[The Village-Atelier#2] L'agriculture autrement : produire mieux, se nourrir bien

Mieux comprendre les alternatives agricoles, tel est l'objectif du deuxième atelier préparatoire à l'événement annuel "The Village, changer le monde organisé" en août prochain à Saint-Bertrand de Comminges par La Tribune et INCO. Deux acteurs de la transition alimentaire ont présenté leurs initiatives et échangé avec le public de change-makers : la Ruche qui dit Oui ! et Ferme France, représentées respectivement par Hélène Binet et Maximilien Rouer.
Atelier The Village#2 avec Hélène Binet de La Ruche qui dit Oui et Maximilien Rouer de Ferme France, lundi 16 avril chez INCO.
Atelier The Village#2 avec Hélène Binet de La Ruche qui dit Oui et Maximilien Rouer de Ferme France, lundi 16 avril chez INCO. (Crédits : DR)

« Le modèle agricole du XXIe se situe dans une impasse écologique, sanitaire et économique. Il contribue au réchauffement climatique. Il appauvrit les sols, engendrant une diminution des surfaces agricoles alors que la population mondiale augmente. Il cause des dommages irréversibles à la biodiversité et à l'humain, par l'utilisation de produits chimiques. Et il paupérise les agriculteurs français, tout en diminuant sa contribution au PIB national », observe Giulietta Gamberini, journaliste à La Tribune et modératrice de l'atelier. Pour réagir à ces constats, des acteurs du changement développent de nouveaux paradigmes. Depuis 2011, La Ruche qui dit Oui ! valorise le circuit court dans 9 pays européens. Son réseau de vente directe de producteurs locaux à consommateurs compte en France 850 ruches, 5 000 producteurs et 200 000 consommateurs. Ce modèle profite aussi bien aux consommateurs, qu'aux producteurs et à l'environnement. La production de gaz à effet de serre est limitée. La fraîcheur des produits cueillis la veille ou le jour même permet une conservation optimale des vitamines et des nutriments. La définition des prix finaux par les producteurs, dont 80% leur revient contre 6,2% normalement, engendre une augmentation de leurs revenus. Et cette initiative créée du lien entre producteurs et consommateurs tout en donnant des outils d'émancipation aux consommateurs en tant qu'acheteurs voir même organisateurs de ruche.

Valoriser les initiatives positives

De son côté, la très jeune association Ferme France s'engage pour la transparence des produits. « En créant un système de notation pour l'ensemble des produits agricoles vendus, explique Maximilien Rouer, nous permettons aux consommateurs de comprendre ce qu'ils achètent. Et de choisir en fonction des critères de performance sociétale qui les importent, que ce soit dans le domaine de l'environnement, du bien être animal, de la santé ou du bien commun notamment. » Du côté des acteurs du secteur agricole, cette notation aux entrées multiples va permettre « de valoriser les initiatives positives qui sont parfois mal identifiées et les inciter à aller encore plus loin dans leurs démarches ».

Dans un marché mondialisé où la course à la production à bas prix est une norme, comment la France peut-elle tirer son épingle du jeu ? « La France perdra à coup sure puisqu'il y aura toujours des pays qui produiront à des coups encore plus bas, constate Hélène Binet. Elle doit donc se placer sur le terrain de l'excellence. » Maximilien Rouer le confirme, « à chaque pays son modèle agricole. Le notre, qui est celui des petites exploitations, est fondé sur la qualité et la diversité. Il faut valoriser nos atouts ». Mais la qualité des produits et des rémunérations décentes nécessitent des prix plus élevés que ceux pratiqués par la grande distribution. La population française est-elle prête à dépenser plus ? Comme le rappelle Giulietta Gamberini, deux tiers des français se disent prêt à payer plus cher pour manger mieux. Pourtant, le budget des ménages consacré à l'alimentation est en baisse, passant de 35% en 1960 à 20% actuellement. « Il faut se demander pourquoi nous mangeons et qu'est ce qui est important pour notre bien être. Un smartphone ou de la nourriture ? », suggère Hélène Binet. « Et il faut changer notre alimentation en réduisant notamment la viande au profit des céréales et des légumineuses. » La réussite de cette transition économique passent donc par un changement des mentalités qui nécessite transparence et action éducative. « L'éducation est un enjeu important, confirme Jean-Christophe Tortora, Président de La Tribune. Les enfants sont les premiers ambassadeurs et influenceurs ».

L'urgence de la transition

Parmi les nombreux échanges avec le public, la question du rôle des pouvoirs publics est soulevée. « La France est touchée depuis 20 ans par la déflation, explique Maximilien Rouer. Au début, seuls les agriculteurs perdaient de l'argent. Mais maintenant qu'elle nous touche tous, tout le monde est sensibilisé sur l'urgence de cette transition. Le gouvernement a d'ailleurs lancé les Etats généraux de l'alimentation. » Jean Christophe Tortora témoigne de l'engagement des collectivités territoriales. « La Tribune a récompensé la démarche de la ville d'Albi qui s'est donnée comme objectif l'autosuffisance alimentaire à l'horizon 2020 ». Hélène Binet suggère enfin que « les collectivités territoriales agissent d'une part sur le foncier afin d'aider des agriculteurs à s'installer et d'autre part sur les restaurations collectives afin de favoriser le bio et le local. » « Il faut s'unir, conclut Hélène Binet. Les circuits courts doivent s'organiser entre eux en créant des outils communs, comme le fait la grande distribution depuis l'après guerre. » Une ambition que partage Ferme France.

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