Covid-19 : l'économie française dans la tourmente, la reprise s'annonce laborieuse

La Banque de France prévoit que le PIB français pourrait reculer de 10,3% en 2020 avant de rebondir à 6,9% en 2021. Les moteurs de l'économie française risquent d'être durablement affectés par la crise.
Grégoire Normand
Emmanuel Macron, en visite à l'usine Valeo d'Étaples (Pas-de-Calais) dans le cadre du plan de soutien à la filière automobile, le 26 mai 2020.
Emmanuel Macron, en visite à l'usine Valeo d'Étaples (Pas-de-Calais) dans le cadre du plan de soutien à la filière automobile, le 26 mai 2020. (Crédits : Reuters)

Les chiffres de la crise sont vertigineux. Selon les dernières prévisions de la Banque de France publiées ce mardi 9 juin, le produit intérieur brut (PIB) tricolore pourrait reculer de 10,3% en 2020, avant de rebondir à 6,9% en 2021 et 3,9% en 2022. La spirale récessive risque de faire des ravages sur le tissu productif français. La mise sous cloche de l'économie pendant deux mois a plongé un grand nombre de secteurs d'activité dans un épais brouillard. Depuis le 11 mai, beaucoup d'entreprises ont pu redémarrer dans des conditions parfois incertaines et d'autres sont restées paralysées comme dans la restauration ou l'hôtellerie.

Avec ces projections, même s'il reste de nombreux aléas, le scénario d'une reprise en V avec un rebond très rapide des moteurs de l'économie s'éloigne de plus en plus. "Il y a une assez nette reprise de l'activité au mois de mai. Le point bas de l'activité a sans doute été atteint au mois d'avril. La reprise va se poursuivre mais ce n'est qu'en 2022 que l'économie française devrait retrouver son niveau pré-crise de décembre 2019", a expliqué l'économiste et directeur général des études Olivier Garnier lors d'un point presse.

Au niveau mondial, les prévisions ne sont guère réjouissantes. Faute de traitements et moyens de protection suffisants, de multiples États ont mis en oeuvre des règles de restriction très drastiques. Après des semaines entières à l'arrêt, beaucoup de pays et secteurs ont pu redémarrer mais là encore, de nombreuses incertitudes subsistent.

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Chute historique de la demande intérieure

La mise à l'arrêt de pans entiers de l'économie française et l'inscription de millions de personnes au chômage partiel a entraîné un plongeon historique de la demande intérieure alors qu'elle représente un moteur majeur de l'économie tricolore. Elle pourrait chuter de 9,8% cette année avant de repartir à 7,8% en 2021 et 4,3% en 2022. De son côté, la consommation des ménages, qui représente une contribution positive à la croissance, devrait fortement se replier à 9,3% en 2020. "La consommation pourrait être considérablement affaiblie par la crise", signale la Banque de France.

Les foyers français ont privilégié l'épargne pendant les deux mois de confinement. Beaucoup d'économistes s'interrogent sur le comportement des ménages dans les mois à venir. Si la relance tarde à venir, les familles pourraient encore favoriser l'épargne de précaution, au détriment de la consommation. Les économistes de la Banque de France s'attendent à une explosion du taux d'épargne. "Conjugué à la résistance relative des revenus, leur taux d'épargne devrait donc très fortement augmenter. Il pourrait ainsi être proche de 20 % au premier trimestre et atteindre un pic de l'ordre de 30 % au deuxième trimestre, contre environ 15 % en moyenne sur l'année 2019". Au total, l'épargne des Français pour l'ensemble de l'année 2020 pourrait être supérieure à 100 milliards d'euros en 2020.

L'investissement en berne

Du côté de l'investissement (formation brute de capital fixe/FCBF), les indicateurs sont dans le rouge. Les dépenses d'investissement des ménages devraient s'infléchir de 24,5% en 2020 avant de redémarrer en 2021 (16,8%) et 2022 (6,9%). Chez les entreprises, les investissements devraient également refluer fortement (-23,3%) avant de retrouver des couleurs les deux années suivantes (17,4% en 2021 et 8,6% en 2022). Enfin, l'investissement public devrait également se replier en 2020 de 7,3% avant de connaître une embellie en 2021 de 4,6% et un coup de frein en 2022 (1%). Le choc de la demande sur l'économie française devrait faire des dégâts faramineux.

