
[Article publié le mercredi 30 août 2023 à 13h15 et mis à jour à 15h40]
Après le Mali, le Burkina Faso et le Niger, c'est au tour du Gabon de subir à son tour un coup d'Etat. Ce mercredi, un groupe de militaires a annoncé mettre « fin au régime en place », s'opposant ainsi à la réélection d'Ali Bongo à la tête du pays la veille. Au-delà des conséquences politiques et humanitaires, cette série de renversements a aussi des répercussions économiques. C'est le cas pour Air France, pour qui l'Afrique de l'Ouest constitue un bastion. Or, celui-ci a aujourd'hui du plomb dans l'aile.
L'une des premières mesures des militaires putschistes a été d'annoncer la fermeture des frontières, et ce, jusqu'à nouvel ordre. Ils n'ont toutefois pas précisé si l'ensemble des frontières étaient concernées. Dans les faits, les autorités régulières avaient déjà fermé les frontières terrestres à l'occasion de la proclamation des résultats de l'élection présidentielle. En revanche, elles avaient laissé les frontières aériennes ouvertes. A l'heure actuelle, le site de l'aéroport de Libreville, la capitale gabonaise, n'affiche aucune information concernant les vols au départ ou à l'arrivée.
Les vols suspendus
Face à cette situation, Air France a décidé d'annuler sa rotation du jour entre Paris et Libreville. La compagnie a ainsi déclaré : « A la suite du coup d'Etat au Gabon et de la fermeture de l'aéroport de Libreville-Léon Mba (LBV), Air France a annulé les vol AF4140 et AF4141 du 31 août reliant respectivement Paris-Charles de Gaulle à Libreville et Libreville à Paris-Charles de Gaulle. »
La décision a été prise cet après-midi, après avoir pris le temps d'analyser la situation dans la matinée. Elle disposait d'un peu de temps, son vol au départ de Paris ayant déjà été décalé à cette nuit, 1h45, en raison du couvre-feu qui avait été imposé, là aussi, par les autorités régulières avant le putsch.
La compagnie doit désormais se pencher sur les suites à donner et notamment le maintien, ou non, de son programme de vol pour les prochains jours. Aucune information n'a été communiquée, pour l'instant, concernant un éventuel rapatriement de sa direction régionale en Afrique centrale, basée à Libreville.
« En lien avec les autorités françaises, la compagnie suit en permanence l'évolution de la situation géopolitique des territoires desservis et survolés par ses appareils et rappelle que la sécurité de ses clients et de ses équipages est sa priorité absolue. »
Un marché lucratif en reprise
S'il n'est pas encore possible de connaître l'impact définitif de ce coup d'Etat, il intervient au moment où la compagnie française a amorcé une remontée en puissance sur le Gabon après le Covid. Les liaisons entre Paris et Libreville étaient en effet repassées en desserte quotidienne fin juin, retrouvant ainsi leur niveau d'avant la crise sanitaire. La compagnie déployait même un Airbus A350 le samedi, à la place des A330 habituels, pour renforcer sa capacité.
Cette nouvelle avait été annoncée par Eric Louveau, le directeur régional d'Air France en Afrique centrale, à l'occasion d'une rencontre avec le ministre des Transports, Auguste-Roger Bibaye Itandas mi-juin. Objectif affiché, renforcer la coopération entre la compagnie et les autorités locales et mettre l'accent sur des prix jugés excessifs par les passagers.
La presse gabonaise annonçait alors que la liaison entre Libreville et Paris, en service depuis 70 ans, représentait 130.000 passagers par an, qualifiant ainsi le Gabon de « destination privilégiée » pour Air France, et comme l'une des 5 plus lucratives de son réseau. Le tout sans concurrence européenne ou américaine, avec seulement Ethiopian Airlines ou Turkish Airlines comme réels compétiteurs internationaux. Ces chiffres n'ont pas été confirmés par Air France, qui ne donne pas de détails sur son activité, pays par pays.
Un marché déjà touché à plusieurs reprises
Ce coup d'Etat gabonais vient ainsi s'ajouter à ceux du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Pour rappel, les vols d'Air France, vers et en provenance, de Bamako et Ouagadougou sont suspendus jusqu'au 10 septembre, tandis que ceux, vers et en provenance, de Niamey sont suspendus sine die. L'espace aérien nigérien est aussi fermé, ce qui allonge les temps de vol pour la compagnie, de 40 minutes vers Johannesburg (Afrique du Sud) et deux heures vers N'Djamena (Tchad).
Après avoir bien résisté pendant la crise sanitaire, faisant même office de destination refuge pour Air France-KLM, l'Afrique constitue une zone de croissance majeure. En 2022, l'Afrique (hors Afrique du Nord) et le Moyen-Orient étaient le troisième marché du groupe derrière l'Europe et l'Amérique du Nord, avec un chiffre d'affaires de plus de 3,2 milliards d'euros.
Et pour le premier semestre 2023, Air France-KLM a indiqué que l'Afrique présentait une « forte dynamique du trafic avec un coefficient de remplissage en hausse de 3 points par rapport à 2022. Le yield est robuste et en croissance de 6% par rapport à 2022 ». Cette dynamique semblait se retrouver notamment dans l'Afrique subsaharienne où le trafic dépassait dès l'an dernier son niveau d'avant la crise.
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