En attendant les lois Macron 2, 3, 4...

Le projet de loi sur la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques sera voté avant le 14 juillet et commencera à s'appliquer en août pour les autocars, le travail du dimanche ou le permis de conduire, notamment. Ce texte aux impacts autant micro-économiques que sociaux sur le droit du travail suffira-t-il à libérer la croissance ? D'autres réformes sont-elles envisageables avant la fin du quinquennat ?
Fabien Piliu
D'autres réformes pour libéraliser l'économie, plus ciblées et moins lourdes à mettre en oeuvre sont-elles en revanche envisageables ? Pour l'instant, Bercy reste évasif. Mais Emmanuel Macron semble décidé.

Le feuilleton prendra bientôt fin. Présenté le 10 décembre en Conseil des ministres, le projet de loi sur la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, autrement dit le projet de loi Macron, sera voté avant le 14 juillet par le Parlement. Et après ? Quelle est la feuille de route du gouvernement dans le domaine économique, sachant que la priorité de l'exécutif est toujours la même, c'est-à-dire faire reculer le nombre de demandeurs d'emploi et ce, le plus rapidement possible avant la fin de 2016 ? La réélection de François Hollande à la présidence de la République en dépend. La politique de l'offre en faveur des entreprises entamée en 2 013 sera-t-elle prolongée, amplifiée ? Elle se poursuivra... naturellement, le gouvernement ayant déjà pris ses dispositions. Tout est déjà voté et sera traduit dans le prochain budget.

En 2016, le taux du Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) continuera de monter en puissance et passera de 6 % à 9 % de la masse salariale pour les salaires inférieurs à 2,5 Smic. Pour les salaires allant jusqu'à 3,5 Smic, les cotisations familiales patronales seront abaissées de 5,25 % à 3,45 % à partir de l'an prochain. Les travailleurs indépendants et artisans ne sont pas oubliés. Dès cette année, ils bénéficient d'une baisse de plus de trois points de leurs cotisations familiales. La contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) assise sur le chiffre d'affaires sera réduite à partir de 2015 puis supprimée à l'horizon 2017. Le taux de l'impôt sur les sociétés, actuellement de 33,3 %, sera abaissé en 2017 et ramené à 28 % en 2020. Quant à la surtaxe de 10,7 % sur cet impôt, instaurée en 2011, elle sera supprimée dès 2016.

Les espoirs du patronat devraient être déçus

D'autres mesures permettant de réduire le coût du travail peuvent-elles être envisagées ? Le patronat l'aimerait bien. Mais ses espoirs devraient être déçus. À un an et demi des prochaines élections présidentielles, l'exécutif ne devrait pas prendre le risque d'annoncer d'autres baisses d'impôt en faveur des entreprises, considérées comme des cadeaux au patronat par les frondeurs socialistes et l'aile gauche de la majorité. La cohésion de celle-ci est en jeu. Faut-il rappeler que Matignon a dû dégainer l'article 49-3 de la Constitution à deux reprises pour faire adopter la loi Macron, au désespoir de la plupart des députés non socialistes et non frondeurs ?

Par ailleurs, les caisses de l'État sont vides et les objectifs en matière de réduction du déficit public sont élevés, Bercy ayant fait le pari d'abaisser le déficit public à 2,7 % du PIB en 2017. Augmenter la dépense fiscale, alors que le Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et le Crédit impôt recherche (CIR) coûteront plus de 15 milliards d'euros à l'État cette année, paraît donc hautement improbable, d'autant plus que l'État s'est engagé à réaliser 50 milliards d'euros d'économie d'ici 2017. Si cadeaux fiscaux il devait y avoir, ceux-ci concerneront les ménages, et encore pas avant 2017, « année blanche » annoncée pour la mise en oeuvre de la retenue à la source... si elle se fait. Cela ne fait jamais que la « énième » fois qu'elle est promise !

