Plan Castex pour le Val-d'Oise : des milliers d'emplois, vraiment ?

Dix-huit mois après l'abandon d'Europacity, c’en est fini des rapports de préfets: le Premier ministre Jean Castex vient de dévoiler dix-sept mesures pour soutenir la croissance économique dans le Val-d'Oise. Impatients, les décideurs économiques et politiques pressent l'Etat d'agir.
César Armand
Le locataire de Matignon a souhaité que le préfet du département Amaury de Saint-Quentin « mette en place un pilotage resserré du déploiement avec un comité de suivi régulier et en lien constant avec [son] cabinet ».
Le locataire de Matignon a souhaité que le préfet du département Amaury de Saint-Quentin « mette en place un pilotage resserré du déploiement avec un comité de suivi régulier et en lien constant avec [son] cabinet ». (Crédits : Reuters)

C'est un département qui attendait un nouveau projet structurant vingt ans après l'université de Cergy et soixante ans après l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. Un territoire qui a travaillé avec des acteurs privés sur le projet Europacity pendant près de dix ans avant que ce dernier ne soit abandonné en rase campagne par le président Macron au nom de l'écologie. Une collectivité où 29% de la population a moins de 20 ans. Une banlieue de grande couronne où le chômage des jeunes atteint les 31% contre 20% en moyenne au niveau régional et où, selon Matignon, 17% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Un Val-d'Oise « en forte croissance démographique mais dont le tissu économique et social reste fragile » dixit Matignon.

Lire aussi : Un an après l'abandon d'Europacity, trois projets encore flous pour le Val-d'Oise

Après deux rapports de deux haut-fonctionnaires, le Premier ministre est (enfin) sorti du bois le 7 mai dernier. Jean Castex est venu faire dix-sept annonces, à commencer par la confirmation de la ligne 17 du Grand Paris Express et de l'implantation d'une gare sur le triangle de Gonesse. Le super-métro s'interconnectera d'ailleurs avec la ligne H du Transilien à Saint-Denis-Pleyel, futur carrefour des lignes 14, 15 et 16. La gare de Survilliers-Fosse, déjà desservie par le RER D, sera de la même manière aménagée dans le cadre du projet Roissy-Picardie. Cette liaison express vise à relier le Val-d'Oise et le sud de l'Oise avec l'aéroport Charles-de-Gaulle.

Un labo pharmaceutique sur le triangle de Gonesse ?

« Le modèle économique fondé sur le tourisme d'affaire est à l'arrêt. Pourquoi n'installerait-on pas un fabricant de panneaux solaires ou un laboratoire pharmaceutique ? », s'interroge, à titre personnel, le président de Roissy Entreprises (6.000 chefs d'entreprises), Jean-Michel Limoges.

Il ne croit pas si bien dire. Pour le maire (PS) de Gonesse, l'un des « grands ratés » depuis la création de Roissy, « c'est la formation des jeunes en langue ou dans les métiers de l'aéro dans leur diversité ». « De même qu'il y a la nécessité de relocaliser l'industrie de la santé et du médicament, il faut préparer les jeunes à la transition écologique et numérique », continue Jean-Pierre Blazy.

Outre ces infrastructures structurantes, trois lignes de bus à haut niveau de service (BHNS), c'est-à-dire circulant sur des voies réservées, seront déployées pour les transports du quotidien : Goussainville-parc des expositions de Villepinte, Villiers-le-Bel - Roissy pôle et Garges+Sarcelles - Roissy Pôle.

« Ce sont autant de gisements importants sur le volet économique qui vont être aidés avec le développement des mobilités » relève la vice-présidente (Libres !) de la région Île-de-France chargée de l'emploi et de la formation professionnelle. « Jusqu'à présent, les jeunes n'avaient pas accès en transport à ces métiers en tension qui ont du mal à recruter », ajoute Stéphanie von Euw.

Combien d'emplois pour l'extension de Rungis ?

