Zone à faibles émissions du Grand Paris : « Je ne veux pas opposer la santé publique et l’économie » (Ollier)

GRAND ENTRETIEN. Réélu à la présidence de la métropole du Grand Paris il y a un an jour pour jour, le maire (LR) de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) Patrick Ollier répond aux acteurs économiques « inquiets » par le deuxième jalon de la zone à faibles émissions (ZFE).
César Armand
Le maire (LR) de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), Patrick Ollier, est président de la métropole du Grand Paris depuis sa création le 1er janvier 2016.
Le maire (LR) de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), Patrick Ollier, est président de la métropole du Grand Paris depuis sa création le 1er janvier 2016. (Crédits : Sipa)

C'était le 9 juillet 2020 : le président sortant de la métropole du Grand Paris, défait quelques jours plus tôt lors d'une primaire interne aux Républicains, était réélu, au troisième tour, à la tête de l'intercommunalité francilienne de 131 communes. Conscient du déficit de notoriété de la Métropole du Grand Paris (MGP), Patrick Ollier a depuis lancé avec son vice-président (UDI) Philippe Laurent, maire de Sceaux, des réunions publiques baptisées « Les Jeudis de la métropole ».

Il n'empêche : depuis le 1er juin 2021 et l'entrée en vigueur du deuxième jalon de la zone à faibles émissions, qui interdit aux véhicules Crit'4 de circuler sur le périphérique, dans Paris et dans les communes desservies par l'A86, la colère monte. Dans une lettre ouverte publiée le 31 mai dernier, les acteurs économiques franciliens ont témoigné de leur « inquiétude », 100.000 entreprises restant équipées à 86% en voitures diesel.

En réponse, le président de la métropole du Grand Paris assure que les entreprises ayant contracté un prêt garanti par l'Etat (PGE) ou bénéficié du fonds de garantie ou encore du fonds « Résilience Île-de-France et collectivités » peuvent déroger à ces règles jusqu'au 30 juin 2022. Insuffisant ne serait-ce que pour le président de la fédération du bâtiment Ile-de-France Jean-Luc Tuffier et pour le président de la chambre syndicale des travaux publics de Paris-92-93-94 Jean-Pierre Guglielmi qui témoignent de l'absence d'alternatives techniques pour leurs véhicules professionnels.

LA TRIBUNE - Vous avez été réélu à la présidence de la métropole du Grand Paris il y a un an. Comment va votre intercommunalité au lendemain des élections départementales et régionales ?

PATRICK OLLIER -
 La Métropole du Grand Paris n'a rien à voir avec ces phénomènes politiques, mais un an après ma réélection, je peux dire qu'elle est rentrée dans une phase de concrétisation de projets. Elle a vu ses compétences augmenter au fur et à mesure, par exemple en matière de transition énergétique dans l'habitat dégradé et dans la rénovation du tissu pavillonnaire grâce à des aides du ministère de la Transition écologique. D'ailleurs, je sais que je peux compter sur le gouvernement pour chaque action.

Où en est justement le déploiement du contrat de relance et de transition écologique que vous avez signé avec l'Etat le 18 mars 2021 ?

J'ai effectivement signé avec le préfet de Paris, préfet d'Île-de-France Marc Guillaume un contrat de relance et de transition écologique (CRTE) dans le cadre du plan métropolitain de relance doté de 110 millions d'euros. Et ce afin de faire converger les aides de la Métropole et les aides de l'Etat. Nous en sommes encore à l'étude des dossiers, mais beaucoup de projets ont été identifiés et devraient être mis en œuvre en septembre prochain. Objectif : qu'après la crise de la Covid-19, nous participions à la relance. Nous avons perdu 37% de la richesse économique en 2020, contre 34% au niveau national. En attendant, nous lançons la deuxième édition des centres-villes vivants de même qu'en septembre, nous entrerons dans une phase d'identification des projets en matière de logistique.

Comment avance d'ailleurs votre projet dans ce domaine à l'échelle de l'axe Seine avec la maire de Paris et les présidents des métropoles havraise et rouennaise ?

J'ai lancé l'idée volontariste de travailler sur un pôle métropolitain Paris-Rouen-Le Havre pour traiter ces questions de transition écologique, énergétique et logistique qui deviennent des problématiques urgentes. Quand nous nous sommes retrouvés le 1er juin avec Anne Hidalgo, Edouard Philippe et Nicolas Mayer-Rossignol, ils ont accepté que l'ensemble des présidents d'intercommunalités, franciliennes et normandes, puissent être associées à la réflexion.

Concrètement, quelle en sera la suite ?

Après Rouen et Le Havre, une réunion est prévue fin septembre début octobre à Paris. Il a été décidé d'y associer tout le monde sans pour autant les faire entrer dans un système. Dès 1802, Napoléon Ier déclarait que « Paris, Rouen, Le Havre, une seule et même ville dont la Seine est la grande rue ». Cela me touche en tant que fondateur de l'association des villes impériales avec le château de la Malmaison, aujourd'hui présidée par le maire de Fontainebleau Frédéric Valletoux.

En septembre, en direz-vous par ailleurs davantage sur le troisième concours « Inventons la métropole du Grand Paris » ?

Les choses avancent. Le concours « Inventons la métropole du Grand Paris » viendra compléter le plan métropolitain de relance avec des bureaux mutés en logements, des friches reconverties et des quartiers de gare transformés. Les deux premières éditions ont mobilisé pour 77 projets pour 70 communes de la métropole plus de 10 milliards d'euros d'investissements privés.

La zone à faibles émissions, dont le deuxième jalon est entré en vigueur le 1er juin dernier, alerte déjà les acteurs économiques franciliens dont 86% de leurs véhicules roulent encore au diesel. Avez-vous prévu des dérogations ? Des exemptions ?

J'ai reçu la présidente de la chambre de l'artisanat d'Île-de-France, Elisabeth Détry, il y a trois semaines, à la suite de la lettre que vous évoquez. L'état d'esprit est positif et constructif. Nous allons appréhender avec des solutions les inquiétudes formulées par les professionnels qui doivent rentrer dans la zone à faibles émissions et qui n'ont pas les moyens de changer leurs véhicules utilitaires. La métropole du Grand Paris n'a pas les moyens d'apporter des aides, mais la présidente du conseil régional Valérie Pécresse est d'accord pour apporter des subventions. Nous devons donc nous coordonner avec la région. Nous avons d'ailleurs signé une convention de partenariat en ce sens.

Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Il nous faut pouvoir soutenir l'achat d'un véhicule neuf dès lors que ce sont des missions de quelques heures, de la même façon que nous réfléchissons à des systèmes de contrôle de sanction automatisée dès 2023. Nous trouverons parallèlement des outils, type vignette dérogatoire, car je ne veux pas opposer la santé publique et l'économie.

La ZFE est la partie la plus visible de la MGP cinq ans et demi après sa création. Comment comptez-vous inverser la tendance ?

Je n'ai jamais engagé plus de trois réunions publiques car dès lors que le président de la République avait avancé une réforme, tout débat virait à l'échec. A chaque fois, la première question de la salle était : « le président de la République veut changer la métropole du Grand Paris. Que veut-il faire ? ».. C'est pourquoi j'ai orienté ces formats vers les sachants, autrement dit les administrations, les élus et les chefs d'entreprises, mais pas l'opinion publique. Nous allons renforcer nos actions de communication en septembre, mais tant que nous n'aurons pas de réforme présidentielle, cela restera compliqué. Toute réunion politique virera à la réunion polémique alors que la métropole a tout fait pour acquérir ses lettres de noblesse depuis le 1er janvier 2016.

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César Armand

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