Un échec téléphoné

L'introduction en Bourse du pionner américain de la téléphonie sur internet, Vonage, s'avéra bien la catastrophe annoncée. Certains clients pourraient décider de raccrocher...

La chose était entendue pour les spécialistes de valeurs high tech : le projet d'introduction à la Bourse de New York de Vonage, le pionnier américain de la téléphonie sur internet, sonnait comme un échec annoncé et le scénario peut apparaître d'ici, à distance, téléphoné... C'est l'histoire prévisible d'une start-up, qui n'a cessé de perdre de l'argent depuis sa création en 2001, venue panser son hémorragie de cash sur le marché. Elle parvient à lever plus de fonds (530 millions de dollars) que ses actionnaires initiaux ont injecté dans l'affaire en cinq ans en faisant miroiter les perspectives d'un marché certes porteur mais hautement bataillé. Et les investisseurs ayant répondu à l'appel vont devoir s'accrocher : en une semaine, l'action, vendue à 17 dollars, a déjà perdu 30% de sa valeur en dix jours de cotation...

Ce qui apparaissait comme l'opération du monde de l'internet la plus courue depuis Google, il y a deux ans, a donc démarré par un superbe "bug", qui plus est à double tranchant. Vonage a eu l'idée innovante et contestée de réserver une partie des actions mises en vente à ses clients et n'a pas ménagé ses efforts pour les enrôler, à coups de messages publicitaires saturant leurs boîtes vocales et en leur simplifiant immodérément la démarche : ils n'avaient besoin ni d'ouvrir immédiatement un compte titre s'ils n'en possédaient pas, ni même d'avancer l'argent. En cas de pépin, la société avait dû ainsi s'engager dans son prospectus officiel à rembourser directement les titres aux banquiers introducteurs si certains clients indélicats refusaient de les payer... Lorsque l'action a commencé à décrocher, certains heureux utilisateurs de Vonage devenus de malheureux actionnaires ont espéré pouvoir tout annuler : pourquoi payer 17 dollars une action qui n'en valait déjà plus que 14,85 dollars à la clôture de la première séance et 13 dollars le lendemain ?

La direction de Vonage s'est alors trouvé face à un dilemme cornélien : exiger le paiement et encourir des désabonnements à la chaîne de ces clients, représentant une minorité d'actionnaires, ou bien préserver ses affaires en usant d'un passe-droit au risque de courroucer la majorité de ses actionnaires, qui ne sont pas utilisateurs de ses services ? Après un silence radio de courte durée, Vonage s'est retranché derrière la loi et l'égalité de traitement des actionnaires, laissant même entendre qu'elles poursuivraient les mauvais payeurs... Les clients devront assumer leur piteux investissement financier, libres à eux de couper totalement le fil en se désinscrivant de Vonage. Les cabinets d'avocats "vautours" spécialistes des class actions les couvrent déjà d'appels à la mobilisation pour poursuivre la société. Certains parlent même de demander au gendarme de la Bourse américaine l'annulation pure et simple de l'introduction. L'entrée au Nyse de Vonage, qui devait accroître sa notoriété, lui a, il est vrai, surtout apporter beaucoup de mauvaise publicité. Saura-t-elle s'en relever ou devra-t-elle appeler à l'aide... et se faire racheter ?

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