Luxe : qui sont les "gagnants" et les "perdants" d'une année 2015 tourmentée ?

En dépit des attentats en France et en Belgique et du ralentissement chinois, les grandes marques de luxe européennes restent largement bénéficiaires. Dans le détail, toutes les catégories de produits et acteurs ne sont pas logées à la même enseigne.
Marina Torre

Les magasins de luxe attirent peut-être une foule moins nombreuse qu'auparavant depuis les attentats. Mais les investisseurs restent aux aguets. Ainsi, le titre LVMH, qui a publié le 12 avril des résultats trimestriels inférieurs aux attentes pour la mode et la maroquinerie, fait-il partie des plus prisés du CAC 40 au lendemain de cette annonce.

"L'environnement est très difficile en raison des attentats. Les magasins à Paris enregistrent des baisses de fréquentation à deux chiffres chez Louis Vuitton. Mais malgré tout, hors Donna Karan, la croissance atteint 2% sur la mode et la maroquinerie? Je dis j'achète!", commente Caroline Reyl, gérante du fonds Pictet-Premium Brands, lors d'une conférence.

>> Avant les attentats, Paris avait détrôné Hong Kong comme capitale du luxe pour les Chinois

Nike sous les projecteurs

Dans une étude parue ce 13 avril, cette dernière observe plus largement la bonne tenue du secteur du luxe en 2015 avec des taux de marges qui restent très élevés (taux Ebitda proche de 20%), et des trésoreries généralement dans le vert.

Parmi les grands "gagnants" du moment, le gestionnaire d'actifs distingue surtout Nike, classée parmi numéro 1 de ses marques "premium", et qui se placerait aux avants-postes sur le marché en plein essor de la mode "sport" et "lifestyle.

Le numéro un mondial des articles de sport, régulièrement cité comme "modèle" en matière de rénovation de son concept, suscite semble-t-il énormément d'attentes sur les marchés. Au point qu'il suffit de quelques indicateurs contradictoires pour qu'il suscite des "déceptions". C'est ce qui s'est produit lors de la publication de ses résultats trimestriels le 23 mars. En dépit d'un bénéfice en hausse de 20% et d'une forte hausse de ses ventes en Chine, des résultats mitigés en Amérique latine sembleraient l'avoir pénalisé aux yeux d'une partie des analystes.

Le numéro un du luxe n'est pas le seul à avoir tiré son épingle du jeu. Le 23 mars, Hermès a ainsi annoncé avoir frôlé le milliard d'euros de profits. De quoi gâter ses actionnaires.

L'horlogerie en perte de vitesse

A plus long terme, la croissance, toujours présente, tend à se stabiliser à un niveau plus bas qu'auparavant sous l'effet de "l'atterrissage" chinois. Le secteur de l'horlogerie, en particulier à Hong Kong, reste très affecté par des lois anti-corruption. En outre, l'an dernier, les groupes de luxe suisses en particulier ont eu à essuyer les effets de la suppression du taux plancher du franc suisse face à l'euro. Touché de plein fouet, le groupe Richemont réorganise la direction de plusieurs marques et prévoit des suppressions de poste en Suisse.

Toutefois, certains segments de l'horlogerie suscitent encore des espoirs comme les produits très haut de gamme, ou bien encore les montres connectées.

>> "L'horlogerie n'est pas en crise, c'est le monde qui l'est"

La digitalisation, un critère

Dernier point qui semble de plus en plus faire la différence: l'e-commerce. Le luxe s'est longtemps montré réticent à se digitaliser. Les craintes? Que l'image de marque soit ternie en raison d'un service moins à la hauteur de leurs ambitions, de pressions à la baisse sur les prix, ces derniers représentant un élément-clé dans la catégorisation des produits de luxe. Mais l'appétence des consommateurs pour les nouveaux moyens d'achat ont eu raison de leurs réticentes. La distribution en ligne continue donc de se développer rapidement. De façon internalisée ou externalisée, notamment via Yoox-Net-a-Porter, plateforme codétenue par Richemont, ou internalisée.

>> Les marques de luxe cèdent (discrètement) aux sirènes de la vente en ligne

Au point même que la précocité de leur adoption des stratégies digitales devient un critère de distinction pour certains investisseurs. "Prada ne voulait pas en entendre parler", assure l'un d'eux qui juge un peu "tardifs" les choix de la marque en la matière. La direction de Prada a annoncé lors d'une conférence avec des analystes financiers le 11 avril son intention de développer ses ventes en ligne, notamment via un partenariat avec Yoox-Net-A-Porter.

Une décision dévoilée en même temps que ses résultats en berne. Le bénéfice net de la griffe a en effet baissé de 6,5%, à 330,9 millions d'euros (359,8 millions de francs) au cours de son exercice 2015/2016 (achevé fin janvier 2016).

Finalement, les plateformes de vente en ligne de luxe semblent le mieux tirer leur épingle du jeu. Ainsi Net-a-Porter, la marque d'origine britannique du groupe né de la fusion avec le site italien Yoox vient-il de signer un autre partenariat de taille, avec le joailler Tiffany's.

Marina Torre

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