Engie vend son activité services : les salariés inquiets sur la nature du futur acquéreur

La direction d'Engie veut apaiser les inquiétudes sur l'avenir de Bright, la nouvelle entité dédiée aux services, que le groupe souhaite céder pour pouvoir accélérer dans les énergies renouvelables. Son acquéreur ne pourra pas procéder à des licenciements collectifs sur une période de deux ans. Un engagement insuffisant pour les syndicats, très inquiets sur la nature du futur acheteur.
Juliette Raynal
(Crédits : STEPHANE MAHE)

Les inquiétudes demeurent sur l'avenir d'Engie au sein des salariés malgré les nouveaux engagements sociaux pris par la direction. Hier, mercredi 23 juin, le Comité d'entreprise européen (CEE) d'Engie a rendu un avis négatif sur le projet de création de l'entité Bright, qui doit regrouper les deux tiers des activités de services du groupe et 74.000 collaborateurs dans une dizaine de pays, vouée à être cédée. Cet avis vient clôturer la consultation des instances représentatives du personnel initiée le 18 février dernier.

"L'analyse faite par notre expert montre que la cession de Bright ne sert strictement à rien. Cela n'a aucun intérêt, même sur le plan financier. D'une position de leader sur les activités multiservices, Bright va passer à la seconde place. Tandis que, pour le nouveau Engie, cela représenterait une perte de 13 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Et cette vente ne lui permettra pas de rattraper son retard dans les énergies renouvelables. Les ventes ne servent qu'à payer les dividendes", déplore Yohan Thiebaux, coordinateur CGT Engie

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Dans l'avis long de six pages que La Tribune a pu consulter, les membres du CEE d'Engie considèrent ainsi "qu'une séparation de Bright constituerait de toute évidence un affaiblissement pour le groupe Engie en réduisant son offre d'activités et une gamme complète et cohérente de compétences en lien avec la transition énergétique".

Le futur repreneur, la grande inconnue

"La grande inquiétude qui motive cet avis négatif, c'est l'absence d'information sur l'identité du futur repreneur. L'autre source de craintes, c'est le modèle économique dans un marché mouvant", explique José Belo, coordinateur CFDT du groupe Engie et secrétaire adjoint du CEE.

"Quel sera l'avenir de Bright ? Quel est son plan à moyen terme ? Toutes nos questions au cours de cette consultation ont été balayées d'un revers de main par la direction", critique Yohan Thiebaux.

Clayton Dubilier, Carlyle, Blackstone, Apollo, CVC, Advent, Bain, KKR... Une dizaine de grands fonds de capital-investissement ont déjà manifesté leur intérêt pour Bright. L'entité, qui doit rassembler les activités d'installations électriques, de chauffage, de ventilation et de climatisation ainsi que les services liés à l'information et la communication, attise aussi la convoitise de grands industriels, dont Bouygues et Spie. Mais jusqu'à présent aucune indication sur la nature et l'identité du repreneur n'a été communiquée par la direction.

Pas de licenciements pendant deux ans

Contacté par la rédaction, Engie précise que la publication de cet avis, même s'il est négatif, va permettre "la création managériale de Bright au 1er juillet prochain". La phase de marketing devrait débuter dans la foulée avec pour objectif de créer, un nom (Bright étant un nom de code), un logo et une identité propre à cette nouvelle entreprise.

Le groupe met également en avant les engagements sociaux pris en amont de la vente. La direction s'est notamment engagée sur la stabilité du périmètre de Bright et sur le maintien de l'emploi, sur une durée de 24 mois, à compter de la signature de la cession. "C'est un engagement que devra respecter le futur acquéreur", précise un porte-parole d'Engie. "Le futur acquéreur ne pourra pas vendre comme il le souhaite des parts de Bright pendant une certaine période", ajoute cette source.

"Bien évidemment, ce délai de 24 mois n'est pas suffisant. Mais l'on perçoit une certaine volonté affichée par la direction à ne pas passer en force. Il y a un certain système de loyauté qui s'installe. Cela donne un peu de respiration", reconnaît José Belo de la CFDT. "Mais tous ces engagements seront-ils maintenus ?", s'interroge le représentant syndical.

Vente effective dans l'année

Dans un autre document, distinct de l'avis, le CEE demande que le repreneur maintienne en l'état (hors acquisition) le périmètre et les activités actuelles de Bright pendant au moins 36 mois à compter de la cession ou de l'ouverture du capital.

Le CEE exige d'autres garanties. Notamment le fait qu'au moins 20% du capital soit réservé à un ou plusieurs fonds labellisés ISR ou à des investisseurs institutionnels français. Le comité européen demande également que l'Etat français, qui détient actuellement 24% du capital d'Engie, conserve une golden share. Cette  action de préférence lui permettrait ainsi de garder un droit de veto dans certaines circonstances spécifiques.

La signature de la vente de Bright pourrait intervenir dès décembre prochain, tandis que la vente effective est prévue pour juin 2022. Yohan Thiebaux de la CGT y voit "la volonté de commencer le démantèlement d'Engie". Le premier syndicat du groupe entend continuer à interpeller les politiques pour en faire un sujet des élections présidentielles.

Juliette Raynal

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Commentaires 3
à écrit le 25/06/2021 à 18:17
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D'expérience personnelle, difficile de faire pire (oui c'est vrai qu'on peut y arriver ...) qu'Engie Home services

à écrit le 25/06/2021 à 11:14
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Aucune inquiétude à avoir pour les cégétistes du comité d'entreprise d'Engie subventionné par le contribuable, aucun repreneur ne serait assez fou pour reprendre des ponctionnaires et leur montagne de privilèges notamment en ce qui concernene leur...

à écrit le 25/06/2021 à 9:33
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Scénario qui attend les salariés d EDF sncf et tutti qu’anti… je n aimerai pas travailler dans ce type d entreprise ex- étatique pas etonnant que certaines aient du mal à recruter compétences et talents plus aucun intérêt ni salarial ni social ( ces...

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