🎞️ Festival de Cannes. Le reporter de TF1 Paul Larrouturou monte les marches pour la première fois. Il me raconte. Bien sûr, il avait déjà vu ça à la télé, mais sur place il est époustouflé par le faste et le décorum. Comme disent les Suisses : il est déçu en bien.

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🦋 Habitué du jean-baskets, il a chèrement loué pour l'occasion un costume bleu pétrole, avec surceinture, nœud papillon et souliers vernis. Les photographes crient son prénom : Paul ! Paul, vers moi ! Paul ! Sur le tapis rouge, il pose d'abord pour le versant est, puis pour le versant ouest (il y a des rangées d'appareils de chaque côté du tapis). Puis il gravit les escaliers sous le regard des badauds envieux et des caméras automatiques. Enfin, le Graal : la projection du film dans le plus bel écrin du monde : le grand théâtre Louis-Lumière, la fameuse salle du Palais, 2 300 places, écran géant de 19 mètres de large, haut de 8 mètres.

🤚 Pas si vite ! Dans le « bunker », un huissier contrôle son ticket et lui refuse l'entrée. Un malentendu ? Un quiproquo.

🛑 Son billet est seulement valable pour la montée des marches. Pas pour voir le film dans la grande salle. C'est écrit noir sur blanc : « Ne donne pas droit à une place en salle ». Il redescend, dans tous les sens du terme. Il voulait voir Furiosa. Il n'est même pas furioso. Il aurait pu voir le film au balcon, mais il ne l'a su qu'après.

🦬 C'est l'essence même du cinéma. Ce que constatent les figurants dans les villes de western : derrière la façade du saloon, il n'y a rien à boire. Juste des échafaudages.

Adèle Exarchopoulos tient le premier rôle féminin de L'Amour ouf, film de Gilles Lellouche présenté en compétition officielle jeudi soir.

Le lendemain, Le Figaro l'interroge longuement : « Qui est Jackie, votre héroïne ? »

💃 « Ce rôle, c'est la naissance d'une femme à l'écran. C'est dur de résumer ce personnage en quelques mots. C'est l'une de mes premières interviews. Je tâtonne un peu. » On voit par là qu'une interview ne consiste pas seulement à répondre aux questions, mais qu'il s'agit d'un travail à part entière, une construction, le storytelling, comme on dit à Hollywood. Le Figaro n'élude pas le sujet sensible : « Le Festival de Cannes s'annonçait sous de mauvais auspices cette année... »

🎭 Adèle Exarchopoulos : « Oui, on pensait que l'atmosphère serait étouffante. Et puis ça ne s'est pas passé ainsi. Le Festival capture comme un instantané du monde, dans sa violence comme dans son côté glamour ou sentimental. À Cannes, parler d'amour reste assez hypocrite. Pour être sincère, je suis plus honnête dans mes films que dans mes interviews. Tout le monde est un peu dans le contrôle. Ce n'est pas forcément du mensonge, mais nous sommes là pour défendre nos films. »

C'est la douane médiatique : elle déclare sincèrement son insincérité.

François Truffaut avait prévenu : « Les films sont plus harmonieux que la vie. Il n'y a pas d'embouteillage dans les films, il n'y a pas de temps mort. »

Sans transition, jeudi, l'émission C à vous (France 5) reçoit les stars du film Le Comte de Monte-Cristo, à commencer par Pierre Niney.

⏱️ Anne-Élisabeth Lemoine, habile, fait monter la sauce : « Un grand Monte-Cristo [...], ovationné pendant douze minutes, décompte officiel signé Pierre Niney, hier à Cannes, à l'issue de sa présentation en compétition. » Images de standing ovation, du comédien au bord des larmes. Retour au direct : « Pierre Niney, solaire en Edmond Dantès et d'une noirceur enivrante en Monte-Cristo, crève l'écran ! Tout comme Anaïs Demoustier. »

Tambours ! Trompettes ! Les deux déboulent en majesté sur le plateau, sous une mousson d'applaudissements. La comédienne se délecte : « Quel accueil ! Quelle chaleur ! »

⌚ Babeth Lemoine saisit la balle au bond : « Il y a eu un accueil dingue aussi hier soir pour ce grand Monte-Cristo ! » Elle mime une montre, et ressert l'anecdote chiffrée : « Douze minutes, vous avez chronométré, Pierre. »

Niney sourit : « Je n'ai absolument pas chronométré, vous venez de me l'apprendre... » C'est la magie de Cannes. Sa bienveillance. Cela ajoutera à la légende de l'acteur. Se non è vero, è ben trovato, comme disent les Italiens (« si ce n'est pas vrai, c'est bien trouvé »).

Tout serait donc faux dans le cinéma, cet art de l'illusion ?

Pas toujours. L'information qui suit est d'une importance capitale. Inattendue et essentielle.

🔬 Le magazine scientifique Epsiloon a publié en octobre un passionnant opuscule de 100 pages, épais comme un gros jeu de cartes : Fun science. Sous-titre : 100 faits amusants qui viennent d'être découverts dans les plus grands laboratoires du monde entier. Aussi étonnant que rigoureux. On y apprend que le métal de la dague de Toutânkhamon provenait d'une météorite tombée de l'espace ou que les singes préfèrent les émissions de télé-réalité (quand ils ont le choix des programmes).

🏆 Retour à Hollywood. Je découvre que les lauréats des Oscars vivent plus longtemps que les autres. Lisez plutôt : « Leur espérance de vie est actuellement de 81,3 ans, contre 76,4 ans pour les nominés, et 76,2 ans pour les acteurs de la même génération non sélectionnés par l'Académie des Oscars. C'est ce qui ressort du modèle statistique conçu par des chercheurs canadiens qui ont suivi 2 111 acteurs, dont 934 nominés, depuis 1929. Une différence d'environ cinq ans qui représente tout de même un bonus de près de 7 % de vie supplémentaire. »

Prodige physiologique ! Comment expliquer un tel écart ? Les chercheurs avancent deux hypothèses : « Les bienfaits psychologiques à long terme d'une telle récompense, ou par un statut social encore amélioré. »

🙏 La fiction ne dépasse pas la réalité. Mais elle la transcende.