présent le choix des énergies renouvelables, pour les producteurs, et se doter d'infrastructures plus flexibles, pour les consommateurs.

D'un point de vue consommateur, plus de flexibilité veut dire un meilleur rendement : en adaptant leur comportement à la production ou en investissant dans des solutions de stockage, dont la rentabilité s'améliore d'année en année, ceux-ci consomment quand les renouvelables produisent, tout en augmentant le rendement de leurs installations en achetant l'énergie plus bas que les autres.  Pour les installations et usines énergivores (en particulier dans l'aciérie ou la papeterie), chaque opportunité d'optimiser les coûts de l'énergie est bienvenue. Pour ces industriels, il est donc essentiel de flexibiliser leurs installations, afin de les rendre réactives à des conditions de marchés favorables. Plus encore, en exploitant l'intermittence de la production des renouvelables, les consommateurs participent directement à l'intégration de ces sources d'énergie, car ils adaptent dès à présent leur comportement à leur fonctionnement.

Prendre modèle sur l'Allemagne

Si, pour l'heure, l'énergie est plus chère en Allemagne, c'est parce que le prix comprend les subventions au développement des filières renouvelables. Mais en réalité le coût de l'électron y est déjà moins cher. Une fois que les subventions ne seront plus nécessaires  et que les énergies vertes auront pris leur place, les prix seront à la fois plus bas et volatils. Il faut donc flexibiliser dès à présent les installations françaises et adapter les comportements de production et de consommation dans la perspective d'accueillir ce modèle.

natGAS France, agrégateur et fournisseur d'énergie, filiale du groupe natGAS AG, créé à Potsdam et présent sur les marchés libéralisés européens depuis 2000. Reconnu sur le marché́ allemand depuis 2014, le groupe gère aujourd'hui un portefeuille de 700 MW d'énergie éolienne et accompagne les acteurs français, qu'ils soient opérateurs ou investisseurs, dans le développement de processus performants et adaptés aux exigences opérationnelles et régulatoires du monde de l'énergie de demain. PME innovante et indépendante, natGAS propose des solutions énergétiques sur mesure et des services personnalisés en fonction des besoins de leurs clients.

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Commentaires 6
à écrit le 08/07/2019 à 10:35
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On peut aussi regarder la situation a terme de ce modèle: Beaucoup d'intermédiaires pour adapter la consommation a la production, des moyens de compensation supplémentaires sur le réseau comme le stockage (aujdhui les STEP sont au max et les autres ...

à écrit le 08/07/2019 à 7:47
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Deux remarques de poids : En Allemagne, ce système a été mis en place au prix d'une production hyper carbonée pour palier à l'intermittence. Seconde remarque : vous ne connaissez visiblement pas le fonctionnement des réseaux électriques puisque san...

à écrit le 08/07/2019 à 7:44
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Deux remarques de poids : En Allemagne, ce système a été mis en place au prix d'une production hyper carbonée pour palier à l'intermittence. Seconde remarque : vous le connaissez le fonctionnement des réseaux électriques puisque sans systèmes de pr...

à écrit le 06/07/2019 à 11:08
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CQFD: le modèle à suivre c'est l'Allemagne, pays où l'énergie se paye 40% plus chère qu'en France et ou les émissions de CO2 ont explosé du fait du retrait du nucléaire et du retour en grâce du lignite et du charbon! Et bien personnellement, je préfè...

à écrit le 06/07/2019 à 9:31
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La volatilité = instabilité , flou, variable Profiter de ça ? Allez y alors...

à écrit le 06/07/2019 à 9:29
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Article intéressant mais partiel il me semble. Vous semblez compter la non-continuité de l’approvisionnement comme une variable à laquelle s’adapter. Mais tout notre système productif sur le flux tendu ne peut s’yadapter. vous mentionnez l’industrIe ...

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