Recoller les morceaux avec les Verts

Néanmoins, les entreprises continueront d'être au centre des attentions du gouvernement, mais de façon plus discrète. Le choc de simplification réclamé par François Hollande en 2014 devrait s'amplifier jusqu'à la fin du quinquennat, au bénéfice des entreprises et des particuliers. La montée en puissance de la Nouvelle France industrielle (NFI, avec ses neuf solutions industrielles du futur qui remplacent les 34 plans Montebourg), le projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, qui entérinera notamment la fusion des instances représentatives du personnel et la simplification des seuils sociaux, viendront renforcer la politique de l'offre mise en place par le gouvernement (lire aussi pages 10 et 11 sur le volet social).

Ce devrait être également le cas du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Des mesures pour relancer le secteur de la construction, en plein désarroi, sont attendues et espérées par les professionnels du bâtiment et de l'énergie. Ce texte a des ambitions économiques, c'est certain. Mais il a également des visées d'ordre politique.

Avec ce projet de loi, le gouvernement entend surtout recoller les morceaux avec Europe-Écologie-Les Verts, un parti allié en 2012 mais avec lequel le divorce est aujourd'hui largement consommé.

Quant au projet de loi portant sur la Nouvelle organisation territoriale de la République (Notre) qui entérinera, le 1er janvier 2016, le passage de 22 à 13 régions, ses effets sont encore flous. Permettra-t-il aux régions de prendre en main leur avenir économique ? Les transferts de compétences étant flous, on peut raisonnablement penser que le colbertisme - l'omniprésence et l'omnipotence de Paris - continuera à prévaloir sur les sujets économiques au cours des prochaines années.

Une loi sur le numérique à l'automne

Compte tenu de ce programme très chargé, le gouvernement dispose-t-il encore d'une marge de manoeuvre pour engager un nouveau train de réformes ? Une loi Macron 2 est-elle envisageable ? Certaines déclarations ont pu un temps laisser croire qu'un second texte contenant une nouvelle série de réformes libérales était à l'étude. Depuis, cette hypothèse est écartée, le nombre d'articles du projet de loi Macron ayant, il est vrai, été multiplié par trois après les retouches effectuées par le gouvernement et les nombreux ajouts par amendements réalisés et votés par les parlementaires.

Reste maintenant à assurer le service après-vente de la loi Macron 1. Dans l'entourage du ministre, on explique :

« On ne tourne pas une page avec le vote et la promulgation du texte. Il faudra observer ses effets sur l'économie réelle et sur la société pour pouvoir rapidement faire quelques corrections au texte. C'est plutôt un phénomène inédit en France. Nous allons faire comme si ce texte avait une durée limitée et non plus illimitée. En procédant ainsi, nous espérons assurer l'efficacité de notre action dans le temps »

D'autres réformes pour libéraliser l'économie, plus ciblées et moins lourdes à mettre en oeuvre - la fenêtre de tir est étroite -, sont-elles en revanche envisageables ? Pour l'instant, Bercy reste évasif. Sachant qu'Emmanuel Macron a explicitement demandé lors de sa nomination à François Hollande d'avoir les coudées franches pour réformer l'économie, il est assez improbable que le jeune et fougueux ministre se contente d'attendre que les réformes déjà réalisées produisent enfin leurs premiers effets sur la croissance et l'emploi. De fait, il y aura bien un texte de Bercy à l'automne, sur le numérique et les entrepreneurs, porté par Axelle Lemaire, dont le ministre de tutelle est... Emmanuel Macron. Gageons qu'il devrait y apporter sa patte.

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Emmanuel Macron, un parcours de jeune homme pressé

Devenu en 2014, à 36 ans, le plus jeune ministre de l'Économie depuis Valéry Giscard d'Estaing, Emmanuel Macron est, depuis, sous les feux des projecteurs. Il agace autant qu'il séduit. Certes, tout le monde le reconnaît brillant, travailleur et, surtout, doté d'une très grande courtoisie. « On a du mal à s'engueuler avec lui, même si on est absolument pas d'accord sur le fond, tant il faut reconnaître qu'il est sympa », dit ainsi de lui un député frondeur.