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Le spectre d'un chômage durable

La pandémie a déjà commencé à faire des ravages sur le marché du travail. Si le mécanisme du chômage partiel a permis de limiter la casse pendant le confinement, de grands groupes ont déjà annoncé qu'ils allaient fermer des sites et supprimer des emplois par milliers. Déjà, de nombreux intérimaires et contrats courts se retrouvent sur le carreau depuis des semaines et ces dégâts pourraient s'amplifier dans les semaines à venir. D'après les modélisations des statisticiens, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) pourrait grimper à 10,1% en 2020, 11,7% en 2021 et reculer à 10,4% en 2022. Les premières estimations de l'Insee rapportées par la Banque de France montrent que l'emploi salarié a reculé de 2,3% à fin mars par rapport à fin décembre 2019, soit une baisse de 453.800 poses, dont plus de 290.000 dans l'intérim. "Au quatrième trimestre 2020, le niveau de l'emploi serait inférieur de presque 1 million au niveau atteint fin 2019". Au total, l'économie française pourrait détruire 552.000 postes en 2020 et 355.000 en 2021.

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Recul du pouvoir d'achat

Le porte-monnaie des Français risque de se dégonfler. Les projections de l'institution bancaire signalent que le pouvoir d'achat du revenu des ménages se réduirait de 0,5% en 2020 (-0,7% par habitant). Cette moyenne masque évidemment des disparités. Les ménages les plus précaires devraient être en première ligne dans cette crise comme le souligne l'organisme bancaire. "L'ajustement du marché du travail devrait se faire initialement de façon plus prononcée sur les formes les plus précaires de contrats". Au final, le pouvoir d'achat des Français serait relativement épargné au regard du recul de l'économie. Si le chômage s'amplifie pour les plus fragiles, beaucoup de ménages pourraient se retrouver en fortes difficultés dans les mois à venir avec des risques d'insolvabilité et un possible "effet domino" sur le secteur bancaire.

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Une inflation relativement faible

Sur l'évolution de l'inflation, la Banque de France note que "pendant la période de confinement, il y a eu des divergences assez importantes . Il y a eu des hausses assez fortes sur des produits frais et des baisses sur l'énergie [...]. Sur le long terme, le glissement des prix pourrait être proche de 0 en 2020, voire négatif. Par la suite, le niveau de l'inflation serait proche de 1". "En dépit des coûts supplémentaires liés à la crise sanitaire, il y a un effet désinflationniste", ajoute Olivier Garnier.

Grégoire Normand
Commentaires 10
à écrit le 10/06/2020 à 10:04
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A quand le Covid fiscal ?

à écrit le 10/06/2020 à 4:21
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Voila ou mene la vision d'un ado mal fini immature: Dans le mur. Et ce minus a toutes ses chances pour remettre le couvert en 2022.

à écrit le 09/06/2020 à 20:09
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"La France est prête." "Les masques ne servent à rien." "Il n'y a jamais eu de pénurie de masques en France." Comme disait Raffarin :"to win, the yes needs the no to win against the no." Classe politique française = Covid19,5

à écrit le 09/06/2020 à 18:17
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La reprise française et bien là. Tous les prix de premières nécessités et autres augmentent. Le gouvernement LREM va nous dire qu'il n'y a pas d'inflation?

à écrit le 09/06/2020 à 13:33
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Pour Macron les blacks blocs , les dealers , les islamistes sont bien moins dangereux que les forces de l'ordre . Il est plus que temps de virer ce charlot en restant poli .

le 09/06/2020 à 14:07
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les forces de l'ordre et les ponctionnaires qui n'ont jamais rien foutu de leur vie sont le vrai blocage de notre société !!

à écrit le 09/06/2020 à 12:39
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avec le message du ministre de l'intérieur envoyé au banlieue annonce des beaux jours des trafics en tout genre et la mise hors jeux des polices et gendarmerie qui devrons pour combler. se retourner sur les automobilistes..

le 09/06/2020 à 14:08
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pour combler quoi ?? leur inutilité ???

à écrit le 09/06/2020 à 12:05
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"Beaucoup d'économistes s'interrogent sur le comportement des ménages..."!!! Soit ils ont "rien à foutre", soit ils sont incompétents. Ceci dit, ils sont "économistes", on peut pas non plus leur demander la Lune.

à écrit le 09/06/2020 à 12:00
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"Si vous ne trouvez plus rien, cherchez autre chose." B. Fontaine

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