Reconstruire la France industrielle de demain passe par une augmentation de la TVA sociale

OPINION. Pour sauver l’industrie française, il faut une augmentation de la TVA sociale. Les impôts de production seraient ainsi baissés à hauteur de la hausse de la TVA afin de relocaliser notre production face à des coûts bien inférieurs en Asie ou au Maghreb. Par Sylvain Maillard, député (LREM) de la première circonscription de Paris, dirigeant-fondateur de la société Alantys Technology (*).
Sylvain Maillard est député (LREM) de la première circonscription de Paris et dirigeant-fondateur de la société Alantys Technology (*)
Sylvain Maillard est député (LREM) de la première circonscription de Paris et dirigeant-fondateur de la société Alantys Technology (*) (Crédits : DR)

Si mon expérience de chef d'entreprise et d'élu m'ont appris quelque chose, c'est qu'un changement réel n'advient que lorsqu'on le provoque.

À l'heure où la crise du coronavirus et les conséquences qu'elle suscite nous amènent à repenser notre dépendance vis-à-vis des autres régions du globe, il nous faut avoir les moyens de nos ambitions. Il ne suffit pas d'appeler de ses vœux à un retour de certaines industries stratégiques sur le sol français pour que celui-ci advienne.

La désindustrialisation de notre continent n'est pas un phénomène spontané, mais la résultante de difficultés sans cesse croissantes pour nos industries, et sur lesquelles nous avons tardé à nous pencher. Les entreprises, françaises ou européennes, ne se sont pas exilées à l'étranger par simple goût du profit ou de l'aventure, mais bien pour y trouver les conditions nécessaires à leur développement économique, voire à leur survie. Car trouver une rentabilité ou même une compétitivité à trop longtemps rimé avec délocalisation. Au final, le client a pu sembler plus attaché jusqu'à présent au prix qu'au lieu de production.

Le critère du lieu de production, une condition essentielle de sélection

Retrouver un véritable tissu industriel national, implique donc de se pencher résolument sur les causes de ce désamour pour élaborer une politique capable de créer les conditions favorables à notre réindustrialisation.

Pour développer comme il se doit la haute valeur ajoutée de nos produits industriels, il ne faut plus que la concurrence sur le prix soit le seul vecteur d'évaluation de l'offre.

Pour cela, il faut que nous puissions nous coordonner avec nos partenaires européens pour repenser nos règles en matière de marché public. Le critère du lieu de production doit devenir une condition essentielle de sélection.

Cette remise à plat de nos règles communes doit aussi veiller à protéger davantage nos entreprises industrielles d'une éventuelle mainmise étrangère, en instaurant des mesures de sûreté dans certains secteurs stratégiques pour notre continent, comme cela se fait depuis longtemps en Chine et aux États-Unis.

 Privilégier les produits nationaux en temps normal

Il nous faut également retrouver une ambition commune pour de grands projets industriels. Notre pays est à la pointe dans de nombreux domaines. La coopération européenne peut permettre de créer de véritables réussites économiques mondiales, à l'image d'Airbus.

Mais un retour de notre industrie passe aussi, et de façon essentielle, par un effort de tous en faveur de nos entreprises. Il ne sert à rien de clamer que, en tant que citoyens, nous souhaitons conserver une production en France si, en tant que consommateurs, nous ne modifions pas nos comportements d'achats et continuons à privilégier systématiquement les produits étrangers. Il nous faut privilégier les produits nationaux, en temps normal et pas seulement en tant de crise, car c'est le meilleur moyen d'assurer la pérennité de notre industrie.

Plus fondamentalement, le regard de notre pays sur la réalité de l'industrie doit changer. En France, les usines ne sont souvent pas les bienvenues. Nous voulons les emplois mais pas le voisinage industriel. Comment être indépendants si nous refusons l'installation d'usines CEVESO près de chez nous ? C'est le paradoxe de vouloir être autonome sans en accepter les contraintes - alors même que nos industries sont sources d'emplois stables et que beaucoup a été fait pour les adapter aux normes écologiques.

 Faire payer aux importations notre protection

De même, la culture commerciale de l'entreprise en France doit évoluer et valoriser davantage la production nationale. Contrairement à l'Allemagne, où la culture d'entreprise pousse celles-ci à acheter prioritairement dans leur environnement local, les acheteurs des entreprises françaises se tournent encore systémiquement vers l'international dans le cadre du B to B, sous prétexte que cela serait plus valorisant pour leur carrière, et ce, alors même que des possibilités locales existent. Il faut donc créer une prise de conscience des acheteurs, pour que soit appliquer la maxime : d'abord la solution locale puis la solution internationale.