En réalité, les acteurs économiques et politiques val-d'oisiens misent beaucoup sur Agoralim, l'extension d'une ligne du Marché intérêt national (MIN) de Rungis s'appuyant sur une plateforme logistique située à proximité. Alors que son président-directeur général Stéphane Layani devra présenter son projet précis « avant la fin de l'automne 2021 », le locataire de Matignon a déjà évoqué la création de « milliers d'emplois ».

« Ce sera 4.000 à 5.000 emplois directs », estime le président de la Chambre de commerce et d'industrie du Val-d'Oise. « Je suis très content des annonces qui ont été prononcées mais je serai très vigilant sur leur démarrage », poursuit Pierre Kuchly.

Les autres emplois locaux et non-délocalisables seront également à aller chercher du côté des nouveaux programmes de rénovation urbaine de Garges-lès-Gonesse, Villiers-le-Bel et Sarcelles. Ou encore dans la restructuration de l'hôpital de Pontoise et dans celui d'Argenteuil. Ainsi que dans la construction d'un nouveau commissariat à Sarcelles ou dans l'extension de celui de Cergy.

Ces chantiers devraient en effet faire l'objet de clauses d'insertion, c'est-à-dire de conditions enjoignant les entreprises de BTP à recruter sur place. Le président (divers droite) de la communauté d'agglomération Roissy Pays de France, Pascal Doll, parie par exemple sur « des retours à l'emploi concomitants avec un regain d'activité et un retour à la vie normale en termes de transport aérien et d'hôtellerie ».

« Cela va apporter des emplois à court et moyen-terme et permettre de lutter contre le chômage et en particulier contre le chômage des jeunes, en les formant à ces carrières », appuie Michel Jonquères, président du Medef 95.

Un préfet de département pro-business

Cela tombe bien : l'exécutif mise sur la formation et soutient le projet de création d'un pôle majeur d'enseignement baptisé « CY Cergy Paris Université » afin de permettre l'implantation d'une école d'ingénieurs. L'Etat va par exemple apporter 40 millions d'euros supplémentaires au laboratoire de Neuville. « Ce montant va être doublé par la région pour mettre le futur travailleur val-d'oisien à un haut niveau de qualification », assure sa vice-présidente Stéphanie von Euw.

Dans le même esprit, le Premier ministre a communiqué sur la décentralisation d'une administration centrale et sur la création d'une cité scolaire à vocation internationale de 1.600 élèves sur la ZAC de Gonesse. « Après l'abandon d'Europacity, aucune entreprise ne risquait à venir sur le triangle. Maintenant, nous allons pouvoir leur dire ''Vous pouvez venir en toute confiance !'" », s'impatiente la présidente (LR) du conseil départemental, Marie-Christine Cavecchi. « Cela constitue un élément majeur pour faire effet de levier » soutient le maire de Gonesse.

Reste que toutes ces promesses devront se concrétiser. « Quelles en seront les échéances ? » s'interroge Jean-Michel Limoges de Roissy Entreprises. « Dès le lendemain des élections départementales et régionales, notre groupe de travail « VO2027 » se réunira pour accompagner la mise en œuvre », affirme de son côté Pierre Kuchly de la CCI 95.

Le locataire de Matignon a, lui, souhaité que le préfet du département Amaury de Saint-Quentin « mette en place un pilotage resserré du déploiement avec un comité de suivi régulier et en lien constant avec [son] cabinet ». Ce même haut-fonctionnaire que tous les décideurs économiques et publics louent pour son caractère pro-business depuis que son rapport de décembre 2020 a servi de base aux déclarations de Jean Castex.

César Armand

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Commentaires 2
à écrit le 11/05/2021 à 4:58
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Un menteur patente, attention les naifs, 2022 c'est demain.

à écrit le 10/05/2021 à 18:10
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Il est bon de rappeler qu'il y a un an tout juste, en mai 2020, Castex, que Macron nous a vendu malhonnêtement comme un cador de la santé, avait un plan pour un déconfinement réussi 😂🤣🤣😂😂🤣🤣🤣😂🤣

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