Grande évasion à Saint-Valery-sur-Somme

Au cœur d’une baie unique, ce petit bourg offre un point de vue exceptionnel sur un territoire d’une rare biodiversité.
Saint-Valery, le long du chenal
Saint-Valery, le long du chenal (Crédits : © LTD / Stéphane BOUILLAND)

Le paysage qui s'offre à nous, quand on entre dans le centre-ville de Saint-Valery-sur Somme, jolie bourgade de 2 500 habitants dans les Hauts-de-France, est quelque peu déroutant. Au loin, derrière les mâts du petit port de plaisance, le ciel ne rejoint pas la mer, située à 12 kilomètres de là, mais le sable. L'eau ne remonte le chenal de la Somme et ne remplit la baie qu'aux grandes marées. La nature changeante de ce paysage et sa lumière indescriptible avaient d'ailleurs séduit nombre d'impressionnistes comme Eugène Boudin, Edgar Degas ou le peintre local Louis Braquaval. Difficile de s'imaginer qu'il y a deux cents ans le port de Saint-Valery dépassait Dieppe ou Calais en matière de trafic de marchandises. « Quelque 300 bateaux de gros tonnage remontaient la Somme chaque année, raconte Hervé Bernard, historien local et guide de l'office du tourisme. Le port de commerce accueillait des navires de Norvège chargés de bois ou encore d'Angleterre remplis de draps de laine. » Mais c'est sur l'importation du sel de Guérande ou de La Rochelle que la ville construit sa fortune, obtenue grâce à la gabelle, l'impôt sur le sel. Le précieux chlorure de sodium utilisé pour conserver les aliments et fabriquer le pain quotidien était entreposé dans un grand bâtiment aux murs très épais, bâti près du port en 1736, reconverti aujourd'hui en complexe culturel. Les armateurs exposent leur richesse en construisant de belles maisons de maître toutes en étages qui se dressent  encore au bord de la digue de promenade, arborée de tilleuls.

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Au loin, dans la baie, des grappes de randonneurs, chaussés de bottes, rejoignent la ville rivale d'en face, Le Crotoy. Certains s'arrêtent pour observer les aigrettes, les courlis cendrés ou les chevaliers aboyeurs. D'autres se baissent dans les mollières pour chercher la salicorne qui commence à lever  et se cueille en juin. Façonnée par l'homme, cette baie a été patiemment modelée - et sauvegardée - au cours des siècles. L'hiver, les marins pêcheurs ne sortaient pas leurs sauterelliers pour attraper les crevettes mais creusaient des mares pour y installer des huttes. Ils s'y rendaient la nuit afin de chasser le canard sauvage, la sarcelle d'hiver ou encore les limicoles avec des appelants, des oiseaux d'eau chanteurs, nés et élevés en captivité pour attirer leurs congénères sauvages. Les gibiers d'eau étaient ensuite cuisinés en ragoût avec des pommes de terre et des navets.

Grande évasion à Saint-Valery-sur-Somme

 Saint Valery (Crédits: © LTD / Stéphane BOUILLAND)

"La baie n'est pas assaillie par la bétonnisation et l'environnement est préservé" (Hervé Bernard, historien)

« La population locale a toujours entretenu ces mares et s'est élevée contre la promotion immobilière, ce qui fait que la baie n'est pas assaillie par la bétonnisation et que l'environnement est préservé », souligne l'historien Hervé Bernard. Les faibles recettes des marins pêcheurs l'hiver ont même donné un nom à leur quartier, Courtgain, qui signifie « petit salaire ». En hauteur de la rue commerçante, de petites maisons, très basses, serrées les unes aux autres, se succèdent. Leurs devantures, ornées de fleurs et de décorations marines, arborent des couleurs vives allant du bleu à l'ocre en passant par le rouge. Les pêcheurs ont longtemps terminé sur leurs habitations les pots de peinture utilisés pour repeindre leurs bateaux. Depuis, les riverains veillent à préserver cette tradition. De là, un sentier monte vers le très beau calvaire des marins, où les femmes se rendaient pour observer le retour de leurs maris.

On y aperçoit la cité médiévale, à 1,2 kilomètre du centre-ville, entourée de remparts qui protégeaient des Vikings et autres pillards. À l'entrée, les deux tours Guillaume, rondes et massives. On parle bien ici de Guillaume le Conquérant, qui a effectué un séjour forcé de trois semaines à Saint-Valery en attendant la fin de la tempête qui l'empêchait de s'élancer à la conquête de l'Angleterre, en 1066. On dit que le vent tourna en sa faveur après l'organisation d'une procession religieuse à l'abbaye qui détient les reliques du fondateur de la ville, saint Valery (prononcé « valry »), habitué aux « miracles ». « Un conférencier nous a raconté un jour que le duc de Normandie avait offert des terres anglaises à l'abbaye de Saint-Valery, en remerciement de cette intervention divine », conclut Hervé Bernard. Terres que les moines auraient revendues... juste avant que ne débute la guerre de Cent Ans.

St Valery

Saint Valery (© LTD / Stéphane BOUILLAND)

Carnet d'adresses


L'herbarium des remparts

Niché au creux de la ville médiévale, ce jardin botanique a longtemps été tenu par les religieuses de l'hôpital. Une association a repris le flambeau et continue de cultiver des plantes médicinales, condimentaires et tinctoriales. Prévoir une heure de visite.

Adultes : 10 euros ; enfant, étudiant,
handicapé : gratuit.
36, rue Brandt. Tél. : 03 22 26 69 37.
herbarium-des-remparts.fr

Tuk Tour Valericain

Embarquez à bord d'un tuk-tuk électrique pour découvrir Saint-Valery à travers ses différents quartiers, sa faune et sa flore.
Adultes : 12 euros ; enfants (moins de 14 ans) : 6 euros.
Place Guillaume-le-Conquérant.
Tél. : 06 61 85 28 64.

Le Mathurin

Tartare de maquereau, makis de bar sauvage avocat-mangue, médaillons de lotte... Sur la place qui accueille le grand marché le dimanche, ce restaurant de produits frais et de qualité ne travaille que le poisson. Réservation conseillée.
1, place des Pilotes. Tél. : 03 22 30 08 50.
restaurantlemathurin.fr

Chambre avec vue

Dans un ancien manoir à pans de bois, le relais Guillaume de Normandy, situé
en plein centre-ville, donne sur la jolie digue de promenade. À partir de 116,90 euros la nuit pour une chambre double avec vue sur la baie.
46, quai du Romerel. Tél. : 03 22 60 82 36.

Balade en bateau

Les promenades commentées à bord de l'un des Commandant Charcot
offrent une découverte reposante de la baie. Avec un peu de chance, il sera aussi possible d'apercevoir l'un des 700 phoques gris et veaux marins qui y ont élu domicile.
bateau-baie-somme.com

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