TOWT relance la marine à voile

Lauréate du programme Propulse de l'Agence de l'innovation pour les transports, la société maritime a développé un nouveau concept de navire marchand : les voiliers-cargos. Propulsés essentiellement à la voile, ils participeront ainsi à la décarbonation du secteur. Les premiers seront prêts dans les prochains mois et transporteront pour commencer du café et des spiritueux.
(Crédits : DR)

« Le transport maritime reflète toutes les crises mondiales - géopolitiques, énergétiques, environnementales », remarque Guillaume Le Grand, co-fondateur en 2011 de la société TOWT (pour Trans Oceanic Wind Transport). En effet, le secteur n'en finit pas d'affronter des situations difficiles, qu'il s'agisse de la crise Covid qui a mis le commerce international quasiment à l'arrêt, de la sécheresse qui affecte aujourd'hui le canal de Panama et ralentit le trafic ou des tensions qui sévissent actuellement en mer Rouge et perturbent l'activité du canal de Suez.

Sans oublier, au fil des années, l'envolée ponctuelle des cours du brut, qui renchérissent les coûts de transport et la volonté de plus en plus forte, notamment de la part des autorités européennes, de lutter contre le dérèglement climatique. Avec en particulier l'extension au transport maritime du système européen d'ETS (European Union Emissions Trading System).

Ainsi, ce système communautaire d'échange de quotas d'émission impliquera de la part des compagnies maritimes de payer, en 2025, pour 40 % des émissions de carbone enregistrées en 2024, puis, en 2026, pour 70 % des celles de 2025. Des initiatives réglementaires qui incitent à une décarbonation du secteur.

Mais si, les grandes compagnies de transport maritime misent avant tout sur une meilleure efficacité des carburants fossiles pour réduire les émissions, voire sur l'hydrogène, Guillaume Le Grand a choisi une voie bien différente. D'abord parce que « la technologie ne peut pas tout et qu'en matière de produits fossiles, les inconnues, dont le prix du pétrole, sont trop grandes », dit-il. Ensuite, parce que ce Breton d'origine a navigué à la voile pendant toute sa jeunesse et qu'il a vu, dès le début des années 2000, une opportunité commerciale dans ce nouveau mode de transport, en plus d'une promesse environnementale et d'une prouesse technique. Cette propulsion principale à la voile présente ainsi de nombreux avantages, dont le maintien des taux de fret à long terme.

Avec une équipe de spécialistes, il a travaillé pendant plusieurs années pour mettre au point un prototype à voiles souples, tandis que d'autres innovateurs préfèrent des matières rigides.

La route du café

Les coques des deux premiers voiliers-cargo, l'Anemos et l'Artemis, ont été construites respectivement au Vietnam et en Roumanie) et ces deux navires sont en cours d'aménagement à Concarneau. Ils devraient être prêts à naviguer dans les mois qui viennent. A partir du Havre, ils traverseront l'Atlantique, pour acheminer des produits français à New York, et après une escale dans les Caraïbes, seront chargés de café brésilien et colombien pour le chemin de retour.

« Notre offre commerciale est finalement aussi rapide que les navires marchands à énergie fossile, puisque, si nous prenons un peu plus de temps en mer (19 jours contre 13 environ), nous en gagnons dans les ports où nous arrivons directement et nous évitons ainsi, grâce à notre taille, les problèmes de congestion des terminaux et les ré-acheminements », fait valoir le dirigeant de TOWT.

Mieux, alors que les cales des navires traditionnels ont besoin d'être réfrigérées pour le transport de produits fragiles comme les vins et spiritueux, celles des navires à voile de TOWT n'en nécessitent pas car elles affichent une variation de température d'un degré seulement.

Enfin, les prix de transport, qui n'obéissent pas, du fait du choix du mode de propulsion vélique, aux évolutions du cours du brut, sont fixes, stables, prédictibles et parfaitement compétitifs. Autant dire que d'autres navires à voile devraient rejoindre les deux premiers afin de constituer une véritable flotte nouvelle génération. Guillaume Le Grand est confiant car « les clients finaux demandent de plus en plus la garantie d'un produit transporté de façon décarbonée ».

Etat stratège

Si la reconnaissance viendra donc des industriels et des consommateurs, celle apportée par le programme Propulse à TOWT a d'abord permis à Guillaume Le Grand de se sentir moins seul... « Non seulement le processus de candidature au programme de l'Agence de l'innovation pour les transports (AIT) nous a permis de mieux nous structurer, mais en plus, nous nous sentons appartenir à une 'grappe' d'innovation, avec d'autres lauréats qui partagent les mêmes valeurs », se réjouit-il,en ajoutant : « Entrer dans un tel écosystème nous fait gagner en crédibilité et montre un Etat stratège sur les questions de mobilité durable. ».

Pour gagner la bataille de la décarbonation du transport maritime, TOWT aura aussi besoin de fonds, car la construction et l'armement de navires exigent des montants colossaux. D'autant que le dirigeant breton a l'intention de disposer de 30 navires à voile en 2030 et de 100 en 2040.

D'ici là, les premiers navires auront fait leurs preuves, et c'est le sens de l'appui de l'AIT auprès de l'entreprise TOWT, lauréate du programme Propulse

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Commentaire 1
à écrit le 29/03/2024 à 10:27
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Heureusement que nous avons de temps en temps des nouvelles réjouissantes de ce genre ! Bravo, merci beaucoup et bons vents ! Voilà une entreprise qui ne devrait avoir aucun problème à recruter ne pouvant que proposer du sens à ses employés. 20/20. C...

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