Amazon accuse des syndicalistes d'avoir intimidé des salariés pour qu'ils votent la création d'un syndicat

Malgré un vote majoritaire de salariés favorables à la création d’un syndicat dans l’un de ses entrepôts de New York, Amazon persiste contre cette mesure. Le géant américain devrait soumettre des objections au scrutin, estimant que des militants syndicalistes ont « menacé » et « intimidé » des employés pour les « forcer à voter oui ». Il a jusqu’à ce soir pour les déposer et fin avril pour les prouver. De leurs côtés, les syndicats accusent également Amazon d’avoir menacé de représailles les salariés.
Fin mars, les salariés d'un entrepôt Amazon à New-York ont voté pour la création d'un syndicat, une première aux États-Unis.
Fin mars, les salariés d'un entrepôt Amazon à New-York ont voté pour la création d'un syndicat, une première aux États-Unis. (Crédits : Pascal Rossignol)

Fin mars, l'entrepôt Amazon JFK8, situé dans le quartier de Staten Island à New York, est devenu le premier des États-Unis à voter pour la création d'un syndicat pour défendre le droit des salariés. Sur les 8.325 travailleurs de l'entrepôt présents sur la liste des votants, 4.852 salariés ont glissé un bulletin dans l'urne. Le "oui" l'a remporté à 2.654 voix contre 2.131.

Cela faisait plus de deux ans, que les travailleurs de cet entrepôt se mobilisaient pour réclamer plus de protection, notamment sanitaires face à l'épidémie de Covid. Mais la firme de Jeff Bezos ne voulait rien entendre. Et continue de se positionner contre cette mesure.

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D'après des documents officiels déposés jeudi 7 avril auprès de l'agence fédérale chargée du droit du travail (NLRB), Amazon a demandé plus de temps pour soumettre des objections étayées au scrutin. Le géant du commerce en ligne accuse notamment des militants du syndicat Amazon Labor Union (ALU) d'avoir « intimidé » des salariés du site pour les convaincre de le rejoindre. Amazon a jusqu'à vendredi soir pour soumettre ses objections, et jusqu'aux 22 avril pour présenter ses preuves.

Accusations réciproques

Dans son recours, Amazon entend développer plusieurs objections. L'entreprise considère que l'ALU a « menacé des employés pour les forcer à voter oui », que l'ALU a « fait campagne auprès des employés dans la file d'attente pour voter » ou les a « intimidés », et aussi que des militants de l'ALU « ont menacé des immigrants » en avançant le risque qu'ils perdent « leurs avantages sociaux s'ils ne votaient pas en faveur du syndicat ».

« C'est absurde », a réagi l'avocat Eric Milner au nom du syndicat. « Les employés se sont exprimés et leurs voix ont été entendues. Amazon choisit (...) de retarder le processus pour éviter l'inévitable : la négociation d'un contrat d'entreprise ». Et d'ajouter : « Amazon a dépensé des millions en consultants anti-syndicats, Amazon a organisé des réunions obligatoires, Amazon s'est comporté de manière menaçante, Amazon a licencié, illégalement, des employés pour avoir tenté de se syndicaliser ».

Deuxième employeur aux États-Unis après Walmart (distribution), le groupe avait depuis sa création en 1994 réussi à repousser les velléités des salariés souhaitant se regrouper dans le pays. Jusqu'à ce début 2022.

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Un autre entrepôt en attente de résultats

Un autre syndicat, le syndicat national de la distribution (RWDSU), fait des reproches similaires à Amazon dans le cadre d'un scrutin sur la syndicalisation d'un autre entrepôt, à Bessemer, dans l'Alabama.

Le vote est là-bas aussi terminé mais pas le décompte : le "non" mène pour le moment avec 993 bulletins, contre 875 "oui". Il reste encore 416 bulletins dits « disputés », qui décideront du résultat. Une audience doit décider dans les prochaines semaines si ces bulletins doivent être ouverts et pris en compte. Il pourrait ensuite y avoir d'autres recours légaux.

En attendant, le RWDSU a déjà déposé jeudi 7 avril une série d'objections auprès du NLRB sur le comportement d'Amazon, qu'il accuse d'ingérence. Selon l'organisation, les managers d'Amazon ont par exemple interdit les discussions sur le vote dans l'entrepôt, ainsi que les prospectus pro-syndicats dans les espaces de repos, tout en autorisant la documentation anti-syndicats. « L'employeur a instillé la confusion, la coercition et la peur des représailles chez les employés », assène le RWDSU dans son communiqué.

Amazon n'a pas réagi à une sollicitation de l'AFP. Dans l'Alabama, le NLRB doit organiser une audition sur ce recours du syndicat. Le vote qui s'est tenu en mars, par correspondance, a été organisé après l'annulation de celui d'il y a un an. L'agence fédérale avait en effet estimé qu'Amazon avait enfreint les règles.

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Joe Biden favorable aux syndicats

La président des États-Unis avait salué le 1er avril la création du syndicat par les salariés de l'entrepôt d'Amazon à New York. Joe Biden a ensuite livré un plaidoyer énergique en faveur des syndicats, mercredi 6 avril, en réservant une pique au géant de la vente par internet Amazon. « Selon moi, les syndicats sont là pour donner de la dignité et du respect aux gens qui travaillent dur », a dit le démocrate de 79 ans, qui fait régulièrement l'éloge du dialogue social, lors d'une conférence rassemblant des syndicats du secteur de la construction à Washington.

Rappelant avoir créé un groupe de travail à la Maison Blanche « pour assurer que la décision de se syndiquer appartienne aux salariés et à eux seuls », il a ajouté, en se penchant sur son pupitre et en affichant un sourire en coin : « D'ailleurs, Amazon, on arrive... ».

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(Avec AFP)

Commentaires 5
à écrit le 08/04/2022 à 15:54
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"Amazon accuse des syndicalistes d'avoir intimidé des salariés pour qu'ils votent la création d'un syndicat" Étonnant, car il y a deux ans c'était l'inverse Amazon se réjouissait que les salariés ne se soient pas laissé intimidé par les syndicats ...

à écrit le 08/04/2022 à 13:26
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Ah mais c'est sûr ! Tout comme ces sondages bidonnés qui disent que les salariés veulent être payés plus et travailler dans de bonnes condition non mais n'importe quoi, tout ça c'est complètement bidon hein des heu... des gens qui ne sont que des jal...

le 08/04/2022 à 16:59
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Bezos, (la guerre avec des armes en moins) n'est pas Poutine, mais sur le fond, c'est la même idéologie. Je fais ce que je veux, je ne veux pas d'opposition. Tout le contraire d'un démocrate. Hélas, dans le Monde, ce genre de personnage prolifère, c...

le 08/04/2022 à 17:00
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Bezos, (la guerre avec des armes en moins) n'est pas Poutine, mais sur le fond, c'est la même idéologie. Je fais ce que je veux, je ne veux pas d'opposition. Tout le contraire d'un démocrate. Hélas, dans le Monde, ce genre de personnage prolifère, c...

le 09/04/2022 à 9:52
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Heu... tu as fait le pari de placer poutine dans chacun de tes commentaires ? :-)

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