Pour sortir de la crise provoquée par le coronavirus, la relance sera écologique et numérique. C'est le message porté ce mercredi matin par la présidente de la Commission européenne, lors de son premier discours annuel sur l'état de l'Union. Ursula von der Leyen a détaillé la mise en oeuvre du plan de relance européen "Next Generation EU", adopté en juillet et doté d'une enveloppe de 750 milliards d'euros.
Avec des périodes de confinements imposées à plus de la moitié de la planète depuis le début de l'année en raison du Covid-19, le numérique a connu une accélération sans précédent : télétravail, école à distance, téléconsultation, commerce en ligne... "Le numérique nous a permis de faire face à cette nouvelle pandémie", a affirmé en guise de préambule la présidente. Et de poursuivre :
"Imaginons un instant cette pandémie sans le numérique. Nous serions en tous en quarantaine, coupés de notre famille, de la société et de notre travail, subissant d'énormes problèmes d'approvisionnement. C'est ce qu'il s'est passé il y a 100 ans lors de la dernière pandémie."
20% du plan de relance européen alloué au numérique
C'est pourquoi l'équivalent de "20% du plan de relance européen [soit environ 150 milliards d'euros, ndlr] sera investi dans le secteur du numérique", a promis Ursula von der Leyen devant le Parlement européen.
Depuis le début de la crise, "nous avons fait plus d'innovations et de transformation numérique en quelques semaines qu'en plusieurs années. Mais il y a encore beaucoup de choses à faire. Cette décennie à venir doit être celle du digital", a martelé la présidente.
La Commission européenne dit vouloir fixer des "objectifs clairs" d'ici 2030 sur l'accès à Internet en haut débit pour tous, la cybersécurité et la liberté de circulation des données, entre autres. L'objectif affiché : ne pas rater le coche d'une relance numérique, au risque de se voir distancer davantage par les Etats-Unis et la Chine. "L'Europe doit agir vite, et maintenant, car sinon d'autres le feront avant nous et fixeront les nouvelles normes du numérique", a estimé Ursula von der Leyen en appelant à défendre la souveraineté numérique de l'UE. La présidente a conforté des priorités déjà annoncées en février, dans le cadre de la stratégie numérique de l'UE pour le nouveau mandat de la Commission qui court jusqu'en 2024.
Favoriser le partage de données industrielles
L'Europe veut ainsi favoriser davantage le partage et la valorisation des données industrielles. Selon la présidente, "l'Europe a été trop lente pour l'exploitation des données personnelles, et d'autres s'en sont emparés", notamment les géants américains de la tech, comme Facebook et Google. "Nous ne devons pas reproduire la même erreur pour l'exploitation des données industrielles, qui sont de l'or pour la création de nouveaux services. Or, 80% des données industrielles récoltées ne sont jamais exploitées", chiffre-t-elle.
Pour ce faire, l'Europe doit se doter de centres de données européens pour faciliter le partage de données, entre autres, dans les domaines de la santé et de l'énergie. Elle réaffirme ainsi la mise en oeuvre du projet de cloud européen, baptisé Gaia-X. Lancé en 2019 à l'initiative de la France et de l'Allemagne, cet écosystème de services vise à reconquérir la souveraineté numérique de l'Europe et assurer la sécurité des données des entreprises, alors que le Vieux Continent est actuellement ultra-dépendant des infrastructures de cloud américaines et chinoises. Le projet sera géré sous la forme d'une association à but non lucratif, qui vient tout juste d'être créée ce mardi.
Création d'une identité numérique européenne
La Commission européenne cherche également à renforcer la protection des données personnelles. C'est pourquoi Ursula von der Leyen a annoncé la création d'une "identité numérique européenne sécurisée", sans préciser le calendrier. Ce dispositif devrait s'appuyer sur la réglementation en vigueur au niveau européen, le Règlement eIDAS. La Commission a déjà lancé une consultation publique sur le sujet cet été. L'objectif : permettre à chaque internaute la gestion de son identité numérique.
Les débats sur l'identité numérique ont connu un certain regain d'intérêt depuis le confinement, et la nécessité de réaliser à distance des démarches parfois confidentielles. L'identité numérique vise à instaurer une plus grande confiance dans les échanges en ligne pour simplifier les démarches des citoyens, en les dotant d'un identifiant et d'un mot de passe uniques. Ces derniers sont généralement complétés par divers facteurs d'authentification contenus sur une clé UBS, un smartphone ou une carte d'identité électronique. L'identité numérique européenne "pourra être utilisée pour tout faire : payer ses impôts, comme louer un vélo", a avancé la présidente.
Enfin, l'UE dit vouloir mettre l'accent sur les infrastructures. "L'accélération du numérique ne se fera pas sans une connexion suffisante. Si l'on souhaite doter l'Europe de toutes les chances nécessaires dans cette course, on ne peut pas accepter que 40% des personnes vivant en milieu rural n'ait pas accès au haut débit", a-t-elle plaidé. Le plan de relance européen est une "occasion unique pour déployer la 5G, la 6G et la fibre optique", notamment dans les milieux ruraux.
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