Les organismes de formation connaissent une baisse de fréquentation de la part des jeunes. La Corse n'a certes pas l'apanage d'un constat préoccupant, mais pour une économie éminemment saisonnière, le phénomène est aggravant. Pire encore, la peine est double : non seulement quelque 5.000 jeunes viennent chaque été du continent et des pays de l'Est pour combler la pénurie de personnels dans l'hôtellerie et la restauration, mais 40 % des bacheliers corses quittent l'île pour leurs études supérieures.
De surcroît, parallèlement au fait que la jeunesse insulaire boude, comme ailleurs, les métiers dits en tension - essentiellement ceux du tourisme et du bâtiment - les filières nouvelles liées à la transition écologique et à l'innovation peinent à se constituer dans le territoire le plus administré de France, qui compte 81 fonctionnaires pour 1.000 habitants, soit 7 de plus que la moyenne nationale. Et les emplois verts ont un fossé abyssal à combler...
« Plus forts et plus efficaces »
Les deux chambres consulaires de l'île, la CCI de Corse et la Chambre régionale de Métiers et de l'Artisanat (CMA), hissées aux premières loges de la scène économique de la Corse, ont décidé de prendre une initiative forte et inédite, celle de constituer une association loi 1901, Amparà Méditerranée (« Amparà » signifie apprendre en langue corse, NDLR) destinée à révolutionner l'offre de formation pour renforcer l'attractivité auprès des jeunes et ainsi renverser la vapeur.
L'assemblée générale constitutive de cette nouvelle structure a récemment eu lieu à l'hôtel consulaire de Bastia. « La réforme de 2018, blâmée par la Cour des Comptes pour ses dérives financières, a rendu le marché de la formation très concurrentiel », explique Jean Dominici, président de la CCI de Corse, qui stigmatise de surcroît la présence d'une multitude de prestataires privés, davantage motivés par le souci de rentabilité que celui de l'intérêt général. « Or, nos missions consulaires consistent à accompagner nos jeunes et nos entreprises dans les défis qui se présentent à eux, qu'ils soient technologiques, environnementaux, sociétaux. L'association que nous créons nous rendra plus forts et plus efficaces. »
Amparà Méditerranée a pour ambition d'augmenter le périmètre et la qualité de la formation par la création de filières métiers, du CAP à Bac + 5, et de les orienter résolument vers l'innovation, les énergies renouvelables, la rénovation énergétique des bâtiments, la mobilité propre, la production d'hydrogène... De même, les deux institutions consulaires sont associées dans l'ouverture, à la rentrée 2025, de l'École de Tourisme et de l'Hospitalité à Ajaccio, sous l'égide de la Collectivité de Corse et le parrainage de la Principauté de Monaco.
Réactifs aux besoins des entreprises
« Les perspectives qui s'offrent aux jeunes devraient nous permettre de ralentir sensiblement le départ de nos forces vives », se réjouit à son tour Jean-Charles Martinelli, président de la CMA, désigné à l'unanimité à la présidence d'Amparà Méditerranée. Pour y parvenir, de nombreux obstacles sont à franchir. Aujourd'hui en Corse, l'offre de formation est complexe et illisible. L'élaboration d'une marque commune et d'un catalogue commun la rendra plus compréhensible et plus accessible.
Trois objectifs prioritaires sont à atteindre rapidement, notamment mutualiser les ressources humaines, les moyens et les sites, concevoir une nouvelle ingénierie pédagogique et se montrer plus réactifs aux attentes du terrain, et ainsi mieux guider la Collectivité de Corse dans l'évolution de son programme régional de formation (PRF). Il s'agira encore de s'accommoder d'un déficit de stabilité législative dans ce domaine et d'être offensifs face à la concurrence féroce, qu'elle soit physique ou en ligne.
Une campagne d'information va se déployer pour assurer la promotion et la notoriété d'Amparà Méditerranée qui a aussi vocation à rayonner à l'international via des conventions avec des partenaires étrangers.
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