Coup d’Etat au Gabon : Eramet, TotalEnergies, Air Liquide, Air France... ces entreprises françaises qui ont misé sur ce petit pays d’Afrique centrale

Le Gabon subit à son tour un coup d'Etat. Une centaine d'entreprises tricolores s'est installée dans ce petit pays de l'Afrique centrale connu pour son pétrole, son bois et son manganèse. Parmi elles : le société minière Eramet, la major pétro-gazière TotalEnergies ou encore Air Liquide et Air France. Etat des lieux.
Le siège des opérations de TotalEnergies au Gabon à Libreville, la capitale du pays.
Le siège des opérations de TotalEnergies au Gabon à Libreville, la capitale du pays. (Crédits : Reuters Staff)

Mise à jour : article mis à jour à 17h55 avec la réaction d'Air Liquide

Après le coup d'Etat au Niger le 26 juillet dernier, c'est au tour du Gabon de connaître l'instabilité. Alors que la victoire du président sortant, Ali Bongo, venait d'être annoncée, une dizaine de militaires ont fait irruption à la télévision, dans la nuit du mardi 29 au mercredi 30 août pour décréter la « fin du régime ».

Le gouvernement français suit la situation au Gabon avec « la plus grande attention » a déclaré la Première ministre, Elisabeth Borne, lors d'un discours prononcé à l'occasion de la conférence des ambassadrices et des ambassadeurs à Paris.

Une centaine d'entreprises françaises

Au-delà des conséquences politiques et humanitaires, ce renversement pourrait aussi avoir des répercussions économiques. Au total, selon le site de l'ambassade de France au Gabon, quelque 110 entreprises tricolores sont présentes dans ce petit pays d'Afrique centrale situé sur la côte atlantique (2,3 millions d'habitants), connu pour son pétrole (il compte parmi les tout premiers producteurs d'or noir d'Afrique subsaharienne), son bois et son manganèse, le quatrième métal le plus utilisé dans le monde, notamment pour la fabrication de l'acier. Sur place, les groupes français génèrent quelque 14.000 emplois et réalisent un chiffre d'affaires évalué à 3,23 milliards d'euros.

Parmi eux, le groupe minier Eramet, la major pétro-gazière TotalEnergies, la compagnie pétrolière Perenco et le producteur d'hydrocarbures Maurel & Prom. Le géant des gaz industriels Air Liquide est également actif, tout comme Spie Oil and Gas, spécialisé dans les services à l'industrie pétrolière et gazière. Sont également présents Air France, l'amateur CMA CGM (propriétaire de La Tribune), mais aussi Bolloré Africa Logistics, Colas dans les travaux publics, le groupe Rougier, spécialisé dans la commercialisation de bois, ou encore le fonds d'infrastructure Meridiam et l'assureur Axa.

Le Gabon est le 76ème partenaire commercial de la France, selon une note du ministère des Affaires étrangères publiée en avril dernier. Il représente moins de 0,1% des exportations de la France dans le monde. En 2022, elles ont représenté 536,6 millions d'euros. Les principaux bien exportés sont les produits des industries agroalimentaires. La même année, les importations du Gabon vers l'Hexagone ont, elles, pesé pour 309,6 millions d'euros. Sans surprise, les hydrocarbures représentent le premier poste d'importations (67,6%), devant le secteur du bois, papier et carton (30%).

Les activités d'Eramet reprennent progressivement

Ce mercredi matin, le groupe minier français Eramet a annoncé que ses activités au Gabon avaient été de facto « mises à l'arrêt » suivant « une procédure prévue pour ce genre d'événement ». « C'est une suspension temporaire », affirme à La Tribune la société minière, déjà en difficulté en Nouvelle-Calédonie. Eramet a une filiale au Gabon appelée Comilog où elle extrait le manganèse. « C'est le seul pays où nous extrayons le manganèse », précise à La Tribune un porte-parole du groupe. Eramet se charge ensuite de le traiter et de le transformer au Gabon mais aussi aux Etats-Unis, en Norvège et en France. L'entreprise possède aussi la Société d'exploitation du Transgabonais (Setrag) concessionnaire du chemin de fer reliant Franceville à l'est du Gabon et Owendo sur la côte ouest du pays. En 2022, Eramet employait 8.767 personnes, dont 98% de Gabonais. Elle ne compte aucun ressortissant français. En Bourse, le cours de l'entreprise dévissait de 10% en début d'après-midi.

En fin de journée, la société a annoncé la reprise progressive de ses activités. « Compte tenu des informations disponibles ce soir sur les événements en cours au Gabon, le Groupe a décidé du redémarrage immédiat du transport ferroviaire et la reprise des activités d'extraction dès demain matin, jeudi 31 août », est-il précisé dans un communiqué.

La filiale de TotalEnergies décroche en Bourse

La major pétro-gazière a déclaré être mobilisée « pour assurer la sécurité de ses employés et de ses opérations, qui est sa principale priorité ». Le groupe emploie 350 salariés sur place. Il est présent au Gabon depuis plus de 80 ans dans l'exploration et la production d'hydrocarbures à travers sa filiale TotalEnergies EP Gabon, laquelle chutait en Bourse de 12% ce mercredi. La filiale est active sur les sites d'Anguille / Ile Mandji, Torpille et Baudroie-Mérou. En 2022, sa production s'est élevée à 17 milliers de barils d'équivalent pétrole par jour (kboepd). A titre de comparaison, la même année TotalEnergies a produit 204 kboepd au Nigeria. Au Gabon, TotalEnergies est aussi leader dans la distribution avec 45 stations-services déployées dans le pays. Soit une présence modeste puisque la major en dénombre 4.700 sur tout le continent africain. En 2022, TotalEnergies est également entré au capital de la Compagnie des Bois du Gabon (CBG) à hauteur de 49% pour développer un modèle de gestion forestière.

