Du bonheur dans le télétravail : le bien-être s'invite dans l'entreprise à distance

Après l'urgence, les négociations, puis la phase de l'adaptation, vient désormais l'étape de la « qualité de vie » en télétravail. Près d'un an après le début de la crise sanitaire du Covid, quels sont les nouveaux besoins des salariés dans leur quotidien ? Comment les satisfaire ? Rythmes, dialogue, management... L'Observatoire de la responsabilité sociale de l'entreprise vient de publier des recommandations pour mettre du bonheur dans le télétravail.
46% des salariés estiment que leur employeur n'a pas amélioré sa gestion du télétravail depuis le début de la crise, selon une enquête. Photo by Yasmina H on Unsplash.
46% des salariés estiment que leur employeur n'a pas amélioré sa gestion du télétravail depuis le début de la crise, selon une enquête. Photo by Yasmina H on Unsplash. (Crédits : Photo by Yasmina H on Unsplash)

> Dossier : « Télétravail : un progrès pour tous ? »

Avec la pandémie, le télétravail est devenu une routine pour un bon nombre de salariés français. A tel point que 64% des entreprises misent sur le basculement inévitable d'une grande partie de leurs collaborateurs en télétravail dans un futur proche, selon une enquête menée mi- janvier par « Génie des Lieux » auprès de 3.908 professionnels en France. Pourtant, la majorité de ces entreprises n'ont toujours pas trouvé la recette miracle pour concilier télétravail et bien-être. Une notion qui prend de plus en plus de valeur aux yeux des salariés, quand, 46% estiment que leur employeur n'a pas amélioré sa gestion du télétravail depuis le début de la crise, selon cette même étude. Comment les satisfaire ? L'Observatoire de la responsabilité sociale des entreprises (Orse) a publié fin février une liste de recommandations pour favoriser un télétravail « agile », qui participe à la « qualité de vie » des collaborateurs.

A noter que la question du bien-être s'était déjà posée aux patronat et syndicats lors de l'accord national en décembre. Mais d'après les experts en droit du travail cités par l'AFP, ce texte s'apparente plus à un « guide de bonnes pratiques » pour l'entreprise, n'apportant « rien de nouveau » au salarié.

Identifier les activités télétravaillables

La première étape recommandée par l'Orse consiste à distinguer les missions qui sont « télétravaillables » de celles qui ne le sont pas. Il préconise en outre « l'hybridation de l'organisation du travail » et des carrières, pour ainsi offrir plus de « flexibilité » aux collaborateurs, contrairement à un passage radical au télétravail à 100%.

Lire aussi : Les télétravailleurs se rendent plus disponibles pour signaler leur engagement

Dès lors, comment décider quels postes sont éligibles au télétravail ? Il faut tenir compte des « capacités technologiques » de chaque mission, note l'Observatoire. Ensuite, il suggère de prendre en compte « l'autonomie » propre à chaque collaborateur, en ne se limitant pas à son statut. Car en proposant aussi du télétravail aux salariés en temps partiel, l'entreprise améliore le sentiment « d'équité ». Enfin, il rappelle l'importance d'utiliser les fiches de poste pour étudier régulièrement « les postes jusque-là considérés comme non télétravaillables, à l'aune d'outils numériques toujours plus performants et de solutions collaboratives en constante évolution ».

« Les entreprises doivent veiller à l'étendre au plus grand nombre pour éviter de créer des inégalités », observe Géraldine Fort, déléguée générale de l'Orse.

Par ailleurs, le rapport attire l'attention des entreprises sur la possibilité de « proposer du télétravail occasionnel » pour répondre aux cas particuliers. Encore une fois, cela permet de prendre en compte les  « besoins personnels » des collaborateurs.

Proposer des lieux de travail tiers

Pour donner plus de liberté aux salariés, l'Orse appelle aussi les employeurs à « envisager toutes les possibilités pour travailler dans un autre lieu que celui de l'entreprise ». Précisément, cela peut prendre la forme d'un « second lieu de résidence » ou d'un « tiers- lieu (fablab, espaces de coworking...) ».

Pourtant, ces mesures manquent encore de popularité : si 62% des entreprises sont soucieuses d'améliorer leurs espaces de travail, seulement 9% autorisent leurs salariés à travailler dans des espaces de coworking aujourd'hui, selon la même enquête de « Génie des Lieux ».

Pour les convaincre de franchir le pas, l'Observatoire rappelle que des tiers-lieux « offrent un gain de temps de vie pour les travailleurs » à travers la réduction de « leur temps de trajet ». Par ailleurs, ils permettent de « travailler dans une ambiance chaleureuse et conviviale, qui permet d'éviter la solitude », ajoute l'organisation qui propose à ses membres des webinars ou des conférences sur la RSE.

Transformer les relations managériales

« Eviter la solitude » des salariés, cela passe aussi pour la transformation des modes de management à distance, pointe l'Observatoire. Mais pour le moment, moins de la moitié (48%) des entreprises ont réfléchi à les adapter, révèle l'étude « Génie des Lieux ».

