4 questions autour de "l'avion vert"

Le secteur de l'aviation, qui s'est engagé à réduire de moitié ses émissions de CO2 en 2050, va devoir lever un certain nombre d'obstacles pour atteindre cet objectif. Le gouvernement français veut par exemple voir voler dans le ciel un avion propulsé par l'hydrogène d'ici à 2035.
Maveric, le projet d'aile volante d'Airbus, présenté en ouverture du salon aéronautique de Singapour, en février 2020.
"Maveric", le projet d'aile volante d'Airbus, présenté en ouverture du salon aéronautique de Singapour, en février 2020. (Crédits : Airbus)

Sous la pression de l'opinion publique depuis des mois pour ses émissions polluantes, le transport aérien a devant lui une longue route vers un avion propre, avec des caisses désormais vidées par la tempête du Covid-19.

  • Quelles émissions et quels engagements pour réduire les émissions de CO2?

L'aviation représente environ 2% des émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2), selon l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).

Un total de 4,5 milliards de passagers (+4,2%) ont été transportés en 2019 dans le monde, selon l'Association internationale du transport aérien (Iata).

Avant la pandémie, le secteur s'était engagé à réduire de moitié ses émissions de CO2 en 2050 par rapport à 2005, alors même qu'il tablait parallèlement sur un doublement du trafic dans les 15 à 20 ans. L'Iata affirme qu'il tiendra cet engagement.

Lire aussi : Le plan d'Air France pour compenser 100% de ses émissions de CO2 (pour ses vols intérieurs)

Selon un rapport publié en janvier par trois organisations européennes, dont l'Agence de l'environnement AEE, les émissions dues au secteur sur le continent augmentent, même si les progrès technologiques ont permis de compenser en partie l'effet de la croissance du trafic.

Ainsi, le nombre de passagers des vols commerciaux a augmenté de 20% entre 2014 et 2017 en Europe et les émissions de CO2 de 10% selon ce rapport.

  • Quel impact du coronavirus?

Mises à l'arrêt et financièrement exsangues, les compagnies ont accéléré la sortie de leur flotte des avions les plus anciens et donc les plus polluants.

"Même si la capacité à financer le renouvellement d'avions des compagnies est plus faible -et elles vont chercher à retarder le renouvellement- elles ont de toute façon des surcapacités qui vont les amener à sortir de leur flotte leurs avions les plus vieux et les moins performants. [...] Cela va améliorer la performance moyenne de la flotte", commente Bertrand Mouly-Aigrot, expert en transport aérien au cabinet Archery Strategy Consulting.

La compagnie américaine Delta Airlines a ainsi mis un point final à la carrière du biréacteur MD-90, Lufthansa et Air France ont abandonné plus tôt que prévu leurs A340 et A380, gros porteurs gourmands en kérosène et pollueurs. La compagnie française a en outre dû prendre des engagements fermes de réduction de ses émissions polluantes en contrepartie de l'aide de l'État.

Lire aussi : La France soutient Air France à hauteur de 7 milliards d'euros : "ce n'est pas un chèque en blanc", dit Le Maire

La reprise du trafic pressentie comme très lente fera baisser mécaniquement les émissions du secteur, qui ne devrait pas retrouver son niveau d'activité de 2019 avant 2023.

  • Comment réduire les émissions?

Chaque nouvelle génération d'avion permet de réduire l'empreinte carbone de 15%, constate-t-on dans le secteur.

Moteurs moins gourmands, matériaux plus légers... "On considère qu'on gagne 1% de technologie par an", selon le patron du motoriste Safran Philippe Petitcolin.

Un rythme insuffisant pour tenir les engagements pour 2050. Il va donc falloir trouver des ruptures technologiques.

La propulsion électrique grâce à des batteries n'est pas envisageable, leur poids les disqualifiant. Les biocarburants, issus de la biomasse notamment, existent déjà mais leur coût est encore bien trop élevé par rapport au kérosène, qui est l'un des premiers postes de dépenses des compagnies aériennes.

Lire aussi : Aviation sans CO2 : oublions l'avion électrique, la solution est ailleurs, dit Safran

Restent la propulsion hybride et l'hydrogène. C'est la voie choisie par le gouvernement français, qui pousse la filière aéronautique à développer un avion régional à propulsion hybride, qui devrait entrer en service à la fin de la décennie et permettrait de diminuer de 30% les émissions de CO2, puis d'un "moyen-courrier décarboné" pour 2035, fonctionnant à l'hydrogène.

