Le Conseil d’Etat critique le véhicule législatif choisi par l’Etat pour sa réforme des retraites

Le Conseil d'Etat a donné son avis sur la loi sur la réforme des retraites dans une note. Plusieurs sources affirment que la haute juridiction alerte dans le gouvernement dans ce message d’un risque d'inconstitutionnalité de certains articles du fait de l’utilisation d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale choisi par le gouvernement pour faire passer plus rapidement la réforme souhaitée par Emmanuel Macron.
Le Conseil d'Etat se montre mitigé sur la constitutionnalité du projet de loi sur la réforme des retraite au sein du PLFRSS.
Le Conseil d'Etat se montre mitigé sur la constitutionnalité du projet de loi sur la réforme des retraite au sein du PLFRSS. (Crédits : Charles Platiau)

Le gouvernement est prévenu, la loi sur la réforme des retraites pourrait être retoquée en partie par le Conseil constitutionnel. Le Conseil d'État a adressé une note en ce sens au gouvernement le prévenant d'un risque d'inconstitutionnalité de certaines mesures de son projet de réforme des retraites, notamment concernant l'index seniors, a confirmé ce mercredi 22 février, des membres de l'exécutif à l'AFP, confirmant des informations du Point et du Monde.

Le gouvernement a en effet choisi comme véhicule législatif un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS), qui lui offre certaines armes, notamment pour encadrer la durée des débats au Parlement, au grand dam des oppositions. En contrepartie, les mesures du texte sont supposées avoir un impact sur les finances actées par le budget de la Sécu 2023.

Problème, plusieurs articles et propositions pourraient ne pas rentrer dans le cadre de ce véhicule d'après la haute juridiction. L'une des propositions pointées par le Conseil d'Etat est la création d'un index seniors, visant à mesurer l'emploi des salariés âgés par les entreprises. Des sanctions financières sont prévues en cas de non-publication de l'index. Or, selon le Conseil d'Etat, l'effet attendu sur les finances publiques en 2023 est incertain, et la disposition pourrait être censurée par le Conseil constitutionnel.

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Une stratégie critiquée par l'opposition et les syndicats

Bien avant que l'institution se prononce sur l'utilisation de se véhicule législatif, les critiques ont fusé contre le gouvernement. « Vous ne pouvez pas faire passer de façon escamotée ce texte sur les retraites, dans ce climat social », a argué le leader de la CFDT, Laurent Berger. Le patron des députés PCF, André Chassaigne, y voit, lui, « une manœuvre grossière, digne d'ennemis de la démocratie ». Un budget rectificatif sert à modifier les prévisions de recettes et dépenses de l'année en cours, pas à « imposer une réforme de fond », a déploré elle aussi Mathilde Panot, cheffe de file du groupe LFI accusant le gouvernement de vouloir passer en force et en vitesse la si contestée loi.

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Le gouvernement défend l'utilisation du PLFRSS

Interrogé, Matignon estime cependant que l'index seniors « a sa place » car « le produit de la pénalité viendra alimenter dès 2023 la Caisse nationale d'assurance-vieillesse ». Si cette mesure n'est pas acceptée par le Conseil constitutionnel, l'exécutif pourrait toutefois la réintroduire dans un projet de loi « plein-emploi » à venir au printemps. « Nous considérons que le texte a vocation à être valide du point de vue constitutionnel, je ne doute pas que des oppositions voudront saisir (le) Conseil constitutionnel pour vérifier », a déclaré ce mercredi 22 février le porte-parole du gouvernement Olivier Véran.

Parmi les autres mesures pointées du doigt par le Conseil d'Etat : l'annulation à partir de 2024 du transfert de recouvrement des cotisations du régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco à l'Urssaf. « Nous aurons la possibilité de l'intégrer dans le PLFSS pour 2024 », estime Matignon. Le Conseil a également alerté sur des mesures d'accompagnement des contractuels titularisés dans la fonction publique, et pour des visites médicales pour certains salariés exposés à des facteurs de risque. Plusieurs membres du gouvernement ont laissé entendre que certaines mesures, notamment sur l'emploi des seniors, pourraient figurer dans une autre loi. Le ministre du Travail Olivier Dussopt avait précisé que des propositions sur le travail de nuit et la pénibilité relèveraient « du niveau réglementaire ». Il a également évoqué le PLFSS 2024 pour certaines mesures concernant les femmes, sans spécifier lesquelles.

Si l'avis du conseil d'Etat semble donc plutôt défavorable à l'utilisation du PLFRSS, ce dernier ne pourra pas forcer le gouvernement à revoir sa loi. En revanche, le Conseil constitutionnel qui devrait se prononcer prochainement, en a quant à lui le droit.

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 22/02/2023 à 17:35
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Insérer des obligations d'ordre statistique (le fameux index "séniors") dans une telle loi est astucieux. Cela donne du grain à moudre au Conseil constitutionnel qui ne manquera pas de pointer cet écart, se détournant ainsi de l'essentiel : la réform...

à écrit le 22/02/2023 à 16:02
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Il serait plus sage de reprendre tout a l'endroit par sa réforme loi travail pour ensuite motiver sa réforme retraite, au lieu de mettre le souk au pays ! Mais il a tout faux avec sa politique financière !

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