"Sauvegarder nos terroirs et la biodiversité est clairement notre priorité", Philippe Coutin (Pernod Ricard France)

C’est sans doute la marque la plus ancrée dans l’imaginaire du bien-vivre, du partage, de la convivialité et du soleil. Marseillaise de naissance, elle ancre son nouveau siège social au cœur de la cité phocéenne. Un retour aux sources qui n’en est pas vraiment un car Pernod Ricard n’a jamais quitté les rivages de la Méditerranée. Et c’est ce rapport avec la terre, le territoire, qui nourrit sa philosophie durable. Rencontre avec son PDG, Philippe Coutin. (Cet article est issu de T La Revue de La Tribune - N°6 Octobre 2021)
Philippe Coutin, président-directeur général de Pernod Ricard France
Philippe Coutin, président-directeur général de Pernod Ricard France (Crédits : DR)

Le siège de Pernod Ricard France, installé à Marseille, s'est voulu à la fois exemplaire et volontariste dans le recours à des matériaux recyclés et à des entreprises 100 % locales. En quoi est-il indispensable de démontrer à l'intérieur le discours que l'on porte à l'extérieur ?

Philippe Coutin Nous voulons être des créateurs de convivialité responsables et engagés et avons des engagements sociaux et environnementaux ambitieux à 2025 et 2030. Le premier prérequis bien sûr est de les incarner en interne. C'est une question de cohérence. Et ça commence par un siège social aux Docks de Marseille, à la hauteur de nos ambitions : un espace de travail pensé par et pour nos salariés, où l'on privilégie l'agilité, le bien-être et le bien-vivre ensemble et que nous avons naturellement aménagé grâce à de nombreuses entreprises et artisans de la région. Les Docks, c'est aussi un bâtiment respectueux de son environnement, écoresponsable, chauffé et climatisé grâce à l'énergie de l'eau de la mer. C'est d'ailleurs le premier immeuble raccordé à la boucle d'eau de mer Thassalia.

Le groupe déploie un programme baptisé Good Times from a Good Place. Quel en est la philosophie ?

P.C. Cette feuille de route RSE globale à horizon 2030 intitulée « Good Times from a Good Place » s'articule autour de quatre piliers aux objectifs ambitieux, alignés sur les Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations unies : préserver les terroirs, valoriser l'humain, agir circulaire et être responsable. La philosophie globale est de créer avec toutes nos parties prenantes, de bons moments de convivialité et de le faire de la meilleure des façons possibles. De créer un monde plus convivial, un monde sans excès en agissant sur toute notre chaîne de valeur, du terroir au comptoir.

Aujourd'hui, le développement durable c'est du verre recyclé, des bouchons qui ne sont plus en plastique... comment être le plus « parfait » possible ?

P.C. L'entreprise idéale, la perfection, n'existent pas, mais tendre à l'être est clairement notre volonté : essayer de s'améliorer continuellement, apprendre de ses erreurs, laisser aux collaborateurs en mode « Test & Learn » la possibilité d'oser, de se tromper pour mieux rebondir. D'ailleurs, un de nos engagements prioritaires est d'agir de manière circulaire et notamment d'écoconcevoir 100 % de nos packagings. Par exemple, notre bouteille de Ricard est déjà composée en moyenne de 81 % de verre recyclé et se recycle à 99 %. Et on progresse encore : un travail global d'écoconception a été réalisé sur l'ensemble du packaging, comme la réduction de la taille de l'étiquette, la suppression des encres métalliques, l'insertion des consignes de tri sur les étiquettes ou encore la suppression de la couleur blanche pour l'impression du carton de transport.

Pernod Ricard France est également très engagé dans le soutien de l'agriculture durable et on peut citer votre implication auprès des agriculteurs de Valensole par exemple. Quel est le rôle de Pernod Ricard France et jusqu'où peut aller son soutien de l'agriculture durable ? Plus largement, dans le soutien aux territoires, en France comme à l'étranger ?

