Un président pro-Trump à la tête de la République tchèque

Les électeurs tchèques ont voté en faveur du candidat et chef d'Etat sortant Milos Zeman. Cet homme conservateur et populiste a mené toute sa campagne sur des idées xénophobes et eurosceptiques.
Grégoire Normand
L'élection de Milos Zeman reflète la polarisation de la vie politique en République tchèque, entre un camp progressiste et libéral et un camp nationaliste et conservateur. Milos Zeman a été un des rares dirigeants européens à soutenir la candidature de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine de 2016.
L'élection de Milos Zeman reflète la polarisation de la vie politique en République tchèque, entre un camp progressiste et libéral et un camp nationaliste et conservateur. Milos Zeman a été un des rares dirigeants européens à soutenir la candidature de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine de 2016. (Crédits : STRINGER)

Malgré sa réputation sulfureuse, Milos Zeman a été réélu président de la République tchèque en devançant samedi au second tour de l'élection présidentielle son rival pro-européen Jiri Drahos. Le chef de l'État sortant totalise 51,4% des voix et Jiri Drahos 48,6%. "Je voudrais féliciter le vainqueur de l'élection, Milos Zeman", a déclaré Jiri Drahos, universitaire de 68 ans, à ses partisans rassemblés dans la capitale, Prague.

Ce résultat illustre la profonde division de la société tchèque entre ceux qui ont profité de la transformation du pays depuis que cette république parlementaire a rejoint l'Union européenne en 2004 et les laissés-pour-compte de cette intégration. " Cette élection confirme ce que nous avions vu lors des dernières élections parlementaires [au mois d'octobre, Ndlr]. La société est scindée" expliquait l'universitaire Petr Just, de la Metropolitan University de Prague interrogé par le Financial Times.

Un président pro-trump

Milos Zeman est un des rares présidents européens à être favorable à l'actuel chef d'État américain. Il a à plusieurs reprises soutenu la candidature de l'ancien présentateur de téléréalité et sa politique migratoire à l'encontre des musulmans.

M. Zeman est également un fervent soutien de la Russie de Vladimir Poutine. Pour l'universitaire Michal Koran, membre de l'institut Aspen, un think tank basé à Prague, "les Russes ne peuvent pas être plus heureux". Le chef d'État réélu a d'ailleurs reçu les félicitations du dirigeant russe, Vladimir Poutine.

"Les résultats des élections confirment la grande autorité de M. Zeman en tant qu'homme politique expérimenté et responsable, réalisant les intérêts et les aspirations du peuple tchèque", a écrit le président russe, selon un communiqué du Kremlin cité par les agences de presse russes. "Vladimir Poutine a souligné que la Russie apprécie la position de M. Zeman en faveur du développement des relations d'amitié russo-tchèques et d'une coopération mutuellement bénéfique dans plusieurs domaines", a ajouté le Kremlin.

Une alliance avec l'oligarque Andrej Babis

Au début du mois de décembre dernier, le milliardaire Andrej Babis a été nommé Premier ministre par Milos Zeman. Cette nomination controversée ne devrait pas faciliter le dialogue avec les institutions européennes. En effet, ce redoutable homme d'affaires a été mis en examen en 2017.  Il est soupçonné d'avoir dissimulé, il y a une dizaine d'années, qu'il était propriétaire d'une ferme ultramoderne baptisée "le Nid de cigognes", ce qui lui aurait permis de bénéficier de subventions européennes réservées aux petites entreprises. Pour celui qui a fondé le mouvement ANO (pour Action des citoyens mécontents, mais qui signifie aussi "oui " en tchèque) en 2011, la réélection de Milos Zeman constitue une nouvelle chance de se protéger.

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Le president tcheque va renommer babis au poste de premier ministre

Le Premier ministre tchèque Andrej Babis. Crédits : Reuters.

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Lire aussi : République Tchèque : un oligarque controversé favori des élections

L'immigration au centre des débats

Le résultat de ces élections a mis en exergue quelques surprises. Le politologue Petr Just explique que :

"Ce qu'il y a de paradoxal est que Milos Zeman est celui qui a attiré les votes des forces "antisystème"  alors qu'il est dans la vie politique depuis 30 ans, alors que M.Drahos, qui est un novice, est celui qui a obtenu le plus de faveurs des gens qui soutiennent les partis politiques traditionnels".

 Si ce paradoxe peut paraître surprenant à première vue, les positions de l'homme de 73 ans sur l'immigration peuvent permettre de comprendre en partie les résultats de cette élection. Cet homme, réputé pour son addiction à l'alcool fort, s'est exprimé régulièrement contre l'arrivée des migrants et des réfugiés en Europe et a tenu à plusieurs reprises des propos contre l'islam. Pour le Guardian, le résultat de cette élection est une victoire pour les forces d'extrême droite et les partisans de la xénophobie. Lors de sa campagne, il a régulièrement critiqué la politique des quotas de demandeurs d'asile mises en place par l'Europe. Pourtant, les statistiques de la Commission européenne indiquent que la République tchèque a accordé peu de demandes d'asile. En 2016, l'administration tchèque avait validé 450 demandes d'asile au total ou 45 par million d'habitants. Un chiffre bien inférieur à la moyenne européenne qui se situe à 1.390 par million d'habitants.

Une relation compliquée avec l'Europe

La victoire de Milos Zeman pourrait troubler les relations avec les institutions européennes. La crainte de plusieurs observateurs est qu'il propose un référendum sur le modèle du Brexit. "Ce n'est pas juste une victoire du populisme sur le libéralisme en République tchèque. C'est aussi le signe qu'une partie de la population tchèque veut être protégée" explique l'expert Milan Nic du German Council on Foreign Relations.

" La victoire de Zeman est une autre étape du changement d'attitude des pays d'Europe centrale vers l'Union européenne et c'est aussi le signe qu'il n'y pas beaucoup de leaders dans cette région qui sont des partenaires faciles avec l'Europe occidentale. Ce qui pourrait accroître les divisions entre les pays d'Europe de l'Est et les pays d'Europe de l'Ouest".

L'arrivée de l'extrême droite au pouvoir en Autriche en décembre dernier pourrait effectivement renforcer les divisions dans une Europe encore fragile malgré une conjoncture économique plus favorable.

> Lire aussi : Autriche : l'extrême droite s'installe au pouvoir dans l'indifférence ?

Grégoire Normand
Commentaire 1
à écrit le 29/01/2018 à 14:32
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Ah si grâce à TRump tous les pays d'europe de l'est pouvaient quitter l'europe il est évident que nous autres citoyens victimes du dumping social que l'europe nous impose via son travail détaché, lui en serions particulièrement reconnaissant. L'a...

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