"Il n'y a pas d'opposition entre l'ESS et le capitalisme"

Entretien avec Daniel Hurstel, auteur de La Nouvelle Économie sociale pour réformer le capitalisme (éd. Odile Jacob), et d’Homme, entreprises, société : restaurer la confiance (éd. Eyrolles).
Selon Daniel Hurstel, "dès qu’on compartimente, on se trompe". / DR

L'avocat d'affaires Daniel Hurstel, s'est intéressé aux CIC (community inte-rest company) lorsque cette forme juridique a été introduite par le gouvernement britannique dans le Companies Act de 2006. Il s'agissait d'offrir un cadre aux structures poursuivant à la fois le profit financier et l'intérêt général, en consacrant leurs bénéfices à des causes sociales et environnementales.

« J'ai été captivé par la façon dont on y bouscule les frontières, la manière dont on applique les méthodes d'efficacité de l'entreprise à une cause sociale », dit-il.

C'est en 2009 qu'il publie La Nouvelle Économie sociale pour réformer le capitalisme (éd. Odile Jacob). Mais, dans la période actuelle où beaucoup voient dans la crise le résultat des excès d'un capitalisme qui serait « le règne de l'égoïsme et du profit à court terme », il juge le problème de « la pertinence d'une séparation entre économie sociale et économie capitaliste plus que jamais d'actualité ». Il pose ensuite la seule question qui vaille à ses yeux : « Cette ségrégation est-elle ou non utile à un développement économique harmonieux ? »

Finalité sociétale et valeur actionnariale

Historiquement, rappelle-t-il, l'économie sociale est un mode d'organisation de l'entreprise qui, à la fin du XIXe siècle, en réaction à la situation extrêmement précaire des ouvriers, supprime l'échelon de l'actionnaire au profit du bénéficiaire du service ou de l'employé.

« Mais sa finalité n'est pas nécessairement d'inspiration solidaire, souligne-t-il. Il faut éviter toute confusion entre le mode d'organisation et la finalité. »

Pour Daniel Hurstel, toute innovation qui apporte un service nouveau à l'usager est sociale, et le bénéficiaire se soucie peu de savoir si la structure fait officiellement partie de l'ESS.

« Aucune organisation ne peut se prétendre à même de créer de l'innovation sociale. Et d'ailleurs, quelles innovations l'ESS a-t-elle apportées depuis un siècle ? » assène-t-il.

Plutôt que d'opposer l'économie vertueuse à l'économie capitaliste, la question qui se pose plus largement, à ses yeux, est celle de la place de l'homme par rapport à l'activité économique, le sujet de son prochain ouvrage, Homme, entreprises, société : restaurer la confiance, à paraître le 31 octobre prochain aux éditions Eyrolles.

Évoquant les initiatives de grands groupes (Danone, Essilor, Renault, Crédit agricole…) à l'origine de projets d'inspiration solidaire, il arme que finalité sociétale et valeur actionnariale peuvent cohabiter au sein de toute entreprise. Dans les approches entrepreneuriales associant entreprises classiques et associations, chacun joue son rôle, l'association veillant à ce que l'activité ne serve pas exclusivement à enrichir l'actionnaire de la partie privée.

« En effet, dans les projets qui se veulent sociaux, ce n'est pas la création de profit, mais son appropriation privée, qu'il s'agit d'éviter », rappelle-t-il.

Et, s'il reconnaît que l'économie capitaliste a besoin de se renouveler, il se réjouit de voir que beaucoup réfléchissent à la réforme de leur entreprise, notamment aux États-Unis, le pays le plus capitaliste au monde.

« Et pendant qu'on s'attache à des combats du passé, on ne s'occupe pas des vrais problèmes », conclut-il.

Commentaires 2
à écrit le 02/12/2013 à 10:35
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Effectivement aucune opposition ou comment faire croire aux prolétaires qu'ils travaillent pour eux....de jolis mots, mais un bel enfumage...

à écrit le 29/11/2013 à 21:31
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