Maurel & Prom : pas d'impact sur la production

Toujours dans les hydrocarbures, le producteur Maurel & Prom a affirmé à l'AFP que la situation actuelle « n'affecte pas » ses sites d'activité « où les opérations se déroulent normalement, sans impact sur la production ». Le groupe a annoncé le 15 août dernier qu'il allait racheter à la société d'investissement Carlyle l'entreprise pétrolière Assala Energy, active au Gabon, pour 730 millions de dollars.

Air Liquide revendique plus de 200 clients

Le spécialiste des gaz industriels s'est implanté au Gabon dès 1954, avant qu'une filiale ne voit le jour en 1963. Aujourd'hui, Air Liquide Gabon revendique plus de 200 clients. Son siège est situé dans la capitale Libreville et couvre l'industrie minière, les travaux publics ainsi que les maîtres d'œuvre. Un second site, basé à Port-Gentil, est lui consacré aux entreprises du secteur pétrolier. Sur place, l'entreprise emploie une quarantaine de personnes mais ne compte aucun ressortissant français. « La sécurité du personnel est notre priorité absolue et nous avons mis en place les mesures nécessaires. Nous restons vigilants », assure Air Liquide à La Tribune.

Air France annule son vol quotidien

La compagnie française a récemment amorcé une remontée en puissance sur le Gabon après la crise du Covid. Les liaisons entre Paris et Libreville étaient en effet repassées en desserte quotidienne fin juin, retrouvant ainsi leur niveau d'avant la crise sanitaire. La compagnie déployait même un Airbus A350 le samedi, à la place des A330 habituels, pour renforcer sa capacité. Alors que les militaires putschistes ont annoncé la fermeture des frontières, et ce, jusqu'à nouvel ordre, Air France a décidé d'annuler sa rotation du jour entre Paris et Libreville.

Lire aussiCoup d'Etat au Gabon : une nouvelle pierre dans le jardin africain d'Air France

Du côté de l'assureur AXA, très présent au Gabon (près de 23 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022 et 16,6 % de part de marché), la décision a été prise de mettre les 70 collaborateurs en télétravail dès les premiers jours de manifestations (les salariés dont la fonction nécessitait une présence physique ont travaillé à mi-temps), un dispositif toujours à l'œuvre à ce jour.

Contactés par la rédaction, Meridiam, Colas, Spie Oil and Gas n'ont pas souhaité faire de commentaires sur la situation.

Commentaires 12
à écrit le 03/09/2023 à 1:20
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Les trois entités, France, politique française, et Quai d'Orsay, ont tous failli, à leur mission en matière de positive politique étrangère ! Ces dernières, se sont mises aux services des multinationales, peu respectueuses de ces pays d'investissemen...

à écrit le 31/08/2023 à 20:47
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Rien de moins que trois coups d'état qui portent atteinte à nos intérêts .Est ce un échec cuisant de notre diplomatie doublé d'une quelconque absence de vue et de prise en compte des enjeux de la part du pouvoir ? Certainement.

à écrit le 31/08/2023 à 9:32
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Certainement une des causes directes et indirectes de ce putsch.

à écrit le 31/08/2023 à 7:48
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L'Afrique s'éveille. Il faut revoir tous les contrats passes avec la france qui doivent être bénéfiques aux gabonais Autrement .....la porte .....

le 31/08/2023 à 9:33
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Aucune illusion, le général qui a obtenu ses médailles militaires aux puces à St Ouen va sûrement négocier des accords avec le gouvernement français et les entreprises resteront En contrepartie ,il obtiendra à son tour ,un appart à Paris et pourra me...

le 31/08/2023 à 9:38
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Commerce entre le Gabon et la France, moins de 600 millions d’ exportations pour un peu plus de 700 millions d’importations. C’est une goutte d eau ds le commerce français. Bonne chance pour les gabonais les militaires africains sont connus pour leur...

à écrit le 30/08/2023 à 18:02
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Bravo au Gabon il faut confisquer les biens des bongo et de ses proches en Afrique en Europe et aux usa... .. Il n'est jamais trop tard pour bien faire... La France en Afrique défend ses intérêts économiques et industriels aux travers de multinatio...

le 31/08/2023 à 17:35
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Ce sera comme d'habitude en Afrique pousse toi que moi aussi j'en profite.

à écrit le 30/08/2023 à 18:01
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Bravo au Gabon il faut confisquer les biens des bongo et de ses proches en Afrique en Europe et aux usa... .. Il n'est jamais trop tard pour bien faire... La France en Afrique défend ses intérêts économiques et industriels aux travers de multinatio...

le 01/09/2023 à 13:22
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C est vrai qu il faut mieux ce jeter dans les bras de la Chine et de la Russie qui sont , comme tout le monde le sait , des pays qui ne sont pas corrompus ... .

à écrit le 30/08/2023 à 17:49
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et de 2 cela devient bouillant en afrique ce n'est plus des cailloux dans la chaussure de macron mais des gros paves un sacre casse tete a gerer et des boites qui risque de faire la valise avant que cela s'enflamme tout cela ne va pas arranger le...

à écrit le 30/08/2023 à 17:29
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"Une centaine d'entreprises tricolores s'est installée dans ce petit pays de l'Afrique centrale connu pour son pétrole, son bois et son manganèse". Ben alors, "le mainstream" ambiant ne va plus trop pouvoir cacher sous le tapis les intérêts de caste ...

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