Personne n'a oublié les images des nations se disputant gants, masques et blouses stériles jusque sur les tarmacs des aéroports au début de la pandémie de Covid-19. Elles ont eu le mérite de susciter une prise de conscience de l'addiction excessive de l'Europe aux importations asiatiques chez un certain nombre d'acteurs.
En témoigne le projet de relocalisation porté par le groupe normand Didactic : un des principaux fournisseurs français de dispositifs médicaux à usage unique (gants d'examen, désinfectants, écouvillons, accessoires de perfusion et d'injection...) dont le chiffre d'affaires a doublé l'an dernier pour dépasser les 100 millions d'euros sous l'effet d'un afflux de commandes.
Souveraineté sanitaire
Jusqu'ici concepteur et distributeur, la société (75 salariés) va désormais fabriquer en propre une partie des dispositifs dits « d'abord parentéral » qu'elle importait de Chine à raison de 25 millions d'unités par an. Associée au plasturgiste normand Tag spécialisé dans le moulage par injection, elle investit 10 millions d'euros dans la construction d'une usine à Etainhus, près du Havre avec le soutien de France Relance. A la clef, le recrutement d'une quarantaine de nouveaux collaborateurs. Une question de souveraineté sanitaire pour Frédéric Viguie, son président.
« La crise Covid a été un élément déclencheur de cette transformation majeure pour nous. Elle a mis en évidence la nécessité de sécuriser l'approvisionnement de ces produits critiques qui sont utilisés quotidiennement par les soignants ».
L'intéressé veut croire que les esprits sont mûrs pour ce changement de paradigme. « 60 % de notre chiffre d'affaires est réalisé auprès d'hôpitaux publics via des groupements et on sent chez eux la volonté d'aller vers des achats avec une empreinte RSE plus forte dès lors que l'augmentation de coût est acceptable », constate t-il.
Reste toutefois à passer la barrière des appels d'offres dans lesquels le critère de la proximité n'a pas droit de cité. En réponse, Didactic va réaliser des bilans carbone « très poussés » de ses produits. « L'idée est d'objectiver les éléments qui permettront de faire la différence entre un produit fabriqué en Normandie et un autre fabriqué en Asie ».
Le projet havrais vient après le rachat par le groupe de l'entreprise canadienne Hygie, spécialisée dans les produits d'hygiène destinés aux patients dépendants, qui elle aussi dispose de son propre outil industriel. Cette acquisition devrait permettre à Didactic, qui est passé l'an dernier sous le contrôle du FCDE, le fonds d'investissement institutionnel français, de s'ouvrir les portes du marché américain, l'un des rares dans lesquels il n'est pas présent.
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