Enfin, redynamiser notre industrie, signifie aussi revaloriser ceux qui y travaillent. Faire carrière dans l'industrie a longtemps été dévalorisé, principalement pour les jeunes cadres car synonyme de salaires plus bas et d'installation familiale souvent loin des grandes villes, sources d'emploi pour le conjoint. Il faudra répondre à ce besoin d'attractivité même si déjà beaucoup d'efforts ont été réalisés.

Mais comment terminer une prise de conscience sans tracer une piste pour retrouver notre compétitivité ? Car oui, le départ de nos usines est dû aussi et surtout à des coûts de production bien inferieurs en Asie ou au Maghreb. Lutter sur le prix en sortie de chaîne est cause perdue, par contre mettre en concurrence à armes égales les industries du monde entier devient possible. C'est la TVA sociale pour nous en France. Que les coûts supplémentaires de production, les charges sociales santé et familles soient financées par la TVA permettra de faire payer aux importations notre protection et permettra à nos entreprises de produire à charges plus égales avec nos concurrents internationaux et d'augmenter les salaires.

Une indépendance industrielle implique des contraintes et il faut le mesurer, car notre perte de souveraineté s'explique en partie par le refus obstiné de tels impératifs. Pour reconstruire la France industrielle de demain, ce sont des actes concrets qu'il nous faut, et non de simples vœux pieux.

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Alantys Technology (*) se présente comme le leader français de la distribution indépendante de composants électroniques et l'un des cinq plus gros acteurs européens du secteur.

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Commentaires 11
à écrit le 15/05/2020 à 10:07
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La TVA dite "sociale" sera considéré par Bruxelles comme une concurrence déloyale subventionnée par l’État, c'est l'équivalent d'un changement de destination de notre actuelle TVA !

à écrit le 14/05/2020 à 11:21
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La TVA dite "sociale" sera considéré par Bruxelles comme une concurrence déloyale promue par l’État et du même acabit que si l'on changeait la destination de notre actuelle TVA !

à écrit le 14/05/2020 à 3:04
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La TVA est la taxe la plus inégalitaire qui soit car elle touche aussi bien les pauvres que les riches. Donc la TVA sociale est une fabrique n'encore plus d'inégalités. La solution est à revenir aux taux de la 4 ème république la TPS taxe de prestati...

le 21/05/2022 à 18:51
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Qui paye les charges sociales ? Pour les syndicats c'est le salarié, pour le patronat, c'est l'employeur, et l'opposant, lui oubli que ces charges sont répercutées sur le prix des seuls produits made in France et nuisent ainsi à la compétitivité...

à écrit le 13/05/2020 à 15:46
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Si il y a eu le virus c’est parce que les caisses ont été pillées ( par les riches et les élites ) c’est une révolution qu’il faut pour changer « ce système d’exploitation mondiale des humains en masse »

à écrit le 13/05/2020 à 15:41
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L'idée est bonne, il pourrait y en avoir ne autre, peut-être plus sournoise, et qui passerait mieux auprès de l'opinion publique. L'idée serait de transférer les impôts de productions 'CVAE CFE C3S et j'en passe de l'industrie vers la distribution au...

à écrit le 13/05/2020 à 14:01
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Et oui, revoilà les 1 neurone qui reviennent avec leurs soi-disant solution miracle. On appuierait sur le bouton, et par miracle, tous les problèmes seraient résolus, et sans regarder la réalité, ni réfléchir un minimum. Evidemment que non, cela n...

à écrit le 13/05/2020 à 12:54
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juste une TVA sociale sans baisse des charges salariales et des impôts des entreprises et particuliers reviendra à accélérer les importations au détriment des produits nationaux qui seront toujours plus chers que ceux venant de pays à bas coûts de pr...

à écrit le 13/05/2020 à 10:51
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Le coût de production passera aussi par des moyens de mise en œuvre robotisé et automatisé qui pourraient compenser les coûts de main-d’oeuvre mondialisé. En ajoutant de nouvelles règle européennes d’appel d’offre public intra continental et nation...

à écrit le 13/05/2020 à 9:30
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NOn il faut du protectionnisme mais dans les écoles de commerce actuel on vous dit que c'est mal, on doit certainement même vous frapper violemment avec pour que vous soyez tous paramétrés à oublier cette idée qui rapporte plus de 150 milliards de do...

à écrit le 13/05/2020 à 9:29
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il est drôle ! il ne sait pas encore que la France mettra en place la TVA sociale mais ne retirera aucune charge sociale en contre partie ! pour que la France aime les entreprise... il y a un gros effort d'éducation à entreprendre et ça ne se fe...

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