Plongeon : Alexis Jandard, célèbre par accident

Le plongeur qui a chuté devant Emmanuel Macron joue de sa mésaventure pour faire parler de son sport. La médaille qu’il vise à Paris pourrait l’y aider encore mieux.
Alexis Jandard au London Aquatics Centre, le 4 janvier.
Alexis Jandard au London Aquatics Centre, le 4 janvier. (Crédits : © LTD / BORY AGLAE/PRESSE SPORTS)

La chargée de communication de la Fédération française de natation vient d'essuyer une tempête. C'est elle qui a reçu la rafale de sollicitations médiatiques adressées à Alexis Jandard depuis le 4 avril. Ce jour-là, le plongeur de 26 ans a glissé lors de l'inauguration du Centre aquatique olympique de Saint-Denis, en présence d'Emmanuel Macron. « C'était la boulette ultime, rembobine-t-il. J'ai eu l'impression de décevoir le président de la République. » Le chef de l'État lui a passé un coup de fil pour s'assurer qu'il ne s'était pas blessé, puis lui a écrit. Alexis Jandard n'a pas pensé à enregistrer le numéro pour vérifier s'il appartenait au locataire de l'Élysée. Au milieu des nombreux appels reçus dans la foulée de sa cascade involontaire, il dit qu'il aurait du mal à le retrouver.

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Après avoir rassuré sa mère « hyper inquiète », qui lui a téléphoné « en pleurs », l'athlète rhodanien, originaire d'Écully et licencié à Vaugneray, a eu un réflexe générationnel : il a alimenté ses réseaux sociaux, parlant à ses suiveurs « comme à des potes ». Lundi, il a mis en ligne une vidéo cocasse pour expliquer comment « bien rater » un plongeon. « Mon auto- dérision a séduit », estime ce boute-entrain qui n'a pas attendu de glisser devant de hauts personnages de la nation pour « faire rire ».

« Après cette péripétie, il faut que j'assure. Le pire serait de m'enfermer dans le rôle du plongeur qui a glissé »Alexis Jandard

Se ramasser, comme il dit, lui arrive « très souvent » à l'entraînement. « Tous les plongeurs ont connu la chute. » La sienne a provoqué des réactions désolées de ses partenaires, comme des membres de la Police nationale, où il est réserviste en contrat à durée déterminée depuis un peu plus d'un an.

« Avant les premières médailles mondiales, c'est papa et maman qui payaient tout », confie celui qui doit se débrouiller pour couvrir ses dépenses. Pour y parvenir, il a monté une association qui subventionne sa pratique et a accueilli avec soulagement les 7 500 euros de sa performance aux Mondiaux 2023 (bronze). Après la gamelle, les médias ont accouru, les sponsors pas encore. Recevoir le soutien d'une grande marque à trois mois des Jeux serait « une surprise ».

Tricot en tribune

La blessure d'amour-propre, vite effacée, a mis en lumière un sport peu visible. Alexis Jandard se souvient que, aux JO de Tokyo, la vedette britannique Tom Daley avait fait moins parler pour sa médaille d'or que pour avoir tricoté en tribune. « Il faut toujours quelque chose qui sorte de l'ordinaire pour parler de plongeon, une chute ou un plat », dit-il sans le déplorer pour autant. La discipline est spectaculaire et télégénique mais il reconnaît, à la décharge du public, que « les règles ne sont pas faciles à comprendre » et que le système de notation, subjectif comme au patinage artistique, ne le rend pas accessible. Si son gadin pouvait attirer des curieux l'été prochain, « tant mieux ». Ce sera une « petite vengeance » après le huis clos imposé par la pandémie en 2021. Il va d'ailleurs se renseigner pour savoir si la billetterie du plongeon s'est emballée ces derniers jours.

Trop vieux, à 16 ans

Après une tournée médiatique complète, Alexis Jandard a sifflé la fin de la récréation en milieu de semaine - il donnera tout de même le coup d'envoi de Lyon-Brest ce soir. La médaille qu'il vise en plongeon à 3 mètres synchronisé, avec son partenaire Jules Bouyer, l'occupe à plein temps : deux entraînements par jour pour tenter de faire mieux qu'aux derniers JO, où il s'était arrêté en demi-finale. L'argent mondial en 2022, puis le bronze l'année suivante, ont confirmé qu'ils pouvaient viser un podium. D'ici là, il s'astreint aux trois phases de l'entraînement - à sec, aquatique et musculaire - pour limiter le risque de blessure. « Nos corps sont mis à rude épreuve », constate-t-il.

Le sien a été encore plus sollicité dans sa première vie de gymnaste. Son rêve de haut niveau s'est arrêté à l'entrée d'un pôle. Trop vieux, à 16 ans. « Tout s'est cassé la gueule », se souvient Alexis Jandard qui, pendant qu'il ruminait sa déception, est tombé sur des vidéos de plongeon sur YouTube. Un sport qu'il avait pratiqué à l'école primaire. Il a commencé à fréquenter la piscine municipale le dimanche. Au bout d'un an, il était en équipe de France junior. Un peu « trapu » pour un plongeur, il s'est affiné. Et les résultats sont arrivés. Pour la notoriété, il a donc fallu un accident. Tout cela l'amuse mais ne l'empêche pas d'être lucide : « J'en jouerai toujours mais, après cette péripétie qui a fait parler de moi et de mon parcours, il faut que j'assure. Le pire serait de m'enfermer dans le rôle du plongeur qui a glissé. »

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Commentaire 1
à écrit le 14/04/2024 à 8:38
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Certainement qu'il est devenu plus connu avec sa chute que par sa discipline.

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