Paris 2024 : dans les coulisses de la préparation des coachs

Pour mieux préparer les entraîneurs des équipes de France aux enjeux inédits de cet été et à la pression maximale qui les attend, un cycle de séminaires leur a été concocté. On a suivi le dernier.
Claude Onesta a ouvert mercredi le 5e « séminaire coachs Paris 2024 » avec Jacco Verhaeren (natation), avant que n’aient lieu des débats en plus petit
comité, comme ici entre Guillaume Gille (handball) et Jérôme Daret (rugby à 7).
Claude Onesta a ouvert mercredi le 5e « séminaire coachs Paris 2024 » avec Jacco Verhaeren (natation), avant que n’aient lieu des débats en plus petit comité, comme ici entre Guillaume Gille (handball) et Jérôme Daret (rugby à 7). (Crédits : © LTD / ANAEL BOULAY)

Combien de futures médailles se nichent-elles dans la salle ? À l'hôtel Dream Castle, les seuls rêves qu'on échafaude sont olympiques. Face au verbe tutélaire de Claude Onesta, 80 entraîneurs et managers des équipes de France, sports co ou individuels, ont pris place en rangs serrés. S'ils sont là, ce mercredi, à proximité de Disneyland Paris, c'est qu'on pense que la magie peut opérer cet été pour leur(s) poulain(s), répertoriés dans les cellules performance. Le patron du haut niveau à l'Agence nationale du sport (ANS) est l'inspirateur de ces « séminaires coach Paris 2024 ». Une série en cinq épisodes démarrée il y a deux ans, et conclue cette semaine par deux jours d'échanges. En soi un axe majeur du « Plan coachs », qui prévoit aussi la mise à disposition d'outils d'accompagnement et une valorisation financière (18 000 euros brut par an).

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Devant l'auditoire, studieux et presque entièrement masculin, Onesta retrace la genèse du dispositif, qui date du lendemain des JO de Tokyo (2021), au bilan mitigé de 33 médailles. Compteur et conteur : « Je dois alors pondre une note rapide à l'intention du président de la République, à sa demande. À la fin, je n'oublie pas une liste de courses et de doléances. Et je présente le Plan coachs, sans avoir eu le temps de beaucoup y réfléchir. Mais une chose m'a sauté aux yeux à Tokyo : on a beaucoup de bons entraîneurs, mais pas assez de grands coachs. Des techniciens qui ont bien préparé les athlètes, mais parfois observateurs de la compétition, fatigués, désabusés, dans un sentiment d'isolement. Or, en deux, trois ans, on ne peut pas changer les athlètes, déjà identifiés et accompagnés. Alors c'est sur les coachs qu'il faut miser, pour qu'ils les emmènent plus loin. »

« L'Histoire est en marche. On va réaliser le hold-up du siècle »

Le temps a passé et, visiblement, il n'a pas été perdu. « Je vous le dis, l'Histoire est en marche, avance l'ex-timonier du handball (deux médailles d'or, une d'argent aux JO, trois fois champion du monde et d'Europe). On va réaliser le hold-up du siècle. » L'élan est saupoudré de notes plus modérées - « on n'a pas de garantie », « les autres aussi ont travaillé » -, mais surtout appuyé de projections vivifiantes. Les dernières dessinent 60 médailles, dont 17 en or. Or les prévisions pour Tokyo s'étaient avérées plutôt justes. « Ce n'est plus une ambition illusoire, assure encore Onesta, mais derrière, il faut qu'on soit capables d'optimiser ça. »

La gestion de la dernière ligne droite, c'est justement le thème du jour. Pour le défricher : Jacco Verhaeren, qui a remis la natation française à l'endroit après avoir été recruté dans le cadre du Plan coachs. Le Néerlandais, récoltant en médailles depuis Pieter van den Hoogenband jusqu'à l'équipe d'Australie, insiste sur les vibrations à transmettre. « Même si l'on doute ou qu'on est nerveux, l'athlète ne doit rien lire d'autre en nous que la croyance en sa performance. On doit travailler notre poker face. » Au casting des intervenants en plénière figureront également Tony Estanguet et le navigateur Thomas Coville. Comme Didier Deschamps lors de la précédente session en octobre, cette fois devant 120 entraîneurs (paralympiques inclus).

La porte est fermée et la parole débridée

Vincent Collet se rappelle que la pression des Jeux à domicile, et par extension le coaching sous fort stress, avait alors longuement été évoquée. « Nombre d'entre nous ont vécu les JO et savent que c'est à part, mais chez soi c'est encore autre chose, pose le sélectionneur du basket. Public, fédérations, instances politiques... Il faudra être très fort en interne pour résister aux attentes. » Face à l'équation métal précieux-mental hurlant, le mélange des sports a visiblement du bon : « On vient d'horizons différents mais beaucoup de nos problématiques se recoupent. Il y a quand même l'idée de jouer ta vie sur des moments très courts. »

Pendant les ateliers, en comité resserré, la porte est fermée et la parole débridée. « Ni com ni langue de bois », atteste Karim Souchu (basket 3×3). « Parfois, il y a des anecdotes qui sortent, avec des noms, et sur des joueurs hyper importants », relate Florian Bruzzo, artisan de la montée en gamme de l'équipe de water-polo. Lui, ici, se sent à l'aise pour dire « j'ai un problème ». Ou pour sonder ses pairs sur leur stratégie de liste des sélectionnés : « Tu attends la deadline du CIO, ou tu l'annonces avant pour donner confiance aux mecs ? »

On est là entre gens qui se comprennent. Même si peu se connaissaient à l'origine, ou alors entre deux portes de vestiaires. « Les premiers temps, on se regardait un peu, rembobine Guillaume Gille, palmarès velu avec les Bleus du hand. Mais du lien et du réseau se sont créés, on se file des tips sur plein de sujets. Au départ, tu vois l'intention de ces séminaires : partager l'expérience, créer une équipe de coachs. Et à la fin, tu comprends que l'idée est bonne. » Lui n'en aura pas raté un, nouant notamment une complicité avec Jérôme Daret, récent vainqueur du tournoi de Los Angeles en rugby à 7. Qui prend le relais : « Je travaillais beaucoup sur la performance mentale, collective, celle du staff. Rencontrer Guillaume m'a ouvert sur le travail plus introspectif. Ça a été très puissant pour moi. Avoir un coach, un buddy [un pote] quelque part, avec qui tu peux te mettre à nu, te confronter, c'est important aussi pour progresser. »

Jeudi, au dernier jour du dernier séminaire, le thème sur la table était celui-ci : « Croire en la victoire, la visualiser. » On y est. Paris, c'est parti.

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