L'option militaire en Corée du Nord pas privilégiée mais serait dévastatrice, dit Trump

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Pyongyang campe sur ses positions sur fond d'escalade verbale[reuters.com]
(Crédits : Aaron P. Bernstein)

SEOUL/PEKIN (Reuters) - Le président américain Donald Trump a prévenu mardi la Corée du Nord que tout conflit armée avec les Etats-Unis serait dévastateur pour Pyongyang, bien que cette option ne soit pas privilégiée par Washington.

"Nous sommes totalement préparés à la seconde option, qui n'est pas celle que nous favorisons", a-t-il dit lors d'une conférence de presse à la Maison blanche. "Mais, si nous devons la choisir, ce sera dévastateur, je peux vous le dire, pour la Corée du Nord. C'est ce qu'on appelle l'option militaire. Et si nous avons à la choisir, nous le ferons".

L'escalade verbale entre le régime nord-coréen et le président américain Donald Trump a franchi un nouveau palier ces derniers jours, ce qui a incité la Chine et la Russie à renouveler mardi leurs mises en garde contre tout recours à la force aux conséquences potentiellement catastrophiques.

A Donald Trump qui prévenait samedi sur Twitter que les dirigeants nord-coréens "n'en auraient plus pour longtemps" s'ils mettaient leurs menaces à exécution, le chef de la diplomatie nord-coréenne Ri Yong-ho a répliqué lundi au siège des Nations unies à New York que "le monde entier devra se souvenir que ce sont les Etats-Unis qui ont été les premiers à déclarer la guerre".

Des propos jugés "absurdes" par la Maison blanche. "Nous n'avons pas déclaré la guerre à la Corée du Nord. Franchement, suggérer cela est absurde", a dit la porte-parole de la présidence américaine Sarah Sanders devant la presse.

Ri Yong-ho a souligné que Pyongyang se réservait le droit de prendre des contre-mesures, y compris d'abattre des bombardiers américains qui s'approcheraient de son territoire, même en dehors de son espace aérien. "La question de savoir qui n'en aura plus pour longtemps trouvera alors sa réponse", a encore affirmé Ri Yong-ho.

Malgré l'escalade des tensions, le régime de Pyongyang n'a pour l'instant pris aucune initiative militaire, a déclaré mardi le chef d'Etat-major des armées américaines, le général Joseph Dunford.

"Alors que l'espace politique est très occupé en ce moment, nous n'avons constaté aucun changement de position des forces nord-coréennes et nous observons cela de très près", a dit le général Dunford devant la commission des forces armées du Sénat américain.

Plus tôt mardi, l'agence de presse sud-coréenne Yonhap a rapporté que Pyongyang avait renforcé ses défenses en déplaçant des avions sur sa côte orientale.

Parallèlement, Washington a sanctionné mardi 26 personnes et neuf banques dont certaines entretiennent des liens avec la Chine, dans le cadre de la lutte contre la prolifération nucléaire en Corée du Nord.

"UNE GUERRE EN CORÉE N'AURA PAS DE VAINQUEUR"

Le Pentagone a annoncé samedi que des bombardiers américains avaient survolé la mer du Japon à l'est des côtes de la Corée du Nord pour démontrer que Washington avait "de nombreuses options militaires" à sa disposition.

Pyongyang accuse les Etats-Unis, qui disposent de 28.500 hommes en Corée du Sud, de préparer l'invasion du Nord.

A Pékin, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Lu Kang, a déclaré mardi qu'"une guerre dans la péninsule coréenne n'aura(it) pas de vainqueur".

"Nous espérons que les responsables politiques américains et nord-coréens auront suffisamment de discernement politique pour comprendre que le recours à la force militaire ne sera jamais une façon viable de résoudre la question de la péninsule", a-t-il dit lors d'un point de presse quotidien.

La Chine, principal allié de Pyongyang, a approuvé plusieurs trains de sanctions pour tenter de freiner le programme nucléaire et balistique nord-coréen.

Ses exportations de carburant vers la Corée du Nord ont chuté en août, ainsi que les importations nord-coréennes de minerai de fer, mais les livraisons de charbon ont repris après une pause de cinq mois, montrent les statistiques des douanes chinoises publiées mardi.

Le secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson va se rendre en Chine de jeudi à samedi, pour discuter notamment de la crise avec Pyongyang, afin de préparer le terrain pour Donald Trump, qui est attendu à Pékin en novembre.

Le ministère russe des Affaires étrangères estime qu'un conflit en Corée aurait des "conséquences catastrophiques" et travaille "en coulisses" pour trouver une solution politique, a dit le diplomate Mikhaïl Oulianov à l'agence RIA.

La Corée du Nord, qui multiplie les essais de missiles balistiques et a procédé le 3 septembre à son sixième essai nucléaire, d'une puissance sans précédent, menace régulièrement de détruire les Etats-Unis, la Corée du Sud ou le Japon.

ATTENTION AUX "ERREURS DE JUGEMENT FATALES"

Le ton est monté si haut ces derniers jours que les observateurs redoutent un dérapage aux conséquences incalculables.

"Les déclarations emportées peuvent conduire à des erreurs de jugement fatales", a ainsi souligné lundi Stephane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l'Onu Antonio Guterres.

Lors de son premier discours devant l'Assemblée générale des Nations unies, Donald Trump a menacé il y a une semaine de "détruire totalement" le pays de 26 millions d'habitants s'il menaçait les Etats-Unis ou leurs alliés.

Dans une rare déclaration publique, le dirigeant nord-coréen Kim Yong-un a qualifié trois jours plus tard le président américain de "vieux sénile" et annoncé des "contre-mesures radicales et historiques".

Le conseiller à la sécurité nationale américaine H.R. McMaster a défendu lundi la rhétorique de Donald Trump, soulignant que Kim Yong-un devait comprendre le danger que lui et son pays encouraient.

Il a toutefois reconnu le risque de dérapage.

"Nous ne pensons pas qu'il existe une solution militaire facile à ce problème", a-t-il souligné. "Aucune frappe de précision ne résoudra ce problème, ni aucun blocus militaire."

(Christine Kim à Séoul, Christian Shepherd à Pékin, avec Sanjeev Miglani à New Delhi, Michelle Nichols aux Nations unies, Dmitri Soloviov à Moscou, Idrees Ali et Susan Heavey à Washington; Jean-Stéphane Brosse et Arthur Connan pour le service français)