Mais il a beaucoup de détracteurs.

D'abord, il n'est pas encarté au Parti socialiste, comme l'a fait remarquer le Premier secrétaire Jean-Christophe Cambadélis lors du congrès de Poitiers. Ensuite, il n'a jamais reçu l'onction électorale. Il est aussi accusé d'être totalement coupé des réalités sociales du pays, lui le pur produit de l'aristocratie de la haute fonction publique d'État. Il est aussi jugé maladroit, voire arrogant, dans son expression. Comme ce jour où, sur Europe 1, il traita « d'illettrées » les salariées licenciées de l'abattoir Gad. Même s'il s'en excusa platement.

Énarque de la même promotion que Sébastien Proto, le jeune Sarko-boy du camp d'en face, comme lui inspecteur des Finances, Emmanuel Macron a un point original sur son CV : un DEA de philosophie qui le conduit à être l'assistant de Paul Ricoeur.

À gauche, on lui a reproché son parcours de banquier d'affaires, chez Rothschild & Cie (comme Proto) où, en 2012, il a piloté l'une des plus grosses négociations de l'année (le rachat par Nestlé d'une filiale de Pfizer). Cette transaction, évaluée à plus de 9 milliards d'euros, lui aurait permis de devenir millionnaire... Repéré par Jacques Attali en 2007 (il fut rapporteur adjoint de la commission pour la libération de la croissance française), il se met au service de François Hollande.

Pendant la campagne de 2012, il avale quelques couleuvres, notamment quand le futur président de la République décide d'imposer à 75 % la part des revenus supérieure à un million d'euros. « C'est Cuba sans le soleil », dira-t-il non sans un certain humour. Il deviendra secrétaire général adjoint de l'Elysée et n'aura de cesse de faire entendre sa petite musique social-libérale, prônant une politique de l'offre, la réduction des déficits et des réformes structurelles, notamment du marché du travail.

En octobre 2013, il déclare au site Mediapart : « La gauche moderne est celle qui donne la possibilité aux individus de faire face, même aux coups durs. Elle ne peut plus raisonner en termes de statuts.

La société statutaire où tout sera prévu va inexorablement disparaître. »

Tout est dit...

Fabien Piliu
Commentaires 7
à écrit le 02/07/2015 à 16:46
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Usine à gaz en vue et pour quoi ? Pas grand chose, que de complication...

à écrit le 02/07/2015 à 14:22
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Vu comment a reagit le gouvernement avec uber et les taxis, c est pas gagné. Vous avez une corporation retrograde, impopulaire et qui vote tres majoritairement LR ou FN et le gouvernement c est couché alors qu il aurait pu faire un exemple en condamn...

à écrit le 02/07/2015 à 14:19
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Dans le dispositif de photos du journal,, Macron semble regarder à l'étage au dessus, celui de Christine Lagarde, et se dire que le poste serait confortable. Il lui donnerait le temps et le prestige de revenir postuler plus tard au titre de Président...

à écrit le 02/07/2015 à 13:33
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Impossible de réformer plus. Entre la droite qui refuse de toucher aux rentiers (taxis, pharmaciens, notaires) et une gauche du PS qui réclame le statut quo pour le droit du travail.... Ce gouvernement est coincé. Pourtant il a tenté de faire plus d...

à écrit le 02/07/2015 à 13:09
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L'affaire Macron, la vente de l'aéroport de Toulouse à un chinois, Macron Valls à la manoeuvre problème gravissime le chinois a disparu et il est recherché pour trafics divers et variés, personne ne sait ou est le pognon ! quel désastre c...

le 02/07/2015 à 15:03
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C'est la France qui vend et c'est le Chinois qui paie (normalement...)

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