P.C. Effectivement, nous sommes très impliqués dans l'agriculture de demain car les ingrédients qui composent nos produits sont tous issus de la nature. Ils tirent leur caractère, leurs forces, du terroir d'où ils proviennent. Sauvegarder nos terroirs et la biodiversité est clairement une priorité. Nous avons d'ailleurs pour objectif en France de certifier 100 % de nos terroirs stratégiques en agriculture durable ou régénérative. C'est ce que nous faisons par exemple en relançant en France la culture du fenouil sur le plateau de Valensole, en Haute Provence et en Normandie. Nous accompagnons nos producteurs de fenouil dans leur certification CENSO, une démarche de développement durable pour la filière des huiles essentielles françaises de lavande, lavandin et du fenouil. Les premières seront délivrées cette année. Nous adhérons aussi au label « Gentiane durable » qui est un ingrédient phare de l'apéritif français Suze.

Grâce à notre partenariat avec l'association « Pour une Agriculture du Vivant » et avec les acteurs de la filière agricole et alimentaire, nous participons à un projet de transition agroécologique de la culture française de la betterave. Plus largement, en France comme à l'étranger, nous essayons d'agir avec solidarité et citoyenneté sur notre territoire. Pendant la crise, nous avons par exemple fait de notre mieux pour accompagner nos partenaires du CHRD (cafés, hôtels, restaurants, discothèques) en reportant les encours, en proposant des formations et en participant à des programmes de soutiens comme « J'aime mon bistrot ». En tant que leader des spiritueux en France, nous avons clairement la responsabilité de soutenir, de transformer de manière positive notre industrie et de partager les bonnes pratiques avec l'ensemble de nos partenaires.

Le nom de Ricard est intrinsèquement lié à la protection de l'environnement. Paul Ricard (le fondateur de la marque, ndlr) était visionnaire. Comment anticiper, prévoir, les nouveaux usages en la matière ? Est-ce de l'intuition, de l'observation approfondie du terrain ?

P.C. La Responsabilité Sociétale et Environnementale est depuis toujours au cœur de notre stratégie. Paul Ricard était un homme visionnaire : il a créé dès 1966 l'Institut océanographique Paul Ricard avec pour objectif de faire connaître et protéger la mer. Dès 1938, il distribuait des actions gratuites à ses salariés. Il a aussi fondé en 1967 la Fondation culturelle Paul Ricard, c'était un homme généreux, vraiment novateur pour l'époque. Paul Ricard disait : « Il est de notre devoir de construire ensemble, un monde meilleur pour les générations futures ». Aujourd'hui, nous essayons tous dans le Groupe de faire perdurer cet héritage et cette vision. Pour cela, il faut rester à l'écoute de son marché, de ses consommateurs-citoyens, de ses clients et partenaires.

La RSE, c'est aussi défendre une consommation « raisonnée » ou raisonnable de l'alcool. Comment adressez-vous ce sujet ?

P.C. Nous sommes bien conscients des méfaits d'une consommation excessive ou inappropriée d'alcool. Nous avons d'ailleurs coutume de dire qu'il ne peut y avoir de convivialité dans l'excès et nous nous engageons à cultiver une convivialité responsable. Nous avons mis en place des programmes de sensibilisation comme « Responsible Party » pour faire évoluer durablement les comportements et apposons sur l'ensemble des bouteilles de notre portefeuille de marques le logo « Interdit aux moins de 18 ans ». Pernod Ricard France s'engage aussi sur le No-Low au travers de marques sans alcool ou faiblement alcoolisées ainsi que des cocktails inférieurs à une unité d'alcool, comme Lillet Tonic qui contient 0,67 unité d'alcool ou Suze Tonic qui titre à 0,47.

Notre ambition est de développer une alternative sans alcool et une drink strategy low alcohol pour nos principales catégories de spiritueux. Nous venons ainsi de lancer Ceder's, « un gin sans alcool ». D'autres innovations sont à venir...

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Cet article est extrait de "T" La Revue de La Tribune n°6 - PLANETE MON AMOUR - Réparons les dégâts ! Octobre  2021 - Découvrez la version papier

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Commentaire 1
à écrit le 22/12/2021 à 9:35
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Oui mais comment sauver la biodiversité avec des produits agro-industriels dont le but est justement de tuer cette biodiversité ? Les zones mortes qui se multiplient et s'étendent dans le monde ne sont dues qu'aux engrais agro-industriels, rien que l...

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