
Le gouvernement a dévoilé ce matin de nouvelles aides financières pour encourager les Français à troquer leurs chaudières au fioul et au gaz pour des pompes à chaleur géothermiques, qui permettent d'exploiter l'énergie contenue dans le sous-sol de la Terre afin de fournir de la chaleur et du froid de manière décarbonée. Une technique baptisée géothermie de surface.
Lors d'un déplacement à Clamart (Hauts-de-Seine), ce jeudi 2 février, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a indiqué vouloir « doubler le nombre d'installations de pompes à chaleur géothermiques chez les particuliers d'ici 2025 ». Autrement dit, passer de 3.000 installations par an, à 6.000. C'est l'un des principaux objectifs du nouveau plan d'action national conçu pour doper le développement de cette énergie renouvelable encore largement sous-exploitée.
Une énergie locale, bas carbone et continue
En France, la chaleur représente près de la moitié de la consommation énergétique du pays. Toutefois, cette chaleur est encore très carbonée en raison du recours massif aux énergies fossiles. Dans le résidentiel, on dénombre encore « plusieurs centaines de milliers de chaudières au fioul et des dizaines de milliers de chaudières au gaz », rappelle-t-on au ministère de la Transition énergétique. La géothermie, qu'elle soit profonde ou de surface (voir encadré en bas d'article), ne représente, elle, que 1% de la chaleur consommée.
Pourtant, cette technique cumule les avantages. « C'est une énergie locale, bas carbone, dont l'empreinte écologique est très faible, et qui n'est pas intermittente. Cela signifie qu'elle permet de produire de la chaleur en continu », fait valoir Sylvie Jéhanno, la PDG de Dalkia, une filiale d'EDF active dans ce domaine. « La géothermie émet entre 10 et 30 grammes de CO2 par kilowattheure et n'utilise pas de matériaux critiques », complète Alexandre Joly, responsable du pôle Energie chez Carbone 4 et auteur d'une étude sur la chaleur renouvelable.
« La géothermie de surface présente également un rendement énergétique supérieur à 4 alors qu'il est inférieur à 1 pour une chaudière à gaz ou au fioul [c'est-à-dire qu'il faut un kilowattheure de gaz naturel pour produire un peu moins d'un kilowattheure de chaleur, ndlr]. Et les pompes à chaleur géothermiques consomment 30% d'électricité de moins que les pompes à chaleur classiques », poursuit Sylvie Jéhanno.
De 5.000 à 16.000 euros d'aides
Reste que les pompes à chaleur géothermiques que les particuliers doivent acquérir pour bénéficier de la géothermie de surface demeurent onéreuses. « Une pompe à chaleur géothermique coûte entre 15 et 20.000 euros », pointe Alexandre Joly. Pour surmonter cet écueil, le gouvernement va renforcer, dès le mois de mars, « le coup de pouce chauffage » prévu dans le cadre des certificats d'économies d'énergie (CEE).
Désormais, tous les ménages, sans condition de revenus, pourront bénéficier d'une aide minimum de 5.000 euros pour l'installation d'une pompe à chaleur géothermique en remplacement d'une chaudière au charbon, au fioul ou au gaz. Pour les foyers les plus modestes, cette aide pourra grimper jusqu'à 16.000 euros et la prise en charge du coût du projet monter à 90% grâce aux CEE ainsi qu'au dispositif Ma Prime Renov, affirme la ministre. Pour les revenus les plus élevés, la prise en charge des coûts par l'Etat pourra grimper à 40%.
Jusqu'à présent, le coup de pouce chauffage s'élevait à 4.000 euros pour les ménages les plus modestes et à 2.500 euros pour les ménages aux revenus intermédiaires et supérieurs. Cette revalorisation des aides sera-t-elle suffisante ? « Dans tous les cas, les ménages devront avancer eux-mêmes les fonds pour s'équiper, ce qui peut constituer un frein », regrette Alexandre Joly. Par ailleurs, les aides ont été dimensionnées pour un coût moyen de 16.000 euros. Or, selon les professionnels du secteur, l'acquisition et l'installation d'une pompe à chaleur géothermique peuvent conduire à débourser plus de 20.000 euros.
Un rythme de déploiement insuffisant
« Le but, c'est de permettre aux Français de s'équiper avec des solutions durables qui leur garantissent un coût de l'énergie qui est sans augmentation tout au long de l'utilisation de leur équipement. Et ces équipements durent des dizaines d'années. Donc c'est vraiment un investissement qui a du sens », a, pour sa part, défendu Agnès Pannier-Runacher.
Pour convaincre, le gouvernement table également sur un autre argument : la géothermie permet aussi de produire du froid lorsqu'on renvoie les calories dans le sol. « C'est une solution d'avenir » dans un pays « qui va subir des vagues de chaleur et de canicule de plus en plus marquées », a souligné la ministre.
Aujourd'hui, quelque 200.000 pompes à chaleur géothermiques ont été déployées en France, soit trois fois moins qu'en Suède. La Suisse fait également figure de bonne élève. 15% des foyers y sont équipés d'une pompe à chaleur géothermique. Au ministère de la Transition énergétique, on reconnaît que le rythme actuel de déploiement est insuffisant pour atteindre les objectifs fixés dans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Pour la géothermie de surface, la production doit atteindre 7 TWh en 2028, contre 4,7 TWh actuellement.
La géothermie de surface s'appuie sur des forages de profondeur inférieure à 200 mètres. Elle repose sur l'utilisation d'une pompe à chaleur géothermique qui valorise la chaleur prélevée dans le sol. «Très concrètement, c'est un petit tuyau d'eau qui va chercher les calories de la Terre et qui circule ensuite dans le bâtiment », illustre Sylvie Jéhanno, PDG de l'entreprise Dalkia. A cette profondeur, la température est d'environ 14 degrés toute l'année. La géothermie de surface peut être déployée pour des bâtiments tertiaires, des logements individuels et collectifs ou des petits réseaux de chaleur, à l'échelle d'un quartier par exemple. La géothermie profonde repose, elle, sur des forages situés entre 200 et 5.000 mètres de profondeur, qui exploitent de l'eau géothermale à une température généralement comprise entre 30 et 90 degrés. Elle permet d'alimenter de vastes réseaux de chaleur qui desservent des villes entières. Le gouvernement entend également doper le développement de ce type de géothermie. Objectif : augmenter de 40% le nombre de projets de géothermie profonde lancés d'ici 2030. Au menu notamment : 10 millions d'euros pour la réalisation de cartographies plus précises et une extension d'un fonds de garantie existant avec 45 millions d'euros supplémentaires.Deux sources géothermiques
Sujets les + commentés