Nouveau raté dans la modération des contenus haineux sur les réseaux sociaux. Trois victimes françaises du terrorisme, cibles de harcèlement en ligne, attaquent Twitter devant les tribunaux. Leur reproche : la justice a classé sans suite leur plainte contre leurs cyberharceleurs, car Twitter n'a pas répondu à la requête judiciaire de fournir l'identité des harceleurs.
Cette assignation, pour "refus de déférer à une demande d'une autorité judiciaire" et "complicité des délits d'injure publique", a été adressée à Twitter par une rescapée de l'attaque contre le Bataclan, Aurelia Gilbert, le père d'une victime de l'attentat, Georges Salines, et par l'ancien journaliste Nicolas Hénin, otage en 2013 du groupe Etat islamique.
Vague de harcèlements
En août 2020 pour les deux premiers et durant l'été 2019 pour M. Hénin, ils ont été ciblés par une vague de harcèlement après avoir pris position en faveur du rapatriement des enfants de jihadistes français retenus en Syrie.
Le compte de Aurelia Gilbert avait été piraté après une première série de tweets insultants -"Dommage qu'ils l'aient loupée"-. Le pirate publiait en son nom des messages tels que: "Mon numéro est le 06.XX.XX.X.XX.XX et je suis un traître à mon peuple"
"Je pense qu'il faut passer tous les abrutis de collabos par les armes", avait répondu un compte sous pseudonyme à Georges Salines.
Nicolas Hénin s'était lui retrouvé "au centre d'un véritable déferlement de violence et de haine sur le net, mêlant insultes, menaces sur sa personne et sur ses proches, théories complotistes allant jusqu'à mettre en doute son passé d'otage", résume la citation, rédigée par Me Eric Morain et Antoine Vey, qui défendent les trois demandeurs.
La plupart des messages signalés ont été rapidement supprimés par le réseau social. Mais faute de réponse de Twitter à ses requêtes, le parquet de Paris a successivement classé leurs plaintes au cours de l'année 2020, pour cause d'"auteurs inconnus".
Autre procédure toujours en cours
Dans le cas de M. Salines, le service Support de Twitter a déclaré aux enquêteurs qu'"il ne répondait aux réquisitions que dans le cadre d'une demande de commission rogatoire ou d'entraide pénale internationale", rapporte l'assignation. "Twitter a précisé qu'à supposer même qu'une réquisition soit faite dans ces formes, il appliquerait alors ses propres règles de procédure, en informant préalablement l'utilisateur concerné pour lui donner l'opportunité de la contester en justice. Ce n'est qu'en l'absence de recours de l'utilisateur ou d'échec de celui-ci que Twitter pourra raisonnablement répondre." Joint par l'AFP, l'avocat de Twitter n'a pas souhaité réagir.
Dans une autre procédure, lancée à Paris en 2020, quatre associations - L'Union des étudiants juifs de France (UEJF), SOS racisme, SOS Homophobie et J'accuse - reprochent à Twitter de manquer à ses obligations de modération. Une médiation, ordonnée par la tribunal de Paris, est toujours en cours.
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