Lire aussi : L'Allemagne ambitionne de devenir "numéro 1 mondial" dans l'hydrogène

Jérôme Bouchard, expert en aéronautique au cabinet Oliver Wyman "croit beaucoup à l'hydrogène comme moyen propulsif mais ce ne sera pas la seule condition du développement de ce nouvel avion". Il faudra également "revoir les formes aérodynamiques" (ailes, fuselage) de l'appareil, l'hydrogène nécessitant des espaces de stockage quatre fois à six fois supérieurs aux réservoirs de kérosène.

  • Quels autres moyens?

Une meilleure coordination du trafic aérien et l'optimisation des trajectoires d'appareils mieux connectés entre eux et avec le contrôle aérien au sol peut permettre des gains en carburant et en émissions de CO2 de 10% dès 2023, assure le groupe de technologies Thales, qui planche sur ces sujets.

Au sol, un moteur électrique fixé au niveau du train d'atterrissage, pour que l'avion roule sans avoir recours aux réacteurs et donc économise du carburant, a été mis au point par Safran, mais pas adopté pour l'heure par les avionneurs.

Lire aussi : Airbus refuse le système de roulage électrique des avions de Safran

Pour Michael Gill, directeur environnement de l'Iata, "les avions zéro-émission finiront par arriver, mais si on est réaliste, ce sera dans la seconde moitié de ce siècle que nous les verrons vraiment décoller".

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Commentaires 14
à écrit le 21/06/2020 à 7:08
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L'avion a hydrogène c'est du rêve de personnel politique.

à écrit le 20/06/2020 à 19:03
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Un avion vert... à part la couleur de la peinture...je ne vois pas.

à écrit le 20/06/2020 à 8:32
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>> L'aviation représente environ 2% des émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2), selon l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).<< Il est beaucoup plus pertinenet de mettre en regard les consommations en France: En 2018 le...

à écrit le 19/06/2020 à 22:20
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On peut surement passer au gpl, le pb étant les cuves mais ça peut se résoudre car le gpl c'est 40% de co2 en moins, la fumée que vous voyez sur les gpl en hiver c'est de la vapeur d'eau. Reste aussi les avions plus petits; 100 places pouvant être d...

à écrit le 19/06/2020 à 21:14
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Sans un carburant aussi performant et aussi peu cher que le pétrole, le transport aérien pour du transport de masse, c'est "râpé". Doit on s'en plaindre ?

à écrit le 19/06/2020 à 19:35
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On ne pourra espérer un avion avec un carburant 100% vert, dc ss rejet de CO2 que si le carburant utilisé est stocké en phase liquide ds des réservoirs d'encombrement proche de ceux stockant le kérosène, permettant des puissances volumiques analogues...

à écrit le 19/06/2020 à 13:33
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Projet ambitieux, méritoire!... Pour mémoire les Soviétiques ont fait voler le 15 avril 1988 Tupolev 155 le type d'avion que le gouvernement français prévoit pour 2035...

le 19/06/2020 à 19:48
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Juste pour rigoler, intéressez vous à la place prise par le réservoir d'Hydrogène dans le Tu en question, il ne restait pas beaucoup de sièges pour les Pax...quant à l'autonomie.....

à écrit le 19/06/2020 à 13:18
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L'hydrogène pure est aussi instable que de la TNT. Il suffit de voir le nombre de fusées qui ont pété malgré les extrêmes précautions prisent. Je ne monterais jamais dans un véhicule à hydrogène. Il faut créer un carburant de synthèse stable et écono...

à écrit le 19/06/2020 à 11:59
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En faisant en sorte qu’il soit possible de mettre une piste dans un sens et l’autre dans l’autre sens qd le vent le permet ( par ex doublet nord face à l’E et sud face à l’W à CDG) on gagnerait 100kms de trajet pour en gros un avion sur 2. Si on veut...

le 19/06/2020 à 19:49
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Donnez nous l'adresse de votre fournisseur, visiblement, c'est de la bonne.

à écrit le 19/06/2020 à 9:43
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Un avion ne sera jamais vert. Titre en greenwashing - il est indiqué que le bio carburant est plus cher que le kérosène, qui lui est largement subventionné ! - le biocarburant est une ineptie environnementale : il prends de la surface cultivable ...

le 19/06/2020 à 11:03
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Pareil pour les bagnoles, les équipements électroniques dont, et surtout, internet et ses fermes à serveurs faussement perdues dans les nuages, les routes goudronnées, le transport maritime, le chauffage, l'agriculture industrielles ou plutôt l'indus...

le 19/06/2020 à 12:12
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Certe, le transport aérien ne représente que peu de pollution, mais elle est principalement utiliser par une frange de la population très riche. Des statistiques françaises nous disent que seul 10-15% de la population prend l'avion. Et surtout pour a...

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