Pour éviter que le salarié se sente surveillé, le rapport met en garde contre « la culture du présentéisme ». Au contraire, il recommande de fonctionner « par objectifs » et veiller à la répartition des charges de travail. Dans certaines équipes, la pandémie a été l'occasion de repenser les rôles de chacun et de renforcer la « cohésion » de groupe, note l'Observatoire. Il distingue par exemple les organisations qui ont fait émerger des figures fédératrices : certains collaborateurs ont organisé « des cafés virtuels pour remplacer ces petits instants d'échanges informels, de convivialité, et de pauses passées près de la traditionnelle machine à café ».

« Désormais, on évalue les collaborateurs à l'aune de leurs objectifs. En s'appuyant sur les outils numériques, les managers peuvent gérer leurs équipes à distance, » avance Géraldine Fort.

Les managers doivent également veiller à installer un climat de « confiance », rappelle l'Orse. Il salue à ce titre les managers qui « ont pris le temps d'appeler les collaborateurs et de prendre de leurs nouvelles, (...) de leur ressenti en termes d'autonomie, ou d'isolement ». Finalement, ces initiatives ont été perçues comme de la « bienveillance ».

Télétravail à durée déterminée

À travers ces différentes recommandations, l'Orse invite surtout à mettre en place un télétravail avec plus de « souplesse ». Il doit être capable de « répondre au mieux à des difficultés personnelles de salariés, avec des besoins (...) de conciliation entre leurs responsabilités familiales et leur travail ».

Pour les collaborateurs ayant justement des responsabilités personnelles plus contraignantes - les « salariés aidants » - le rapport propose un « télétravail à durée déterminée ». Il s'agit en fait de proposer, de manière temporaire, un télétravail renforcé pour leur « simplifier la vie ». Cette mesure peut également être étendue au reste des collaborateurs en cas d'accident ou de maladie dans leur entourage par exemple.

Ces mesures exceptionnelles permettent d'améliorer « l'équité » et la « qualité de vie au travail » des salariés, souligne ainsi l'Orse. À condition qu'elles ne soient pas « la somme des demandes individuelles mais bien un droit collectif permettant au plus grand nombre d'en bénéficier », rappelle-t-il.

Hiérarchiser les urgences

Autre tendance dans les recommandations formulées :  l'agilité. En ce sens, le télétravail doit pouvoir s'ajuster aux « scénarios de crise plus ou moins importants », aux « cas de force majeure » et aux « circonstances exceptionnelles »

Pour cela, le rapport préconise de détailler les modalités du télétravail dans le plan de continuité de l'activité (PCA), que l'accord national interprofessionnel appelait à mettre en place dans chaque entreprise en décembre 2020. Précisément, il s'agit de définir ses  « différentes formes (...) selon le besoin » et « des seuils de déclenchement », ajoute-t-il. Ces « seuils de déclenchement » peuvent dépendre de différents critères, comme  « le degré de gravité » ou « la probabilité de la durée de la crise ».

« Ce qu'il faut désormais, c'est pérenniser le télétravail dans les conditions normales d'activité et mieux l'anticiper en cas d'urgence, pour que le salarié ne le subisse pas, » justifie Géraldine Fort.

Ce strict encadrement permet surtout de rassurer le salarié : « plus les conditions de recours à un télétravail en cas de force majeure sont précises, moins les conditions d'exercice de ce télétravail sont dégradées », rappelle aussi l'Orse.

Réfléchir à la valeur du travail

Mais en plus de toute ces mesures, le télétravail interroge surtout le statut des travailleurs, alerte l'Orse. Le tététravailleur pourra-t-il toujours prétendre aux mêmes droits ? Qu'adviendra-t-il de la cohésion d'équipe si certains salariés peuvent y prétendre et d'autres non ?

L'ensemble de ces problématiques doivent être discutées en amont dans les entreprises, explique l'Observatoire. L'objectif est de continuer à assurer la protection et « l'égalité de traitement » des salariés.

In fine, l'Orse veut prouver aux entreprises que le télétravail peut être un jeu à somme positive. Les entreprises se rapprochent des « attentes des salariés en termes de conciliation vie privée - vie professionnelle, qui est de plus en plus considérée comme un avantage social en complément des questions de rémunération ».

« Le télétravail s'inclut complètement dans le volet social et sociétal de la stratégie RSE des entreprises. En respectant le droit à la déconnexion, cette pratique améliore la qualité de vie au travail. Dans le même temps, l'entreprise nourrit son attractivité » conclut Géraldine Fort.

Commentaires 2
à écrit le 03/03/2021 à 13:51
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Dans une période ou j'accompagne les salariés en tant qu'élu et syndicaliste, trop pour des licenciements, mais aussi beaucoup en télétravail , j'aurais aimé lire cet article.... c'est un gros sujet dans la période. Mais sinon, non, mon besoin n'est...

à écrit le 03/03/2021 à 8:48
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"Si nous nous sentons si bien au milieu de la nature c'est parce que celle-ci ne nous juge pas" Nietzsche

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